Sympathique découverte que ce Voracidad de Juan Bas, qui semblait être une lecture idéale pour accompagner un tinto de verano dans un chiringuito mais qui est tellement masculine et crade que j'ai eu peur de me mettre tout à coup à me gratter l'entrejambe en matant les serveuses. Violent donc, sale et très drôle. Mais très sale.
Voracidad se trouve être le second roman de la trilogie consacrée à Pacho Murga, le jouisseur en galère, et n'a jamais été traduit contrairement aux deux autres. On comprend enfin pour quelle raison le Basque passe du coma dans lequel il est plongé à la fin de Scorpions pressés à une prison des îles Canaries dans Vade retro Dimitri. Pourquoi ne pas avoir traduit celui-ci, mystère, et c'est dommage, car Juan Bas est toujours ce nihiliste flamboyant qui sait comme personne faire ressortir la petitesse et la misère morale d'un pays gouverné par la droite dure et obsédé par l'hyper consommation. La voracité dans toute sa splendeur.
Nous retrouvons pour la seconde fois ce brave Pacho Murga , le fils à papa, l'esthète contemplatif et fin gourmet qui est resté sans le sou après un coma de deux ans. Le pijo qui a le coeur à gauche se réveille dans un pays gouverné par le P.P., ne supporte plus le nationalisme basque et quitte sa terre natale pour Madrid avec son nouvel ami Ricardo, un sympathique escroc à la petite semaine. Voracidad est le récit des aventures madrilènes de Pacho dans le monde sauvage de la télévision poubelle. Autant dire que Juan Bas va s'en donner à coeur joie dans la peinture à l'acide et la satire. Tout le monde va en prendre pour son grade, la bourgeoisie bilbaïne, l'église, l'Opus Dei, la télévision discount, les hommes d'affaire véreux, les pique assiettes, les célébrités à deux balles, les nationalistes basques, le PNV… Apparemment les Basques ne sont pas rancuniers puisque le roman a reçu le Premio Euskadi de littérature en 2007. Pour l'adaptation télé en revanche...Juan Bas joue avec bonheur avec les codes du roman picaresque, Voracidad est un roman foisonnant, son narrateur Pacho Murga n'occulte ni ses bassesses, ni ses travers, et quand il a recours au mensonge ou à la tromperie, jamais il ne se dédouane. Ses mésaventure permettent à l'auteur de nous mettre le nez dans les travers de la société espagnole, de la corruption à la misère intellectuelle. Ce roman nihiliste, violent, amoral, n'érige jamais son personnage en modèle de conduite et fait se côtoyer de manière déroutante et drôlatique l'esprit et le sexe, les considérations de Murga sur la peinture et l'art du cunnilingus par exemple. Bref, une chouette trilogie sur La cour des miracles de l'Espagne des années 2000.
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