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J. M. Coetzee (Préfacier, etc.)Dominique Bellec (Éditeur scientifique)Jocelyn Nayrand (Éditeur scientifique)
EAN : 9782916952420
174 pages
Le Passager Clandestin (07/04/2011)
3.81/5   8 notes
Résumé :
En 1884, le Sud-Ouest africain (actuelle Namibie) est proclamé protectorat allemand. L'année suivante, le mandataire militaire du Kaiser signe un traité d'alliance avec l'un des principaux peuples de la région (les Hereros).

Hendrik Witbooi, chef du peuple Nama qui occupe la partie sud du pays, refuse la protection allemande. En 1893, après l'attaque meurtrière de son camp par les troupes du gouverneur Curt Von François, il se lance dans une intense g... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
"vous ne faites que vous vanter de votre puissance que je ne connais que trop bien. Vous mentionnez aussi la récompense offerte pour ma tête ; je suis donc désormais un hors-la-loi.... Aussi suis-je à votre merci et la paix sera tout à la fois ma mort et la mort de ma nation. Car je sais qu'il n'existe pas de refuge sous votre domination."
Dans cette phrase prémonitoire, le capitaine Hendrik Witbooi chef du clan Oorlam (en Afrique australe) résume des années de lutte contre le colonisateur allemand qui finira par l'exterminer ainsi que son peuple, avec une rare sauvagerie. Cet échange de lettres, où Witbooi utilise avec une grande habileté la langue diplomatique (revendications, négociations, suppliques et tout cela avec beaucoup de politesse, de fausse soumission et d'apparente humilité) nous montre un homme subtil, sinueux quand il le faut, autoritaire quand c'est nécessaire, pragmatique souvent et rusé en permanence.
On sent monter la tension, la progression tragique, l'évolution des rapports entre les différents protagonistes, la violence de plus en plus grande employée par les colonisateurs pour s'imposer, jusqu'à la révolte finale, désespérée de Witbooi, et c'est poignant. Les allemands se jouent des rivalités et des conflits entre tribus, les anglais promettent leur aide mais se retournent du côté des allemands et Witbooi se bat sur tous les fronts à la fois, avec un courage et une intelligence exceptionnels.
Cette correspondance, qui n'est pas à l'honneur des européens, est magnifique dans son humanité, son espérance envers et contre tout, son entêtement à vouloir trouver la paix, et finalement le sacrifice de la vie d'un homme seul à se battre contre tous au nom de ses idées. Bouleversant vous dis-je, à nous rendre honteux.
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Ce recueil de lettres est prenant ! Ce livre collecte la correspondance entre le capitaine Witbooi, les représentants des autorités allemandes (colonisateurs de la Namibie) et les autres chefs africains.
Ce capitaine africain a une sacrée verve littéraire, j'ai beaucoup aimé le style de ses lettres, franc, mais avec quelques subtilités, avec (parfois) ausi une petite pointe d'humour, et surtout très respectueuses, même si elles sont adressées à ses ennemis et à ceux qui ont bafoué ses droits.
J'ai été très surprise par ces échanges polis et par une certaines éthique de la guerre, un respect de l'autre malgré les combats. Ici par exemple, on dira à son ennemi à quelle date on lancera l'attaque, tout en l'appelant "très cher ami" et en lui offrant ses "salutations amicales"
Witbooi est une personne attachante, même si nous ne savons pas exactement si nous devons toujours le croire ou pas. À le lire, il n'a jamais débuté de guerre avec les autres chefs, mais ne faisait que se défendre. Est-ce la réalité ? Nous pouvons voir ici tous les malheurs apportés par les colons qui se sont sentis maîtres dans un pays qui n'était pas le leur, obligeant les chefs à se soumettre, massacrant la population et n'ayant cure des coutumes locales.
Nous sentons une certaine tension monter au fil des lettres, celles-ci se font un peu moins cordiales avec le temps, un peu plus sèches (tout en restant polies). Mais nous allons vers une fin qui semble inévitable.
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C'est en cherchant un auteur namibien pour le challenge des Globe-trotteurs que j'ai fini par mettre la main sur la correspondance d'Hendrik Witbooi, dans la librairie Quilombo à Paris...Trouver les lettres d'un rebelle namibien dans une librairie au nom d'esclaves brésiliens auto-affranchis, la coïncidence semble douteuse !

Hendrik Witbooi fut un chef de clan Nama, l'un des peuples dits "rouges" de l'ancienne Namibie, ou de ce qui allait devenir le Sud-Ouest africain dans la seconde partie du 19e siècle. Votre paix sera la mort de ma nation rassemble une partie de sa correspondance, prolifique, avec ses alliés (fournisseurs d'armes, connaissances, Britanniques...) et ses ennemis (colonels allemands ou chefs de guerre hereros).

Ces lettres ont été écrites dans un contexte de grande invasion suite à la Conférence de Berlin de 1884, où la présence britannique s'amenuise et laisse place aux Allemands, bien décidés à "placer sous leur protection" leurs quelques ressortissants et les clans indigènes.

Les lettres de Witbooi, par leurs destinataires variés et l'enthousiasme perceptible de leur auteur à expliciter ses actes et à questionner ses interlocuteurs, dressent un tableau attristant d'un territoire soumis à d'éternels règlements de compte entre tribus locales, et particulièrement entre Nama (peuple rouge) et Hereros (peuple noir), cependant bien loin des images que l'on pourrait avoir de sauvages africains s'étripant sans foi ni loi : élevé dans la foi luthérienne, Witbooi semble ne jamais cesser ses contacts par écrit avec ses ennemis, auxquels il réclame la paix (posant parfois des conditions difficilement acceptables) ; de longues lettres lui servent aussi à dénoncer des pratiques déloyales (meurtres ou enlèvement de femmes et d'enfants innocents) ou à justifier ses agressions qu'il légitime souvent comme une réponse à un affront qu'on lui aurait fait précédemment.

