Zeromski Stefan
La beauté de vivre
Masse critique ; merci à Babelio pour ce livre
L'action se passe entre le printemps 1882 et l'été 1904.
Piotr Rozlucki, notre héros termine ses études de sous-lieutenant dans l'armée russe et est envoyé en Pologne, qui pour la Russie n'existait pour ainsi dire pas puisque pour eux ce pays était la Russie aussi.
Laissée dans un état lamentable après de nombreux pogroms et batailles, la population est pauvre, l'agriculture presque nulle et l'état des routes, des bois, en friche. Pas d'école non plus, interdite.
Piotr est cependant partagé car une partie de sa famille était polonaise. Mais son premier regard il pense : « ce que j'ai lu sur les Polonais est bien vrai… C'est froid comme la pierre. Ca nous hait. On voit la haine dans chaque regard »
Tout au long de ce roman on parle beaucoup de la défaite terrible de l'insurrection de 1863 et de l'occupation, de ce fait, de l'occupation russe.
Après avoir retrouvé une partie de cette famille polonaise qui était la sienne, il aurait aimé connaitre la mort de son père, et le pourquoi, mais il n'en fut rien.
Il repartit donc vers sa vraie destination, la batterie d'artillerie à laquelle il était affecté.
Il tombe follement amoureux de Tatiana la fille de son chef, avec elle, il va partir en Europe visiter les grandes villes, des dissensions, il ne sait pas toujours sur quel pied jouer avec elle.
Rentré en Pologne, lors d'un repas, des soldats se moquent d'une jeune fille polonaise, et Piotr n'hésite pas à tenter de défendre l'honneur de cette jeune fille ; il est grièvement blessé et envoyé pendant deux ans dans une forteresse pour initier de nouvelles recrues.
Pendant ce temps Tatiana se suicide, pour lui c'est la fin de tout, de ce si grand amour et pourtant, en lui vit toujours cette dualité.
Il profite de ces deux années pour apprendre le polonais, pour lire la littérature et les poèmes du pays et il ressent le besoin de savoir, de comprendre, pas seulement la Pologne, mais lui-même, de se trouver, c'est un terrible dilemme.
Lors d'une sortie après ces deux ans, il décide de tenter de rencontrer et de connaitre la jeune fille pour laquelle il s'est battu, qu'il a souffert et a été exclu de son poste.
Il part alors et découvre un tout autre pays, des autres personnes, des combattants silencieux ou pas de ce pays écrasé depuis si longtemps et dans une grande misère.
Mais c'est malgré tout un être torturé. Il va vivre beaucoup d'autres aventures……
Il faut lire ce livre car au départ on pourrait penser un roman d'amour fou de Piotr, mais non, pas du tout, ce livre est merveilleux, chaque page est un questionnement sur la vie, la liberté, le respect, la tolérance ; l'auteur a été comparé à
Dostoïevski mais bien que j'aime beaucoup cet auteur ici, les idées prônées sont semblables mais décrites avec tellement de détails qu'il est impossible de ne pas voir apparaitre devant soi, les personnages, de comprendre leur caractère, leurs idées, de ne pas voir les paysages dévastés ou merveilleux. Ce livre aussi, combien de pages n'ais-je pas relue pour bien m'en imprégner et bien comprendre cette écriture qui vous porte à lire un livre normalement, une histoire, mais non, c'est tellement plus profond.
Si vous le permettez je reprendrais un paragraphe de la préface qui montre exactement ce que je ne suis pas capable de bien décrire.
« Mais pourquoi lire de livre ?
Parce que au-delà de l'époque et des décors, le sujet premier de ce roman est le besoin de devenir puis de rester libre. Etre indépendant est donc une nécessité âpre, difficile, mais exaltante que l'auteur décline sous toutes ses formes, lesquelles s'imbriquent l'une dans l'autre, nécessités ne pouvant exister séparément l'une sans l'autre. Aux côtés de notre héros Piotr, cet « homme nu » en quête d'identité et qui clame son droit de forger librement son destin, défilent enfants, hommes, femmes, communautés et enfin un peuple entier, et ils aspirent à cette chose simple, dont aujourd'hui nous oublions souvent la fragilité et le prix, la liberté de vivre dans la paix chez soi, de parler sa propre langue, de croire en un Dieu que l'on a choisi ou de ne croire en aucun Dieu, de travailler pour soi, mais aussi pour l'autre. »
Ainsi qu'une phrase au hasard de la lecture, mais il y en a tellement d'autres qu'il faut vous plonger dans ce livre :
Une autre phrase oh combien passée et actuelle dite dans ce livre: « combien d'hommes des plus valeureux, des plus purs et sans aucun doute des plus utiles à ce monde meurent sans cesse. Combien d'entre eux reposent sous terre, victimes de la cruauté et de la folie qui se déchainent partout »