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EAN : 9782021332582
336 pages
Seuil (18/10/2018)
  Existe en édition audio
3.75/5   160 notes
Résumé :
La situation critique dans laquelle se trouvent la biosphère et nos sociétés n’est plus à démontrer. Les dynamiques d’effondrements passent progressivement du probable au tangible, signifiant la fin du monde tel que nous le connaissons.

Comment se projeter au-delà et dessiner les contours non pas d’une survie, mais d’une manière de vivre ce siècle de catastrophes ? Comment passer d’une posture de repli à un enthousiasme collectif ? Les auteurs montren... >Voir plus
Que lire après Une autre fin du monde est possibleVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (13) Voir plus Ajouter une critique
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Bon, voilà. Je viens de terminer le dernier opus de Servigne & Co et je dois dire je reste un peu sur ma faim.

En résumé, dans Comment Tout Peut S'effondrer, Servigne & Stevens posent les faits : Énergies, Matières Premières, Biodiversité, Climat, Pollution, etc... Avec tous les chiffres, les études et une analyse transversale qui met en lumière de façon brillante l'interdépendance de tous ces sujets, on comprend bien qu'on ne peut plus légitimement nier la fin prochaine de l'ère thermo-industrielle (et avec elle, de notre - relativement - confortable situation).
Ce tome-ci, à contrario, est destiné à ceux qui sont déjà conscients, qui ont déjà pris la mesure du défi qui nous attend. Ici donc, point de zèle dans la rigueur froide des tableaux de données, on est là pour aborder l'aspect "intérieur" de l'effondrement, le côté psychologique donc, mais aussi spirituel : pour apprendre à vivre avec et à en parler; pour apprendre à regarder le monde avec des yeux neufs, non seulement ceux de notre espèce mais aussi ceux du vivant et du monde; et enfin pour porter un regard sur tous ces ponts qu'il nous restent encore à construire.

Subir le choc, se relever, aller de l'avant. C'est en quelques sorte l'algorithme simplifié des périodes troublées. Dans le premier chapitre, les auteurs abordent en profondeur l'aspect psychologique de la prise de conscience et osent s'ouvrir un peu (on rappelle que tout au long du livre, il est admis que le lecteur a accepté la réalité d'un effondrement), en parlant de leur propre expérience, mais aussi en faisant appel à d'autres témoignages : collapsonautes (usagers de l'effondrement), essayistes, psychologues ou encore psychanalystes pour tenter de poser une grille de lecture, nous permettre de déchiffrer nos sentiments pour mieux les appréhender.
Cette partie est une invitation à l'introspection, à la méditation, à la prise de recul en somme. C'est celle-ci, à vrai dire, qui m'a le plus perturbé (positivement). Après la lecture du premier opus et d'autres ouvrages similaires, je n'avais pas pris le temps du recul, de l'acceptation et, en mettant cette phase indispensable en lumière au début de ce livre, j'ai réalisé l'importance de ce travail personnel. Et pour être honnête, ça n'a pas été facile sur le moment mais une fois passé le cap, j'ai ressenti un certain soulagement.

Après cette bouffée d'air le trio nous invite à faire “un pas de côté”. Un pas de côté par rapport au scientisme zélé et cloisonnant ne nous permettant pas d'embrasser la connaissance dans toutes ces composantes interdépendantes, notamment l'aspect émotionnel (impact psychologique de leur propre découverte par les scientifiques par exemple) ; Un pas de côté par rapport à nous-même, pour voir avec les yeux de l'Autre mais aussi les yeux des autres espèces, pour mieux comprendre les interactions qui lient tous les êtres vivants tel un "mycélium pluriversel" ; Un pas de côté par rapport à nos mythes fondateurs, la compétition, l'individualisme, pour créer de nouveaux récits plus en phase avec le temps long de l'histoire humaine et du monde...
Cette deuxième partie a de quoi prendre au dépourvu. Voir des Scientifiques raisonnables et raisonnés proposer tant de regards hors cadres "Scientiste" a de quoi déboussoler. Néanmoins, les angles de vue présentés ne le sont pas de façon dogmatique; il s'agit, là-encore, d'une invitation. Il pourrait être difficile de passer outre tout un champ lexical rappelant ce qu'on pourrait aisément qualifier - de manière caricaturale - de "New Age", mais ici le prosélytisme est exclu, l'ouverture et la curiosité sont de mises. On a déjà suffisamment de portes fermées pour en plus se fermer des fenêtres sur d'autres perceptions.