Si la correspondance avec ses ennemis et les circonvolutions quant aux traités de paix peuvent lasser le lecteur, les échanges de Witbooi avec les représentants britanniques ou les colonels allemands sont eux révélateurs de l'hypocrisie d'une mission civilisatrice et protectrice autoproclamée : ses interrogations répétées sur les massacres commis, l'expropriation et l'installation de colons sur ses terres qu'il déloge (ce qui fait pousser aux Allemands des cris d'orfraie), et surtout sa solide argumentation concernant son refus de se soumettre à toute protection allemande sont autant de tentatives pour mettre les Européens face à leurs propres contradictions, et tenter de les convaincre en usant de leur propre rhétorique...Malheureusement en vain, les occupants se souciant finalement peu des convenances en si lointain pays.

Face à son regard lucide sur les menaces allemandes et la nécessité impérieuse de ne pas y céder, on comprend qu'Hendrik Witbooi soit désormais élevé au rang de légende de l'histoire namibienne ; si j'ai beaucoup ri à au ton faussement naïf qu'il emprunte et aux requêtes franchement gonflées qu'il émet parfois, je n'ai pu m'empêcher de me demander ce qu'il se serait passé si Nama et Hereros étaient parvenus à mettre leurs différends de côté...

Un texte suffisamment court pour être lu rapidement, à certaines lettres parfois longuettes, mais qui mérite vraiment d'être lu pour toute personne qui s'intéresserait à l'histoire africaine et à ses pans et héros méconnus !
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Il s'agit d'une correspondance de guerre établie entre Hendrick Witbooi, ancien capitaine de l'actuelle Namibie, les chefs de guerre de clans africains adverses,et les colons allemands.
Ce recueil de lettres a réellement donné lieu à un travail de recherche historique approfondi et minutieux. de plus, nous avons non seulement les lettres qu'il a écrites, mais également certaines réponses de ses adversaires. Cela permet réellement d'observer les différents points de vue et les argumentations opposées.
Enfin, ces lettres montrent également la diplomatie et la courtoisie utilisées par les chefs de guerre durant les correspondances et les rencontres. Cet aspect là est peu connu.
C'est vrai, j'aurais préféré qu'il y ait davantage de réponses écrites par les adversaires. Mais toutes les lettres n'ont pas pu être retrouvées. de plus, ce travail de reconstitution épistolaire a réellement été un travail important à saluer. Pour ceux qui aiment L Histoire sous ses aspects les moins connus, c'est un livre à lire.
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Un livre de correspondance relatant des relations politiques, d'une autre époque et dans un pays lointain. J'ai beaucoup aimé l'exotisme de cette histoire. Non seulement car elle est réelle, brute et qu'elle est sincère; on parle peu de "cette histoire là" aujourd'hui, mais qui vaut vraiment le détour, je conseille vivement.
Mention spéciale pour la maison d'édition : j'aime beaucoup le format, la grande qualité du papier et de la couverture !
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critiques presse (1)
Liberation
13 juin 2011
La magnifique correspondance du capitaine de la tribu des Witbooi avec ses ennemis, allemands ou hereros, entre 1889 et 1905.
Lire la critique sur le site : Liberation
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Je ne veux pas que vous cédiez à un homme blanc, quel qu'il soit, une ferme sur mes terres. L'idée que vous cédiez à un homme blanc une ferme sur vos propres terres ne me plaît d'ailleurs pas non plus. Car je pense que cette partie de l'Afrique est le territoire des chefs rouges. Nous sommes uns par la couleur et la coutume. Nous obéissons aux même lois, et ces lois sont satisfaisantes pour nous et pour notre peuple; car nous ne sommes pas durs les uns envers les autres, nous nous arrangeons entre nous, amicalement et en toute fraternité. Et si les sujets d'un chef souhaitent vivre avec ceux d'un autre chef, dans le village de ce dernier, ils peuvent le faire en paix, et les deux chefs seront satisfaits. Ils n'établissent pas entre eux de loi d'interdiction sur l'eau, le pâturage ou les routes, pas plus qu'ils ne réclament de l'argent en échange de l'une ou l'autre de ces choses. Non, nous laissons n'importe quel voyageur désireux de traverser nos terres y accéder librement, qu'il soit rouge, blanc ou noir. Et cela est juste et bon, et suffit à notre mode de vie.
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Le capitaine a alors pénétré dans notre village et l'a mis à sac avec une brutalité dont je n'aurais jamais cru capable un membre d'une nation blanche civilisée - une nation qui connaît les règles et les pratiques de la guerre. Mais cet homme m'a dépouillé, a tué des petits enfants sur le sein de leur mère et des enfants plus âgés et des femmes et des hommes.
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Car ce n'est pas moi qui ai créé les hommes, pas plus que vous, mais Dieu seul. Aussi suis-je maintenant à votre merci et la paix sera tout à la fois ma mort et la mort de ma nation. Car je sais qu'il n'existe pas de refuge sous votre domination.
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Je ne vois aucune culpabilité ni aucun tort dans l'attitude d'un homme qui refuse d'abandonner ce qui lui appartient simplement parce qu'un autre homme le lui demande.
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