C’est par lui que tout a commencé. Nous sommes sorties de sa côte. Fabriquées d’un morceau d’os d’homme. Créées donc en second.
Le récit de la Création et de la Chute pèsera pendant des siècles sur la vision de la femme. De ce récit complexe on ne retient que les traits les plus saillants – d’autant qu’ils trouvent un écho favorable dans les épîtres de Paul : la femme n’est que le complément de l’homme et c’est elle qui, dans la Genèse, se laisse séduire par le serpent et entraîne son compagnon dans la désobéissance. C’est elle qui se fera maudire par Yahvé :
Je multiplierai les peines de tes grossesses, dans la peine tu enfanteras des fils. Ta convoitise te poussera vers ton mari et lui dominera sur toi.
L’infériorité de la femme est donc la punition de la désobéissance. Au moment d’être sauvée de l’Éden, c’est de l’homme qu’elle recevra son nom – autre signe de son incomplétude – et deviendra Ève – la mère de tous les vivants. Ève est, dans la Genèse, rendue responsable de la faute : c’est elle qui a pactisé avec le serpent. Le serpent est identifié au diable, Ève à la tentatrice. Toutes les femmes sont-elles des Ève en puissance ? Tertullien en 206 le résume bien, s’exclamant, en s’adressant à toutes les femmes :
Ne sais-tu pas que tu es Ève, la sentence de Dieu a encore aujourd’hui toute vigueur sur ce sexe, il faut bien que ta faute subsiste aussi. Tu es la porte du diable, tu as consenti à son arbre, tu as, la première, déserté la loi divine.
Tribunes de la presse - Rencontre avec Laure Adler