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EAN : 9782840490555
46 pages
Seguier Editions (01/07/1995)
4/5   2 notes
Résumé :
Ces deux textes sont extraits de « Le noble art de se faire des ennemis » (1890, inédit en France).
Installé à Londres depuis 1859, James Mc Neill Whistler (1834-1903) expose avec un certain succès, jusqu’à ce que, en 1878, John Ruskin, critique d’art devenu un véritable monument national, exerce sa plume à l’encontre de son œuvre. Un procès s’ensuivra, que l’artiste gagnera, mais qui le ruinera.
Que lire après Le Procès contre Ruskin ; suivi de L'Art et les critiques d'artVoir plus
Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
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Curieux personnage que James Abbott Mac Neill Whistler.
Peintre américain vivant à Paris, puis à Londres. Cet artiste, dandy à l'esprit prompt aux réparties cinglantes, est l'auteur du recueil : « le noble Art de se faire des ennemis ». Et des ennemies, il n'en manque pas ! Nous le voyons au centre de la toile « L'hommage à Delacroix » peinte en 1864 par son ami Fantin-Latour. Il parade au premier plan, grand, une mèche blanche au milieu de boucles noires, une cambrure de toréador. Il peint des toiles qu'il appelle des « arrangements », des « symphonies » ou des « nocturnes » en leur donnant des numéros et des noms de couleurs. Il signe avec un petit papillon dessiné.

Le 15 novembre 1878, cet anticonformiste ne craint pas de faire un procès en diffamation au célèbre critique d'art anglais John Ruskin, ardent défenseur des préraphaélites, prêchant pour une peinture littéraire et moralisante.
Ruskin avait publié un jugement diffamatoire sur l'oeuvre du peintre en utilisant des phrases très dures : « La mauvaise éducation de monsieur Whistler est une imposture préméditée. Je n'ai jamais entendu un bouffon réclamer 200 guinées pour avoir jeté un pot de peinture à la face du public ». le pot de peinture était le tableau de Whistler : « Nocturne en noir et or – la chute de la fusée ».
Le Tout-Londres va se presser à ce procès pour rire de l'humour de Whistler.

Je reprends quelques passages d'un récit de l'un de mes recueils pour donner un aspect réaliste du procès :

Le jour du procès, l'Attorney Général avait interrogé Whistler sur l'oeuvre faisant l'objet de la procédure. L'artiste était très détendu, prêt à faire front et à démontrer ses théories sur la peinture.
— Quel est le sujet ? Une vue de Cremorne ?
— Ce Nocturne en noir et or est un effet de nuit et représente un feu d'artifice dans le parc de Cremorne. Rien de plus.
— Combien de temps avez-vous mis pour peindre ce tableau ?
— J'ai dû travailler dessus environ deux jours, Sir.
C'était le moment qu'attendait l'Attorney. Il avait lancé la phrase qu'il escomptait décisive :
— Oh ! Deux jours ! Et vous demandez 200 guinées pour un travail de deux jours ?
Devant le sourire goguenard de l'homme, Whistler avait senti qu'il devait réagir.
— Vous n'avez pas compris, Sir ! Je ne prétends pas faire payer le travail de deux journées, mais uniquement la science que j'ai appliquée à l'exécution de l'oeuvre. Cette science, je l'ai acquise par le labeur de toute ma vie.
Les applaudissements avaient été nourris.
Les témoins de Ruskin considéraient que les « Nocturnes » étaient des oeuvres non finies ne valant pas 200 guinées. Certains comparaient les tableaux a du papier peint légèrement coloré.
Pour finir, l'Attorney Général avait demandé à Whistler :
—Ainsi, monsieur Whistler, vous prétendez que ceux qui sont initiés aux techniques ne devraient rencontrer aucune difficulté à comprendre votre oeuvre. Mais pensez-vous être en mesure de me faire voir, à moi, la beauté de ce tableau ?
Whistler avait réfléchi. le visage narquois de ce faquin imbu de lui-même l'énervait. Tour à tour, il avait examiné son visage, puis son tableau, et dit dans le plus grand silence :
— Non, Sir ! Je crains que ce serait aussi inutile que si un musicien versait ses notes dans l'oreille d'un sourd.
Vexé, l'Attorney avait terminé sa plaidoirie en disant : « Jamais autant d'amusement n'a été offert au public anglais que les tableaux de monsieur Whistler ».

À la fin du procès, Ruskin n'avait été condamné faiblement que pour son attaque injurieuse envers l'artiste. Aux yeux des jurés, le Nocturne en noir et or n'était qu'une simple tache noire, sans valeur. Whistler avait bien tenté de leur expliquer pourquoi l'art devait être dégagé de tout verbiage inutile, seules les formes et les couleurs importaient, et non l'objet ou le personnage représenté. Tous ces gens n'avaient rien compris à l'art…

Ce petit ouvrage « Procès contre Ruskin » comprend deux textes extraits, d'une part, du « le noble Art de se faire des ennemis » parus en 1890, compte-rendu du procès complété de citations et réflexions humoristiques de Whistler signé de son papillon, d'autre part de « L'art et les critiques d'Art » dédié à Albert Moore par Whistler à la fin du procès.
Ce dernier écrit est un long réquisitoire injurieux contre Ruskin :
« Ruskin occupe une place à part, pour qui l'écriture est un art, indigne de son écriture. (…) Il faut en finir avec la suffisance et la superficialité ! Comment M. Ruskin, insatisfait de ses propres capacités, peut-il juger bon d'incarner le type même de l'incompétence, en parlant depuis quarante ans de ce qu'il n'a jamais fait ! »

Plusieurs oeuvres de Whistler provenant de la Frick Collection à New York viennent d'être exposées au musée d'Orsay jusqu'au 22 mai dernier.

https://www.wikiart.org/fr/james-abbott-mcneill-whistler/nocturne-in-black-and-gold-the-falling-rocket


Lien : http://www.httpsilartetaitco..
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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
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La perception du côté farce de la vie n’est que rarement donnée à notre peuple (les anglais), alors qu’elle constitue l’essentiel du « savoir-plaire » du Parisien. La finesse du Français, acquise en de longues flâneries et de spirituels caquetages de « café », l’assurance et la faconde du « petit-crevé », associées au « chic » gagné par une longue habitude, le brio de la « blague » d’atelier, l’aptitude à manier son « argot », les coups de patte du Figaro, et le don des petits paragraphes, qui lui permet d’écrire à propos d’une peinture : « C’est bien écrit ! », et d’un sujet, « C’est bien dit ! », voilà les éléments d’un « ensemble » inconcevable dans cette île.

« L’Art et les critiques d’Art » - J.M.N. Whistler, contre le critique d’Art anglais John Ruskin

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Vidéo de James Abbott McNeill Whistler
"White has a dark side."
Featuring: Symphony in White, No. 1: The White Girl by James McNeill Whistler, 1872
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