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EAN : 9791097088552
260 pages
Divergences (10/02/2023)
4.43/5   7 notes
Résumé :
Loin d’être un phénomène purement biologique, les règles et plus généralement le cycle menstruel forment une expérience socialisée. Chaque société développe une culture menstruelle dominante, faite de pratiques, techniques et représentations plus ou moins acceptables. Ce livre étudie la culture menstruelle propre aux sociétés consuméristes, dans lesquelles toute expérience (notamment, toute expérience du corps) tend à être associée à des produits marchands. À traver... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
En mai dernier, j'ai eu l'opportunité d'assister à une rencontre avec Jeanne Guien autour de ce livre, et son intervention m'avait tellement plu (fait halluciner ?) que je n'ai pas pu m'empêcher d'acheter son livre pour poursuivre la conversation.

Dans cet essai, Jeanne revient sur l'histoire de la création des serviettes hygiéniques et des tampons, mais pas que. Elle va plus loin et s'interroge sur le marché qui se cache derrière ces produits qu'on nous vend.

Jouant sur un marketing de la peur et de la honte (le sang ne doit pas être vu, montré, ni ressenti, il ne faut pas qu'on sache que vous ayez vos règles, oubliez même que vous avez vos règles), l'industrie des produits périodiques jetables s'est imposé sur le marché sans aucun précédent. Leur argument ? Ces produits sont mieux pour vous car plus hygiéniques, plus blancs, plus modernes (on se passera de commentaire sur l'association blanc = pureté et modernité).

Alors oui, je pense que les produits menstruels ont aidé les femmes à se libérer du temps, et même d'une certaine charge mentale. Mais à quel prix ? Car pour proposer des produits toujours plus blancs et absorbants, ces compagnies utilisent des produits chimiques souvent dangereux. Et même en connaissance de cause, cela ne les arrête pas. A titre d'exemple, on apprend qu'en 1996, des produits retirés du marché européen et nord-américain ont continué d'être vendu ailleurs dans le monde car il y avait moins de contrôles et de plaintes.

Et ce n'est pas non plus en faisant quelques campagnes de pub d'empowerment et des dons ponctuels en Afrique que cela fera changer les choses. Si ces marques étaient vraiment engagées pour le bien-être des personnes menstruées, elles pourraient par exemple réduire les inégalités salariales dans leurs propres entreprises, ou proposer exclusivement des produits sains sans danger pour la santé. Pourtant, à côté des nouvelles gammes en coton bio, sans chlore, on trouve toujours et majoritairement les autres gammes remplies de parfums et autres cochonneries.

Dans cet essai, il y a également tout un chapitre consacré aux applications de suivi menstruel, qui à leur manière, profite également des menstruations pour se faire de l'argent.

Mais la meilleure façon de résumer ce livre se trouve peut-être dans ces quelques lignes que l'on peut lire à la fin de l'essai : « L'industrie des produits menstruels a su jouer de ces ambivalences, en décrivant les femmes comme handicapées physiquement et socialement par leurs règles, mais « libérées » par les produits menstruels; en répétant que les règles étaient un processus normal, tout en l'entourant de précautions et de secrets; en employant des femmes, tout en leur donnant des positions subordonnées; en prétendant les guider dans la gestion de leur vie intime, tout en revendant leurs données à ce sujet… »

C'est donc un livre très complet, très documenté, que je vous invite vraiment à lire. Sans être forcément d'accord sur tous les points de vue, il a le mérite de nous ouvrir les yeux sur l'industrie des protections menstruelles et ses conséquences sur les personnes menstruées.

D'ailleurs, le mot « protection » en lui-même, quand on y pense, ne continue-t-il pas à alimenter ce tabou des règles ? Pourquoi se protéger de quelque chose de complètement naturel ?
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Dans son livre, "Une histoire des produits menstruels", Jeanne Guien fait l'histoire des serviettes, des tampons et des applications de suivi du cycle menstruel. Elle nous montre que la complexification des produits sert bien plus leur opacité que leur progrès, que leur marchandisation est toujours une dépolitisation, que leur privatisation implique toujours une déprise sociale et que la personnalisation de la santé induit un environnement dégradé. Sur les applications de santé menstruelles en tout cas, elle explique très bien combien celles-ci sont défaillantes parce qu'elles ne sont pas produites comme elles devraient l'être, c'est-à-dire comme un service public respectueux de la diversité de ses utilisatrices, qui ne devrait jamais reposer sur des normes non scientifiques et toujours respecter l'intimité de ses utilisatrices. Ce n'est pas le cas, et c'est tout le problème ! Or, dans le domaine de la santé, la confidentialité est toujours critique ! C'est pourtant tout le contraire que produisent ces applications sensées respecter l'intimité de leurs utilisatrices. Ce que montre cet exemple, c'est qu'il n'y a pas d'alternative à un service public pour ces applications. Qu'elles revendent ou partagent les données de celles qui les utilisent est en fait inadmissible. Qu'elles produisent des inférences et des corrélations, qu'elles livrent des interprétations ambivalentes comme normatives est inadmissible également. La démonstration de Jeanne Guien permet d'illustrer très concrètement les propos d'Ethan Zuckerman quand il nous dit que l'internet a besoin de services publics forts. Elle nous montre qu'il n'y a pas d'alternative à des services publics numériques en tout point protecteurs.
Lien : https://hubertguillaud.wordp..
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Un essai nécessaire, fouillé et brillant qui interpelle sur la logique marchande de notre société capitaliste au détriment de la santé publique.

