J'ai pour habitude de commencer une année de lectures avec des textes d'auteurs que je ne connais pas. J'ai fait quelques belles découvertes mais je crois n'avoir jamais débuté une année avec un tel navet.
La couverture, le résumé avaient attiré mon attention.
La lecture de ce livre fut un véritable calvaire. Comment vous dire ? du grand n'importe quoi. Une histoire brouillonne, des scènes glauques, des délires stylistiques qui vont de la platitude au grotesque. N'en jetez plus.
Je n'ai jamais été aussi heureuse de venir à bout de ce roman sans queue ni tête.
Ce qui me console c'est que mes futures lectures ne pourront que surpasser celle-ci. Enfin je l'espère...
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"Le monde prendra fin, il ne restera qu'une minute et la minute s'écoulera, comme les autres, inconsciente d'elle même. Dehors, certains patienteront derrière le guichet d'un bâtiment administratif, ce n'est pas une mauvaise fin. D'autres mangeront une poule au pot avec une gloutonnerie tragique. Une multitude adressera une prière au ciel, dans une multitude de langue. Les plus fous, autrement dit les plus sages, plieront simplement leur serviette de table et diront merci pour tout. Si on me présentait ma dernière minute sur un plateau d'argent, je m'évanouirais d'effroi. Je tiens à la vie, extrêmement.
Qui pense à moi le matin ?"
Elle ressent du désespoir, le mot n’est pas une broderie. Un désespoir d’une espèce vexante, parce qu’après tout, elle met un pied devant l’autre, l’entreprise peut sembler dérisoire. Elle dresse le bilan de son état : coeur douloureux, suffocation, grande fatigue, envie de pleurer, sentiment de nullité, tentation de l’abandon. Pourtant quand elle baisse les yeux, elle voit ses jambes en action, leur mouvement vite et tenace qu’on ne peut pas confondre avec la lenteur de la marche. L’esprit, celui qui refusait d’abord de courir, dit ceci : Endure et ce sera fini. Adore ta fatigue. Tes pensées molles, crève-les. Cours.
Elle obéit, les dents mordues, elle oublie de respirer, tousse, écrase ses foulées, tient bon. L’âme veille à la course, le corps court. Une modification s’opère, qu’elle ne pourrait pas précisément décrire, et qui ne concerne ni le corps ni l’esprit, mais le champ irréaliste de la foi : elle se croit guérie d’une maladie. La fatigue persiste mais elle n’a mal nulle part, elle ne souffre plus, et ne plus souffrir est une joie. Elle s’imagine que c’est une récompense, que quelqu’un la félicite pour ses efforts. Elle est émerveillée par la régularité de son souffle, qu’elle écoute. Elle se dit qu’elle tire de ce souffle un enseignement. Elle éprouve un sentiment diffus de beauté et de réconciliation. Plus loin, l’épuisement revient. Elle s’encourage, sa patience a grandi. Un point de côté vient attaquer e flanc droit. Elle se concentre sur lui, elle le combat, elle lui demande de s’en aller, elle sait qu’en respirant très profondément, il partira.
Elle ouvre la fenêtre pour aérer, mais c'est déjà fait, la chambre est rose d'air neuf. Elle bat l'oreiller et la mère dit que ce n'est pas la peine, quelqu'un l'a battu. Elle demande qui a battu l'oreiller et ouvert la fenêtre, l'infirmière peut-être. La mère répond, avec l'air le plus secret du monde, ce n'est pas l'infirmière. La mère se frotte les mains de plaisir, il y a eu une enquête.
"Pourquoi nous avoir donné un corps, il empire à mesure que l'esprit tâche de s'élever"
Les histoires arrivent, s'oublient, sont suivies d'autres histoires qui leur ressemblent et font dire aux gens : cette histoire me rappelle une autre histoire. Les histoires nouvelles ravivent un instant et enterrent pour longtemps les histoires anciennes.
L'émission intégrale : https://www.web-tv-culture.com/emission/emilie-de-turckheim-lunch-box-52661.html
Comme elle le dit elle-même, d'aussi loin qu'elle s'en souvienne, la vie d'Emilie de Turckheim s'est toujours construite dans les livres et les histoires, celles qu'on lui racontait comme celles qu'elle s'inventait.
Parallèlement, les souvenirs de sa petite enfance sont liés à ces quatre années pendant lesquelles sa famille s'était expatriée professionnellement aux Etats-Unis.
De retour en France, ses études de droit, de socio ou de sciences politiques n'ont jamais fait dévier la jeune femme de son objectif premier, elle serait écrivain.
A 24 ans, elle publie « Les amants terrestres » suivi rapidement de « Chute libre », « le joli mois de mai » ou « Héloïse est chauve ». Autant de titres, certains primés, qui installent durablement Emilie de Turckheim sur l'étagère des auteurs qui comptent.
Son nouveau roman, qui signe son entrée chez Gallimard, confirme tout le bien qu'on pendait déjà d'elle.
Avec « Lunch box », ses souvenirs d'enfance ne sont pas loin. La lunch box, c'est cette petite boite métallique dans laquelle, chaque matin, toute bonne mère de famille américaine prépare le pique-nique de son enfant, y glissant entre deux tranches de pain de mie et un blanc de dinde, tout son amour et sa tendresse.
Nous sommes donc au milieu des années 80, dans une petite ville cossue de la côte est des Etats-Unis, là où sont installées de nombreuses familles françaises, souvent expatriées pour le business. Dans ce petit monde clos, au nom de la légendaire amitié franco-américaine, on se reçoit avec force effusions mais bien souvent les sourires restent de façade et ne traduisent qu'une partie des sentiments. C'est dans ce décor qu'évolue Sarah, une jeune professeur de musique qui, dans l'école bilingue de la petite ville, est la coqueluche des enfants et de leurs parents car, derrière son côté fantasque, elle n'a pas son pareil pour mettre sur pied les spectacles de fin d'année. Sarah a un coup de coeur pour David, à qui elle donne des cours de piano. Mais il est marié à Solène et leur fille, Laëtitia, est aussi l'élève de Sarah. Bref, rien n'est simple. Pourtant, dans ce décor rêvé de l'american way of life, Sarah a envie d'y croire. En attendant, deux fois par semaine, dans son van, elle accompagne six enfants du quartier à l'école, dont la petite Laëtitia. Mais, comme inévitable, le drame arrive, les sourires s'effacent et le quotidien de cette communauté éclate en mille morceaux.
Habilement construit, en deux temps, après et avant le drame, avec un enchainement implacable que je me garderai bien de vous dévoiler, le roman d'Emilie de Turckheim est une réussite, tant sur l'intrigue que sur la qualité de l'écriture, une histoire cruelle et féroce abordant entre autres les thèmes du deuil, du déracinement, de la fatalité et de la culpabilité.
Les personnages se fissurent au fil des pages, se laissant envahir par la mélancolie et le mal de vivre. Et cette Amérique idéalisée devient un enfer inextinguible où le destin tire les ficelles inexorablement.
« Lunch box » d'Emilie de Thurckheim est publié chez Gallimard.
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