Subtil, subtil… oui, le qualificatif est approprié pour toute la trilogie.
Subtil changement d'atmosphère. Plus de meurtre. Et pour cause, l'ex-inspecteur Carmichael est à présent responsable du Guet : une force de l'ordre aux ordres du régime anglais fascisant de façon moyennement subtile : enlèvement, torture, déportation des « délinquants » vers le Reich. Carmichael, devenu un salaud ? Bah non car, si le Premier ministre l'a obligé à tenir ce poste (il suffit de menacer ses proches), Carmichael gère en sous-marin une organisation beaucoup plus digne.
Carmichael a pris sous son aile la fille de son défunt sergent, Elvira, devenue une jeune adulte élevée dans la haute dont elle a pris les tics même si souvent on lui dit qu'elle n'est « pas tout à fait… » (du milieu qui va bien. Elvira est la seconde voix du roman. Etonnant mélange que cette jeune fille, par certains côtés très prout-prout – elle ne peut s'empêcher de juger les vêtements qu'elle porte même lorsqu'elle est dans la mélasse jusqu'au cou – et par d'autres très volontaire et mature.
Subtil la façon dont ce monde uchronique a évolué. L'Angleterre est désormais gouvernée par des fascistes mais ça n'a pas empêché la mode vestimentaire d'évoluer à la vitesse consumériste grand V qu'on lui connaît. Les gens continuent d'aller dans les pubs, y compris des bars gays, et de s'amuser. L'aristocratie se comporte comme toujours et la saison des débutantes a toujours lieu. Là aussi la chappe de plomb tyrannique est subtile, les arrestations se font la nuit, la menace est, discrète mais réelle, et quand elle vous rattrape, malheur à vous. le reste du monde est dominé par les puissances qui ont perdu la guerre dans notre univers, et tout ce petit monde ayant la bombe, la situation s'est cristallisée.
La politique internationale intervient pourtant dans le destin de nos héros et dans celui de l'Angleterre ; là aussi c'est subtil, en tout cas cet aspect ne prend jamais le pas sur les actions et les introspections de Carmichael et d'Elvira, sur l'expression de leurs sentiments.
L'écriture de
Jo Walton est toujours sublime. Elle s'adapte à tous les milieux, s'attache à caractériser chaque personnage par des petits détails qui leur donnent vie.
Subtil… ne qualifie pas bien la fin en revanche. Je l'ai trouvée assez surréaliste, mais l'optimisme qu'elle porte m'a proprement enthousiasmé. Il m'a fait un bien fou. Je me dis que l'Angleterre d'aujourd'hui, à l'aube du Brexit, mériterait un discours de la Reine à l'aune de ce que l'on peut lire ici, à l'aune de celui que son père fit à l'aube de la seconde guerre mondiale et qui a si magnifiquement été mis en image dans le Discours d'un Roi.
Subtile… ce n'est pas non plus ainsi que je qualifierais la joie d'avoir réalisé cette lecture en commun avec Srafina. le plaisir de nos échanges a été immense.
Je reverrai
Jo Walton bientôt, je l'espère. Ce qui est sûr, c'est que ce sera avec
Morwenna.