«
L'amour en jachère », ce titre invite à la réflexion.
Qu'entend
Alain Fleitour par cette combinaison de mots ?
Je vais tenter d'exprimer ce qu'ils évoquent pour moi. La jachère permet le repos du sol, sa préparation afin de le rendre plus fertile, plus à même d'entrainer l'épanouissement des graines plantées. Constamment sollicité, ce sol devient pauvre et à la longue source de tourments. Se laisser le temps au repos, à l'introspection, à l'émerveillement, au calme permet à l'amour d'évoluer dans le temps et de s'élever en périodes de passion entre les épisodes d'accalmie ressourçants.
Cela peut aussi évoquer l'absence d'amour durant une période de la vie que l'on perçoit plus tard comme une préparation à l'amour.
Il est question d'absence, de perte, de deuil, de silence, de manque immense, et même d'envie d'en finir :
« Parfois une crevasse s'emblait s'ouvrir sous mes pas,
J'espérais alors
Que mon pied glisse,
Glisse pour te rejoindre ».
Ce début de recueil me renvoie à l'enfance, celle d'un petit garçon de six ans issu d'une fratrie privée de celle qui s'éteignit trop tôt laissant derrière elle de longs silences, un creux vide.
Au contact de la nature, la vie revient, le vent console et relève celui qui était à terre… :
« le vent qui me soulèvera verra des plaies béantes
Je m'imbibais de vie
Tu dérobais mes joies… ».
Le manque est présent sur ces pages :
« Faut-il crayonner
Sur un mur d'écolier
Ou graver sur un arbre libre
La faim de te revoir ».
Ce manque laisse aussi la place à l'envie de vivre et d'aimer. L'enfant blessé laisse la place à l'homme devenu fort de cette enfance.
L'amour redonne l'envie, et aide à se relever :
« Tu m'as éveillé à l'amour
Et de fou bonheur de vivre
Tout mon corps m'a dit bonjour
Et ta tendresse m'enivre ».
« J'ai envie
De dévorer le mot bonheur
Et partager la faim de nos semailles
Pour rassasier l'amour ».
Les vers sont écrits d'une plume très sensible, chaque mot trouve sens et donne apaisement à celui qui les lit. L'être aimé est choyé dans ces phrases enrobées d'une grande tendresse.
J'ai adoré ce recueil, chacun y trouvera une part de sa vérité.
La poésie d'
Alain Fleitour est accessible, elle s'inspire de la nature, des éléments tels que le vent, la mer, le soleil. Que peut-on vivre de plus fort que son ralliement à la nature ?
« Puis dans la pénombre des fleurs gorgées
D'oublis
Je dessinerai
Ton nom »
Dessiner un nom, son nom, le nom de l'être aimé ne s'écrit pas, il se dessine, se colore, s'enjolive… Quelle poésie !
Ce recueil a été plusieurs fois parcouru de mes yeux, il en ressort d'autres sensations à chacune des lectures.
Je ne peux que vous encourager à lire ce petit trésor.