Devant la distance susceptible de s'installer, un petit interlude pour présenter l'Ecopsychologie et l'Ecoféminisme vient nous permettre de faire une pause - c'est qu'il y'en a des choses à "processer", dans les pages précédentes.
L'Ecopsychologie est un domaine relativement récent (1990) et n'est malheureusement pas une discipline très éprouvée à l'heure actuelle. Elle propose de questionner les liens entre la psyché humaine et la Nature. L'Ecoféminisme a quant à lui surgit dans les années 1970 en réponse à la domination des hommes sur les femmes et sur la Nature, pour donner naissance à des actions féminines autogérées. Ces deux notions permettront de mettre en relief les sujets abordés dans la troisième et dernière partie.

Toujours dans l'invitation, les auteurs évoquent la création de liens. Tisser des liens avec les autres : voisins, villages, quartiers, mouvements... Avec le reste du vivant également - on a suffisamment vu dans les pages ou opus précédents la nécessité de descendre de notre anthro-piédestal.
A l'aide du "Calendrier Cosmique" (1), ils mettent en perspective la jeunesse de l'Homme et encore plus de notre société "moderne" : si l'évolution de l'univers (qui a environ 13.8 Milliards d'années) était représentée sur un calendrier d'un an, l'homo sapiens n'aurait fait son apparition qu'au 31 Décembre à 23h56 ; la société thermo-industrielle à 23h59m59s. Nous sommes jeunes (et c***) et il serait important de prendre conscience du temps long, aussi bien vers le passé que vers l'avenir, pour les prochaines générations; sans oublier tout ce qui nous dépasse, ce qui nous est inintelligible.
Les orientations proposées par la suite exposent encore un point de vue très personnel que les auteurs affirment et assument à plusieurs reprises; les émotions sont à l'oeuvre, on travaille ici à coeur ouvert. On y discute la patho-adolescence de l'humanité évoquée en filigrane juste avant, les réseaux de réconciliation avec le Féminin/Masculin tels que ManKind Project (2) et assimilés, ou encore un rapprochement avec la Nature afin de "faire revivre le sauvage" (au sens de : de quand date votre dernière nuit à la belle étoile? Savez-vous nommer les oiseaux qui vivent dans votre environnement proche?) pour enfin aborder la constitution de "réseaux de tempêtes".
Ce dernier chapitre est le plus déroutant. On ne s'attend pas à ce que des Scientifiques (issus des Sciences dites "exactes", par opposition aux Sciences Humaines & Sociales) parlent aussi ouvertement d'émotions sur fond de psychanalyse. Certains auteurs reconnus (C.G. Jung pour n'évoquer que lui) sont cités aux côtés d'activistes ou essayistes que je connais peu, voire pas, et à propos de domaines que je n'appréhende que de manière tout aussi lacunaire, ce qui rend le discours nébuleux à mes yeux.
Soit.

A mon sens, ce livre soulève beaucoup de questions très intéressantes tout en ne proposant que des pistes à explorer, différents regards sur le monde qui nous entoure, pour un cheminement personnel. le ton donné par l'ouverture sur les émotions des auteurs et aux nôtres-mêmes aident dans cette démarche. Chacun est libre de se reconnaître ou non dans ce mycélium d'idées et de n'en garder que ce qui lui convient.
Bien que cette lecture m'ait moins passionné que les deux derniers titres en date de Servigne - pour leurs caractères hautement factuel et rigoureux -, elle m'a permis de repenser la relation entre rationnel et émotionnel et d'ouvrir des voies d'exploration. Même sans être acquis à tous les points de vue évoqués, ce livre restera une source de remise en question sur les limites de notre vision du monde et sur la nécessité de penser l'interdépendance.


