La proximité ne s'acquiert pas ; l'être essentiel est celui qui marche et dont les jambes s'enfoncent dans le trésor .
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Parvenu à Son unicité – et la première seconde est dédiée à la pure unité – je m’étais dirigé à l’aide de l’entendement pendant dix ans. Une fois l’entendement émoussé, je fus changé en oiseau dont le corps était l’unité et les ailes la durée. Je continuais de voler dans les cieux du comment pendant dix ans. Je volais loin, parcourant huit cent mille mille fois la distance entre le Trône et la poussière. Je ne cessais de voler jusqu’à ce que j’eusse franchi les frontières de la durée. Puis je survolais la scène où l’on témoigne de la pure unité tantôt en initié absent à sa condition d’être créé, tantôt en être créé absent de son état d’initié.
(...)
Quand Il m’a fait surplomber le domaine de l’unicité, j’ai répudié mon moi et suis allé à Dieu.
Je l’ai appelé à mon secours :
- Mon Dieu, je T’invoque ! Il ne reste que Toi pour ma supplique.
Lorsqu’Il a su que mon invocation était sincère et désespérée, Il m’inspira d’oublier mon moi entier, et les créatures et les règnes. Je me suis alors débarrassé des soucis et suis resté sans tourment. Je n’ai plus cessé de traverser les royaumes l’un après l’autre. Je suis parvenu de nouveau à eux, je leur dis :
- Levez-vous ! que je passe
Ils se levèrent et je passai ; je me suis éloigné d’eux. Et Il me fit approcher encore en m’aménageant un sentier plus près de l’esprit que du corps.
Il dit :
- Abû Yazid, ils sont tous Ma création, sauf toi.
Je dis :
- Je suis Toi et tu es moi. (p. 125 & 130)
Abû Yazid dit :
- Les plus voilés à Dieu sont trois : l’ascète l’est en raison de son renoncement, l’orant en raison de ses prières, le savant en raison de sa science.
Il poursuivit :
- Pauvre ascète, il porte la vêture du renoncement et court dans le sillage de ses confrères. S’il savait l’insignifiance du monde et ce peu de chose auquel il renonce ! S’il savait quelle est sa place dans le monde parmi les ascètes ! L’ascète est celui qui, du premier coup d’œil, se laisse captiver par Lui et ne détourne son regard vers nul autre. Quant à l’orant, c’est celui qui, en sa prière, voit plus la grâce de Dieu que la prière, laquelle disparaît dans la grâce. Et le savant ! s’il savait que toute la science que fit apparaître Dieu se réduit à une ligne de la Table ! que dirait-il ? Que sait-il de cette science ? Et au prix de quels efforts ?
Et il dit :
- Le savant est celui dont la science est de Dieu ; il puise en Lui quand il veut, ce qu’il veut, sans mémoire ni livres. Ces trois-là seront dotés de quelque chose le jour du Jugement. (pp. 132-133)
Le soufi est celui qui prend le Livre de Dieu de sa main droite et la Tradition de Son Envoyé de sa main gauche.
Et qui regarde d'un œil le jardin et de l'autre le feu.
Et qui se drape de ce monde et se vêt de l'au-delà.
Et qui, en attendant, se met à la disposition du Seigneur :
« me voici, ô Dieu, me voici ! » (p. 90)
On rapporta à Abû Yazid que Sahl conférait de la gnose. Il dit :
- Sahl a cheminé sur le rivage de la gnose, mais il ne s’est pas plongé dans la mer houleuse.
- Abû Yazid, comment serait celui qui plongerait dans une telle mer ?
- Il disparaîtrait aux yeux des créatures et ne compterait plus parmi ceux qui peuplent la terre. (p. 56)
Ne charge pas ton cœur d'une idée Le concernant, tu risques de L'assimiler à ce qu'Il n'est pas. Méditant Son attribut, tu Le trouves ; imaginant Son essence, tu Le perds. (p. 100)