Ce roman est inspiré de personnes réelles. Eliza Acton a vraiment existé.
Entre 1835 et 1845, elle a rassemblé et testé des centaines de recettes, et écrit avec l'aide de son assistante Ann Kirby, certainement le livre de cuisine qui a révolutionné l'histoire du livre de cuisine. C'est elle, la première ,qui a eu l'idée d'inscrire la liste des ingrédients (même si elle les plaçait à la fin de la recette...), elle qui a eu l'idée des mesures exactes et non approximatives. Vendu à plus de 125 000 exemplaires, il a été ce qu'on peut appeler un best seller national et international ! Ce livre raconte cette période , la rencontre entre les deux jeunes femmes. Et s'il existe des traces historiques de la vie qu'a pu mener Eliza Acton, poétesse au départ, l'auteure prévient qu'elle a beaucoup brodé pour celle de Ann...
Ce serait un éditeur lui refusant ses poémes (jugés indécents et impudiques pour une jeune femme de la bonne société) qui lui a suggéré d'écrire un livre de cuisine poétique..
A partir de là, Eliza (36 ans ) ne quittera plus sa cuisine, son seul et véritable amour.. Son père ruiné s'est réfugié en France pour échapper au déshonneur de la prison, et Eliza et sa mère se voient obligées d'ouvrir une pension de famille. Pour l'aider , elle engage Ann (17 ans) , dont la pauvreté est un gouffre immense. Ann qui découvrira l'abondance , une forme de sécurité en même temps que la cuisine.
Mis à part Ann que nous suivrons lors de ses visites sur ses jours de congé, on ne sort pas beaucoup de cette cuisine, de cette maison.
Et si la vie de Ann (de part ses parents est tumultueuse), le ron-ron s'installe un peu, rythmé par les casseroles à récurer, la volaille à plumer, les épices à tester. Comme on parle de nourriture, c'est forcément gourmand, même si les recettes m'ont un peu" dépassées "! Les mots sont poétiques et évoquent un autre temps, une époque où les maitresses de maison ne "foutaient" pas un pied dans cette pièce, jugée trop "peuple". Et si les mots sont poétiques et mystérieux, les recettes me sont abstraites : Oeuf de cygne sur lit de salade.. Pêches en saumure...Ortollans garnis de crêtes-de-coq.... Bassine de bouillon épaissi à l'arrow-root... Crumpets à l'orange...Meringué de poires Bon- Chrétien... Oui vraiment, les mots sont poétiques, même si certains sont "opaques".
La chaleur du four, les mains rougies d'avoit trop frotté, les semelles des bottines qui se décollent...
L'ambiance d'une cuisine, les moeurs :
Annabel Abbs a produit un travail remaquable pour s'immerger dans ce XIX° siècle. La condition des pauvres défiait l'imagination, les asiles faisaient froid dans le dos... Etre une femme célibataire était difficile et souvent humiliant. Etre domestique donnait les pleins pouvoirs à certains hommes. Ne pas faire partie de la bourgeoisie signifiait bien souvent une vie précaire , à la merci de la gentillesse ou pas , de la bonne société.
Annabel Abbs le montre parfaitement.
Je n'ai rien à redire au niveau historique, au niveau gourmandise, l'auteure a respecté le cahier des charges qu'était la vie d'Eliza, et du coup a reporté sur l'autre figure féminine de quoi nous distraire, en essayant d'insuffler un peu de suspens, et de souffle narratif dans cette (inventée) de Ann.
Il se passe des tas de choses dans leurs vies en dehors de la cuisine, et pourtant je suis resté bloquée sur le seuil de cette pièce ...
Je n'ai pas été emballée plus que cela. Je ne suis pas passionnée par la cuisine , c'est sans doute pour cela , et aussi, parce que mes lectures se passant dans des cuisines du XIX ° siècle, impliquent le plus souvent une histoire policière ou une histoire d'amour en plus, quand ce n'est pas les deux...
Pas assez corsée et épicée pour moi, cette histoire de cuisinières !