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EAN : 9782367600956
464 pages
Erick Bonnier (24/08/2017)
4.11/5   9 notes
Résumé :
- Mathieu, as-tu respiré une fois, une seule fois, le parfum d’une fleur dans un jardin de ce pays ? me demande Leyli.

Non, Mathieu n’aura pas le temps de humer les roses de Chiraz.

Arrivé à Téhéran en 1976, il y découvre d'abord le Lycée Râzi qui lui offre le cadre rassurant d'un établissement français pour expatriés, tandis que son père est en charge du nucléaire iranien. Le Chah fait alors la une des magazines parisiens, son pays e... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (11) Voir plus Ajouter une critique
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Nuit persane est un premier roman qui m'a bouleversée.
Si je parle de mon ressenti de lectrice, je pourrais me limiter à Leyli, le personnage féminin qui est une sorte d'initiatrice du personnage principal, Mathieu, un jeune Français qui arrive à Téhéran en 1976. Leyli est d'abord une jeune lycéenne, entêtée devant ses profs tant elle aime la Littérature française et la culture de la Liberté.

Mais je vais commencer par souligner qu'à la base, on nous raconte ici une histoire, contrairement à trop de romans contemporains narcissiques et bavards. Une vraie histoire, avec les aléas de la vie, ses êtres que l'on aime et qu'on nous arrache. Et elle recoupe brutalement L Histoire, celle de la Révolution iranienne. Existe-t-il un autre roman qui l'ait prise ainsi à bras-le-corps, pour nous replonger dans son tourbillon, ces moments dramatiques ? Et l'on apprend que la France était alors très présente dans ce pays...
Je fais partie de ceux qui aiment apprendre des choses en lisant des romans, et bien je vous promets que vous allez apprendre beaucoup de choses (en particulier sur la culture « intérieure » de l'Iran).

Les quatre parties marquent quatre moments de la conscience de Mathieu, et de l'ampleur du texte lui-même. Dans la première, c'est clairement un adolescent qui ouvre les yeux (lui qui a peur de ne plus pouvoir décoller ses paupières sous l'air conditionné qui à l'époque fonctionnait très mal en Iran). Je me suis retrouvée dans son indignation contre l'injustice sociale, Amnesty par exemple, même si en Iran en 1976 c'était bien plus criant... Dans la seconde, Mathieu s'engage pour de bon, et il découvre que le réel se révèle alors sans pitié dans deux chapitres littérairement remarquables (au bidonville du sud de Téhéran, où la situation humanitaire est critique). le contraste est saisissant lors d'un voyage dans le nord de l'Iran, aux bords de la mer Caspienne (c'est amusant : au même moment où se déroule le roman de Javad Djavaheri !). J'avoue qu'en tant que lectrice j'ai parfois dû m'abandonner lors de quelques passages philosophiques (de philosophie islamique), mais cela n'est pas gênant parce que Mathieu nous sert de guide et qu'il entend tout sans chercher à tout comprendre. Il y a là un jeune Marseillais très savant que j'adore, mais bon, c'est subjectif !
La troisième partie fait totalement sortir Mathieu de son univers occidentalisé, et sa métamorphose se poursuit. Il passe un été au Bâzâr, et à partir de là une tension, à la fois historique (car la Révolution devint de plus en plus menaçante) et... érotique, est palpable pour le lecteur, totalement emporté ! On est loin du gamin des premières pages, qui s'ennuyait en arrivant à Téhéran. Et la quatrième partie est comme une course désespérée, sublime. Les liens entre les personnages, souvent nouveaux, se tissent de manière intense, comme dans ces périodes exceptionnelles de basculement historique grave.

Il y a plusieurs femmes marquantes dans Nuit persane, y compris une artiste contemporaine que l'on croise en quelques pages : elle, elle aura tout vu des dangers d'un islam imposé comme loi politique.
Alors, Leyli ? Ce que j'ai trouvé très fort, c'est que pour une histoire d'amour, ce personnage ne reste pas réduite au regard de Mathieu projetant sur elle son désir et ses fantasmes. Je finis en vous citant un de mes passages préférés, sur cette idée de l'amour que je trouve bouleversante, surtout après avoir fini le roman.
J'espère que vous ressentirez la même chose vous aussi !