L'autrice démonte les clichés hétéronormés et renverse les idéologies culpabilisantes.

C'est bouillonnant et passionnant.

À lire ! ♥
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critiques presse (1)
LeMonde
03 mars 2023
Mais pour Jeanne Guien, ce n’est qu’une des raisons de se pencher sur ces produits dits d’« hygiène féminine ». Car retracer l’histoire des serviettes jetables, des tampons et des applications de suivi du cycle menstruel permet surtout à la chercheuse en philosophie de penser les menstruations comme un « fait social ».
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
Ce livre porte sur trois objets : les serviettes jetables, les tampons jetables et les applications de suivi du cycle menstruel. Parce qu'ils ont été conçus et fabriqués pour être commercialisés, ces objets sont des produits. D'autant plus que leur usage implique une relation marchande durable, par le ré-achat régulier (pour les serviettes et les tampons, qui sont jetables) ou la connexion permanente à des produits et services payants (pour les applications, qui dépendent d'appareils connectés à internet et dont les algorithmes sont régulièrement mis à jour). Leur usage inplique de vivre dans une société consumériste : un monde où avoir, utiliser, partager quelque chose c'est d'abord acheter quelque chose. (7)
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Selon Laetitia Della Bianca, les moniteurs de fertilité développés dans les années 1980 furent décrits par des auteurs féministes comme des outils de dépossession, occasionnant un "transfert des compétences" : loin de permettre une plus grande autonomie aux femmes en leur permettant de se passer du médecin ou du secteur pharmaceutique, le moniteur "invisibilise les compétences interprétatives de ses utilisatrices/lectrices et c'est l'objet lui-même qui reçoit le crédit de ce travail de lecture". On quitte une dépendance pour en trouver une autre, moins incarnée (puisqu'il n'y a pas de figure du médecin qui prescrit) mais tout aussi puissante (celle de l'industrie qui produit l'outil, le commercialise et le fait fonctionner).
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Pourtant, le SCT [Syndrome du Choc Toxique] ou l'exposition aux produits chimiques présents dans les tampons peuvent être considérés comme des violences de genre, dans la mesure où le développement de produits toujours plus absorbants s'inscrit dans le contexte de l'exploitation économique de la discrimination menstruelle et de la "culture de la dissimulation". La course à la "superabsorption", aux innovations permettant de porter les tampons le plus longtemps possible repose sur l'idée fondamentale que les produits menstruels doivent servir à dissimuler les règles et le statut de personne menstruée, qui ne correspondent pas aux standards de la "féminité".
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La féminité supposée de l'usager est elle-même mise en scène de façon stéréotypée dans les applications menstruelles : on constate un grand usage des couleurs rose, rouge ou violet, des nuances de pastel, des motifs tels que les fleurs, les chats, les licornes, les papillons, les dauphins, les lapins, les arbres, les plumes, les cercles, les arcs-en-ciel, les coeurs, les sirènes, les carnets secrets. Ces symboles genrés et infantilisants s'accompagnent parfois de la féminisation de l'application elle-même, qui peut porter un nom féminin [...] ou être présentée dans les descriptifs promotionnels comme "votre meilleure amie".
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La revente des données constitue une véritable menace pour les droits des femmes, notamment pour le droit à l'avortement [...]. Ces applications sont apparues comme de potentielles sources [aux États-Unis] pour prouver qu'une utilisatrice aurait eu recours à un avortement. N'importe quelle application stockant les données dans un cloud pourrait en effet se voir présenter un mandat par la police et être contrainte d'y répondre, en fournissant la date des dernières règles, des derniers rapports non protégés, les informations sur les contraceptifs utilisés, les avortements subis...
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Video de Jeanne Guien (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Jeanne Guien
Jeanne Guien vous présente son ouvrage "Le consumérisme à travers ses objets : gobelets, vitrines, mouchoirs, smartphones et déodorants" aux éditions Divergences. Entretien avec Pierre Crétois.
Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2557254/jeanne-guien-le-consumerisme-a-travers-ses-objets-gobelets-vitrines-mouchoirs-smartphones-et-deodorants
Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube.
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