(1) https://fr.wikipedia.org/wiki/Calendrier_cosmique_de_Carl_Sagan
(2) On trouve très peu d'informations sur cette organisation qui proposent des retraites "spirituelles" entre hommes le temps d'un weekend, sous forme de rite de passage pour renouer avec sa masculinité. On peut trouver quelques témoignages très positifs de participants mais aucun (enfin très très peu de) détails sur les "rites" en question ou le déroulement du weekend, les participants devant signer une clause de confidentialité pour ne pas dénaturer l'expérience par des attentes.
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Servigne, Stevens et Chapelle ne s'effondrent pas, eux.
Après avoir fait le constat que tout peut s'effondrer, les 3 auteurs abordent la question de nos choix de vie en prévision de ce monde d'après, de ce monde inéluctablement différent qui, tôt ou tard va se dessiner et nous obliger à revoir nos fondamentaux.
Dans un style toujours aussi fluide et agréable, les 3 « ingénieurs » se défont de leurs lunettes rationnelles pour réfléchir à ce que la mutation de nos modes de vie implique ; plus exactement pour trouver comment vivre et non survivre dans ce monde défait.
L'effondrement de nos sociétés thermo-industrielles devient alors une opportunité : celle de reprendre la main sur le sens de nos vies, celui-là même qui nous échappait dans un environnement hyper technologique ; celle de retisser le lien entre nous par le fil d'une compréhension moins prétendument rationnelle et donc bien plus ouverte à ce qui fait aussi notre humanité.
Ils nous invitent à nous penser (et en comprendre la nécessité) , non plus comme « hors le monde » (au-dessus de lui) mais à nous reconnecter à celui-ci (ce qui dans une période de bouleversement comme on commence à la vivre risque d'être une gageure - mais avons nous le choix ?), à nous comprendre comme une partie prenante plutôt que dominante.

Ce serait trop dire que ce livre donne des solutions. Mais c'est sa force : il propose bien plus d'éléments de réflexion qui permettent de faire le bon diagnostic de ce qui nous a conduit jusqu'ici et qui devra forcément changer (qui changera par la force des choses, quoi qu'on en pense, qu'on le veuille ou non). C'est uniquement sur la base d'une compréhension plus juste (dans tous les sens du terme d'ailleurs) de notre place dans le monde (le « terrestre » de Bruno Latour) que nous saurons vivre plus apaisé (plus en équilibre) avec tous ses habitants. Et peut-être, d'ailleurs, chacun avec soi.
Finalement, l'effondrement, si nous savons, lui, le comprendre, même s'il ne sera pas une partie de plaisir, peut être une chance : celui de devenir enfin des hommes adultes, responsables, généreux et épanouis. C'est notre humilité qui sera notre salut.
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Ça y est, nous y sommes. C'est la fin de notre civilisation techno-industrielle. Pas de miracle à attendre, ni de solution technologique. Il nous faut nous préparer en changeant notre rapport au monde pour vivre cet effondrement, qui pourra prendre différentes formes. Pour vivre ces changements radicaux, et y survivre si possible, nous devons envisager nos relations avec tous les êtres vivants plutôt comme une coopération qu'une compétition. Bonne lecture et bonnes réflexions.
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Pour avoir subi également des violences médicales, du harcèlement, de la torture, et évidemment le déni de ces bourreaux censer  " soigner " plus d'être privé d'avenir, et les conséquences qui vont avec... lire ce livre à été très dur. Plus dur que le tome précédent qui parlait d'une destruction physique, alors qu'ici ça parle d'une destruction morale, psychologique qui est déjà omniprésente au quotidien.

Ce livre résume parfaitement bien l'état qu'on nous met, qu'on nous impose, alors que ce que l'on veut c'est vivre l'amour et la paix.

Je pense qu'on est beaucoup à avoir vécu, subit cela... à vivre, subir cela et que d'autres également subiront, vivront... puisqu'il y a un énorme manque de compassion, empathie, sensibilité dans les humains qui ont du pouvoir.