« Alors je fermais les yeux de contentement et de joie, car cette transformation en elle, c'était ma vie à moi qui s'ouvrait à la verticale des possibles. Avec plus d'attention, je pouvais même entrevoir une autre loi de l'amour que je médite, impuissant, depuis : Leyli était une inconnue. Je l'aimais, ne la connaissais pas. Et justement, dans sa transformation en adulte, je devinais cette personne par-delà l'amour présent, qu'il allait falloir laisser se déployer pour l'aimer tout à fait. »
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Mathieu arrive de France en 1976, obligé par le travail de son père qui va aider à développer le nucléaire iranien. On entame le roman avec un personnage plutôt blasé, qui suit ses parents parce qu'il n'a pas le choix et qui n'aimait de toute façon pas sa vie à Paris. Il va au lycée avec d'autres expatriés, à Râzi. C'est là qu'il va rencontrer ses nouveaux amis, dont Homayoun et Leyli. Qu'ils soient français ou iraniens, ses proches apportent tous quelque chose à l'histoire, un point de vue particulier. Mathieu est certes le personnage principal mais tous les personnages secondaires sont au même niveau. Leyli n'a pas besoin de Mathieu pour être intelligente et s'accomplit en tant que femme sans aide extérieure. Leur relation est très bien amenée, on passe d'une amitié profonde à une relation amoureuse poétique. J'ai beaucoup aimé chacun des personnages et m'y suis très vite attachée.

Le roman est divisé en quatre parties, en quatre phases qui démontrent l'évolution de Mathieu. de jeune et insouciant, il devient brisé et révolutionnaire. Dès le début, je savais qu'au moins un des personnages n'allait pas s'en sortir. de cette manière, je n'ai pas été bouleversée, juste énervée, car toute cette histoire a une résonance avec le monde actuel et notre situation qui empire chaque jour un peu plus. Il y beaucoup de passages philosophiques, que j'avoue ne pas avoir toujours compris, mais qui donnent un vrai côté poétique et intellectuel au roman.

J'ai également appris beaucoup sur l'histoire de mon pays, je ne pensais pas que la France avait été si proche de l'Iran et c'était très intéressant de suivre les relations diplomatiques et l'hypocrisie sous-jacente du côté riche. Dès lors que Mathieu s'aventure un peu du côté des quartiers moins aisé, on ressent le changement d'ambiance du livre. Et la Révolution arrive vite. On sent venir l'extrémisme politique et les dommages de la religion dès la troisième partie. Au niveau des noms de politiques ou de références au persan, je n'ai pas tout suivi, c'était parfois un peu fouillis et mal expliqué, mais cela nous rend compte de l'état d'esprit dans lequel se trouve Mathieu, et son ignorance de petit français. Cela aide à s'identifier à lui. Je pense que le roman était un peu trop long, entre la deuxième et la troisième partie, il y avait beaucoup de moments de flottement; parfois peu utiles. On sent cependant la volonté de l'auteur de faire connaitre la culture iranienne et la beauté du pays (je l'ai beaucoup ressentie durant les passages des jardins), c'est très recherché et plein de détails, qui perdent parfois le lecteur.

J'ai beaucoup à dire sur ce roman, qui m'a profondément intéressé et appris des choses. C'est aussi l'intérêt de la lecture, apprendre et découvrir constamment. Je pourrais encore parler de l'Université de Téhéran, des mentions à la Sorbonne, de la violence ressentie lors des manifestations ou dans le bidonville, du côté politique très dense et complet, de la religion qu'on sent s'immiscer dans l'esprit des Iraniens et qui bouleverse tout, mais surtout de la maturité que prends Mathieu. Je me suis reconnue dans ses discussions avec son père, où il croyait tout savoir parce qu'il lisait des journaux...
Lien : https://auxpetitsbonheursweb..
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Nuit persane est un roman d'initiation, d'un jeune homme qui apprend à vivre dans l'ailleurs en sortant du lycée français du pays où son père a été muté. Il apprend alors petit à petit à reconnaître les dangers d'un pays, les travers d'un pouvoir qu'il ne soupçonnait pas.
Aimant découvrir l'histoire et la culture par les livres, je dois dire que j'ai beaucoup appris sur la révolution iranienne dans ce livre. L'auteur entremêle scène de vie quotidienne, matchs de foot, travail au bazâr et révolte intellectuelle, question de la place des journalistes correspondants, des étrangers sur le sol iranien. le personnage de Leyli est vraiment passionnant et passionné, fascinante par la prise de conscience du monde qui l'entoure.

Petit bémol : l'écriture n'est pas toujours fluide, et il m'est arrivé plusieurs fois de buter sur des phrases sans trop savoir à quoi elles se rapportaient. le choix des registres est parfois surprenant ...

Mais Nuit persane reste un livre agréable pour plonger dans le Téhéran d'il y a 30 ans !
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Nuit persane de Maxime Abolgassemi débute comme un roman d'adolescent. On y suit le personnage de Mathieu dans son agaçante jeunesse de fils d'expatriés en Iran, celle qui, fière d'être française, découvre les premiers jeux Atari, aime le football et les grands poètes diplomates. Mais, faire partie du prestigieux lycée Razi, y rencontrer une fille, va s'avérer au moment de passer le baccalauréat, être élu pour une autre épreuve, réussie parce que ratée, et qui se termine dans le sang.
Car subrepticement, sans en avoir l'air, le roman d'abord espiègle se transforme en une sombre découverte des violences et des bouleversements politiques de l'Iran. Parce que mine de rien, on est tout à fait sérieux quand on a dix-sept ans et qu'il est temps de rencontrer l'amour, la mort et puis la politique. Surtout quand la fille a envie d'ancrer sa présence dans l'histoire.
le roman passe ainsi avec beaucoup d'élégance du scintillement turquoise des roches iraniennes au sang noir des entailles que le Chah inflige à son peuple. Maxime Abolgasssemi n'élude pas non plus les cas de conscience taraudant les enthousiastes révolutionnaires qui appellent de leurs voeux au pouvoir Khomeiny. Cette aventure amoureuse et historique, la place qu'elle accorde au débat d'idées (comme dans les très bons romans russes), le temps nécessaire qu'elle prend pour faire naître et vivre ses personnages, permettent d'être immergés dans le questionnement d'une période, d'en approcher ses contradictions, par l'intelligence du sentiment.
L'oeuvre est aussi très belle parce qu'elle réveille les sens et qu'elle se tisse dans le sillage d'une jeune femme suivie parmi la foule, dans l'effluve de sa volonté. le récit, enlevé et fluide, croît en intensité dans l'avènement d'une déflagration finale.
Alors, dans cette aventure de la révolution des toits, le lecteur pourra-t-il garder son calme ?...
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Le roman remonte les souvenirs de Mathieu pour nous dévoiler une double histoire, une double révolution, intimement liées : celle de l'amour, lumineuse et impétueuse ; l'autre politique, sombre et destructrice.

Ce premier roman est riche, dense et complexe.
Le travail de recherche et de précision de l'auteur est admirable, mais occasionne, de fait, quelques longueurs qui essoufflent parfois la lecture.

Auprès de Mathieu et Leyli, nous sommes immergés dans les prémices de la Révolution islamique, au coeur de l'Histoire, dans un bouleversement à la fois historique et intime.

Historique car (il me semble) peu connaissent ce pan de l'Histoire, dans ce pays si éloigné géographiquement. Et pourtant ! Nous lui sommes liés à plus d'un titre, sans compter le recommencement continuel de l'Histoire.