J'avais déjà lu ce livre, et je ne m'en souvenait pas ^^" Mais j'avais retenu des mêmes citations... Deux ans après cette première lecture, notre monde ne s'est pas amélioré, puisqu'il est de pire en pire, à laisser les injustices se faire et obligeant les gens à vivre avec.
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Avant d'ouvrir ce livre, j'avais un a priori mitigé sur la collapsologie, celui d'une fin du monde réservée aux survivalistes ou autres pessimistes.
Je me suis vite rendu compte que je me trompais, et qu'en plus, j'avais beaucoup plus d'affinité avec ce concept que je ne l'aurais cru.
En fait, les auteurs partent du principe que l'effondrement de notre civilisation est inéluctable, qu'il a déjà commencé – ce que je conçois parfaitement – et qu'il faut dès à présent se faire à l'idée et se préparer à cet effondrement. Non pas matériellement, mais intérieurement, spirituellement. Ils nous invitent à faire une sorte de travail de deuil. Notre monde actuel n'est plus viable, il va disparaître. Nous n'avons d'autres choix, si nous voulons passer le cap, que de nous préparer à affronter la souffrance à venir.
Comment être plus résilient ? Comment passer la tempête en restant heureux ? Comment rebondir ?
Accepter l'idée d'effondrement, en quelque sorte, libère l'esprit et aide à penser autrement nos relations avec les autres et la Nature.
Seul, l'individu est voué à l'échec (le survivaliste est voué à l'échec à plus ou moins moyen terme), mais en communauté, et aussi et surtout dans le respect et à l'écoute des autres espèces animales et végétales, l'humain a une chance de survivre et d'inventer d'autres formes de sociétés moins dévastatrices.
Face à la complexité du problème, les auteurs veulent donner plus de place à l'intuition, à la solidarité, à l'Art. Car la science n'a pas réponse à tout. D'ailleurs, j'ai noté que les auteurs ont parfois un regard très négatif sur la science. À mon avis, ce n'est pas la science qui est en faute, c'est ce qu'en font les humains qui pose problème. Les auteurs mettent aussi l'accent sur les initiations spirituelles. Là, je suis plus circonspect. Gare aux charlatans ! Quoiqu'il soit, je suis d'accord avec eux sur le fait qu'il vaut le coup d'expérimenter d'autres voies.
En conclusion, quelles qu'en soient ses conséquences et sa gravité, nous le vivons en direct, cet effondrement. Tempêtes, sécheresses, pandémies, pénuries, disparition d'espèces… Il est difficile de le nier. Nos actions seront-elles suffisantes pour l'enrailler ? Difficile à dire, et ce n'est pas l'objet du livre. Ce livre veut surtout nous préparer à mieux vivre cette tragique transition. Il nous faut réapprendre la vie en communauté, à écouter ses émotions et à se reconnecter avec la Terre. Tel est, en résumé (forcément réducteur), le message du livre.
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critiques presse (2)
LaCroix
08 janvier 2019
Pablo Servigne, Raphaël Stevens et Gauthier Chapelle proposent un nouveau cadre pour penser l’écologie, en réinventant de nouvelles solidarités et modes d’action.
Lire la critique sur le site : LaCroix
LeMonde
22 octobre 2018
L’explosion étant inéluctable, les efforts pour l’éviter dérisoires et vains, nous voilà dispensés des crispations, libérés des combats, disponibles pour traverser sereinement le temps qui reste.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (55) Voir plus Ajouter une citation
Le niveau de vie d'un Européen moyen est de 400 "esclaves énergétiques", ce qui signifie que chacun de nous consomme quotidiennement une quantité d'énergie équivalente à la force de travail de 400 personnes en bonne santé.
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Y a-t-il encore un monde sauvage ? Le rouleau compresseur de la civilisation n'a-t-il pas déjà tout grignoté, tout ravagé ? Au cours de ces siècles de domestication du monde sauvage, plantes, animaux, microbes, paysages, cultures ont été mis au pas, cadrés, enfermés, mesurés, processés... , tout comme notre psyché, considérablement appauvrie et elle-même domestiquée jusqu'à la folie.

La domestication n’est pas une simple anecdote, ou une petite branche de l’agronomie, c'est devenu notre monde. Imaginez, par exemple, que la biomasse de l’ensemble des humains représente 36 % de la biomasse de tous les mammifères du monde ! Et que 60 % de la biomasse des mammifères de la planète sont des animaux domestiques. Seuls 4 % sont des espèces sauvages (dont les éléphants et les baleines bleues !). La proportion est similaire pour les oiseaux du monde, dont 70 % de la biomasse sont des poules, dindons, oies et canards.

Les zones sauvages ont fortement régressé, particulièrement ces vingt dernières années, malgré des efforts pour les protéger (toutefois deux fois plus lents). Il ne resterait que 13% de surfaces de zones sauvages (non fréquentées par les humains) dans les océans et 23% sur les continents.