Intime car il place Mathieu dans une situation ambivalente, entre deux pays, entre deux sociétés aux coutumes opposées, entre deux âges de la vie. Et où Mathieu se construit.
Intime car il évoque un (premier ?) amour innocent, exclusif, inconscient mais malmené par des causes extérieures qui le dépasse.
Lien : http://vivrelivre19.over-blo..
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critiques presse (1)
Actualitte
23 mars 2018
Le premier roman de Maxime Abolgassemi, révèle avec précision et densité les bouleversements et les violences politiques que la société iranienne et plus spécifiquement la ville de Téhéran (et sa jeunesse) ont éprouvés à cette époque.
Lire la critique sur le site : Actualitte
Citations et extraits (4) Ajouter une citation
Alors je fermais les yeux de contentement et de joie, car cette transformation en elle, c’était ma vie à moi qui s’ouvrait à la verticale des possibles. Avec plus d’attention, je pouvais même entrevoir une autre loi de l’amour que je médite, impuissant, depuis : Leyli éait une inconnue. Je l’aimais, ne la connaissais pas. Et justement, dans sa transformation en adulte, je devinais cette personne par-delà l’amour présent, qu’il allait falloir laisser se déployer pour l’aimer tout à fait.
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Bien sûr, il aurait fallu ne jamais sortir des tapis, rester mourir dans ces jardins aux cyprès mystiques, aux oiseaux légendaires, ne plus accepter de respirer un autre air que celui des nœuds tressés, ne plus se nourrir que du grenadier immense, et ne plus boire une autre eau que celle dont l’essence unit ciel et bassin, au champ central du plus beau des Bakhtiars...
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Dans le persan, elle chérissait par-dessus tout la fluidité, qui dit beaucoup en peu de sons, grâce à ces mots qui se réunissent en se simplifiant (et dans la diabolique complexité du genre, absolument imprévisible en français, elle me le signale avec irritation). Del c’est le cœur, « délam » suffit pour dire « mon cœur », « déleté », ton cœur. La lettre magique qui unit ce qu’on sépare, c’est l’ézâfé.
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Présente, je vous fuis ; absente, je vous trouve.
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Videos de Maxime Abolgassemi (4) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Maxime Abolgassemi
Cette conférence a été organisée par l'association TelTalks, présidée par Hugo Fontaine, dans le cadre du "Cycle démocratie 2023". Elle s'est déroulée le 21 septembre 2023 à 17h30 dans les locaux de Télécom Paris.
Maxime Abolgassemi enseigne la littérature et la culture générale en classes préparatoires au lycée Chateaubriand de Rennes. Docteur en lettres (université Paris-Sorbonne) et agrégé de lettres modernes, il est aussi titulaire d'une maîtrise de physique théorique (université Pierre-et-Marie-Curie). Ses travaux portent sur le « hasard objectif » des Surréalistes, la notion de contrefiction qu'il a introduite, et la transparence démocratique (à laquelle il consacre un ouvrage à paraître). En 2017, il publie Nuit persane, un premier roman qui plonge le lecteur à Téhéran dans les dernières années qui précédèrent la Révolution iranienne.
Conférence : les menaces pointent sur la démocratie : entre émergence de régimes illibéraux qui se cachent derrière des élections contrôlées ; le vaste déploiement hybride de cette guerre russe qui martèle sa propagande, augmentée par IA sur les réseaux sociaux ; les doutes internes sur notre propre Constitution et gouvernement ; voire certains sondages souhaitant « un régime fort » en France ; sans oublier la dégradation climatique qui pourrait fragmenter encore plus le vivre-ensemble… Ainsi plus que jamais, se pose la question de savoir si la démocratie est apte à se défendre. Au fond, n'est-elle pas trop faible ?  On va examiner ici trois zones de faiblesse : une cause constitutive, le flou de sa définition théorique et la nouveauté de la Transparence démocratique. Cette dernière notion, mal connue dans son système global, devrait nous montrer qu'il y a quelques raisons, armés par elle, de vouloir contredire cette faiblesse qui tente en ce moment tant d'adversaires…
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