Côté psyché, c'est aussi la grande déconnexion. En 2003, les Européens passaient 90% de leur temps à l’intérieur et, selon ·une enquête récente, les Britanniques passent moins de deux heures par jour à l’extérieur, principalement pour aller faire les magasins ou conduire leur voiture. Quant à nos enfants, pour trois quarts d'entre eux, leur temps de jeu en plein air est moins élevé que celui accordé aux détenus de nos prisons.

pp. 247-8
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Un effondrement de civilisation n'est pas un événement (c'est-à-dire une catastrophe), mais un enchaînement d'événements catastrophiques ponctuels (ouragans, accidents industriels, attentats, pandémies, sécheresses, etc.) sur fond de changements progressifs non moins déstabilisants (désertification, dérèglements des saisons, pollutions rémanentes, extinctions d'espèces et de populations animales, etc.). Nous envisageons l'effondrement de la civilisation thermo-industrielle (ou même plus) comme un processus géographiquement hétérogène qui a déjà commencé, mais n'a pas encore atteint sa phase la plus critique, et qui se prolongera sur une durée indéterminée. C'est à la fois lointain et proche, lent et rapide, graduel et brutal. Cela ne concerne pas seulement des événements naturels, mais aussi (et surtout) des chocs politiques, économiques et sociaux, ainsi que des événements d'ordre psychologique (comme des basculements de conscience collective).
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En 2003, les européens passaient 90 % de leur temps à l’intérieur, et selon une enquête récente, les britanniques passent moins de deux heures par jour à l’extérieur… principalement pour aller faire les magasins ou conduire leur voiture. Quant à nos enfants, pour trois quarts d’entre eux, leur temps de jeu en plein air est moins élevé que celui accordé aux détenus de nos prisons.
Qui sait nommer les plantes qui poussent sur le trottoir d’en face, ou dire quand aura lieu la prochaine phase de la lune descendante ? Qui est capable de localiser cinq espèces de champignons vivant dans les environs ? Quelles espèces d’oiseaux migrateurs avez-vous déjà vues cette année ? A quand remonte la dernière fois ou vous avez parlé à un arbre ? Plongé votre corps dans une eau non chlorée ? Pris un insecte dans votre main ? Dormi à la belle étoile ?
Si, comme beaucoup vous ne savez pas répondre à la plupart de ces questions, vous vivez peut-être ce que l’écologue et écrivain Robert M Pyle, nomma en 1993 « l’extinction de l’expérience » ou la perte des liens directs et réguliers avec le monde vivant.
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Il est des histoires que l'on se raconte depuis si longtemps qu'elles ne ressemblent plus à des histoires mais à des vérités indiscutables. Elles sont le paysage, elles donnent du sens à notre monde et à notre existence, elles constituent le socle inconscient de nos pensées et de nos actions. Parmi ces histoires, il y a celle du progrès, qui raconte que notre société peut croître sans fin. Le savoir, la technologie, l'individu, la liberté, l'économie, les systèmes sociaux sont tous susceptibles de s'améliorer indéfiniment, pour les siècles des siècles car le progrès n'a aucune limite. Cette histoire en génère d'autres, comme le « solutionnisme technocratique » qui consiste à croire que tout problème peut être résolu par une solution technique : des voitures hybrides et des éoliennes pour « résoudre » le réchauffement climatique et la fin des combustibles fossiles ; des drones, du big data, des compteurs intelligents et des réseaux électriques (smart grids) intelligents pour mettre en place la transition énergétique; de l'économie circulaire et collaborative pour abolir la production de déchets, les inégalités et les tensions sociales ; la colonisation de Mars pour échapper à la catastrophe écologique, etc.

Il y a aussi cette étrange croyance qu'il n'existe qu'une seule loi de la jungle - la compétition - et qu'elle peut se traduire en « loi du plus fort ». Et ce conte à la fois magique et tragique qui commence par·: « Il était une fois un peuple d'humains, se séparant de la Nature par son intelligence … » Et tous ces contes s'entremêlent avec une certaine logique. « Le mythe du progrès est fondé sur le mythe de la nature. Le premier nous dit que nous sommes destinés à la grandeur, le second nous dit que cette grandeur est gratuite ».
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Gauthier Chapelle explique le biomimétisme.
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