Tous les maîtres ont été trahis par leurs prétendus disciples ;
faute de pouvoir s'élever à la hauteur du maître,
ils l'ont fait descendre à leur niveau.
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Alexandra s'est composé avec délectation un visage de Tibétaine: elle accroche à ses cheveux de longues tresses fabriquées avec des crins des yak et teint sa chevelure avec de l'encre de Chine pour qu'elle soit d'un noir de jais. Elle s'enduit le visage d'un mélange de cendres et de cacao. Pour compléter son allure, elle accroche à ses oreilles de très grandes boucles d'oreilles.
Seule sur le pont, Alexandra s'éloigne du monde des humains
pour entrer dans un domaine où,
le temps et l'espace n'ont plus la même valeur.
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On a réclamé le droit de vote : c’est à dire le droit à l’obéissance . Le droit de déclarer soi même que l’on renonce à être maître de soi pour subir la volonté de quelques individualités aux décisions de qui l’on se soumet d’avance en les élisant.
Alexandra a gagné. Tout à sa joie, elle loue la sainteté de son mari, la grandeur d'âme de celui qui [...] a su dépasser les sentiments vulgaires où se meuvent les couples ordinaires : Consentir à ce que les êtres qui vous sont proches suivent leur propre route, au lieu d'exiger qu'ils se fassent vos satellites et gravitent autour de la vôtre, ne pas chercher à entraver leur marche, mais les aider à marcher sans trop d'encombres et de difficultés, ceci est une grande sainteté chez un croyant ordinaire, chez un incroyant, cela devient haute sagesse et suprême philosophie.
Partir! mais oui, partir! retrouver l'ivresse de l'inconnu, les levers du jour sur la mer. Un pont de bateau sous les pieds et le large devant soi, les nuits pleines d'étoiles et le tintement des cloches marquant, avec les quarts, la fuite des heures à travers l'éternité...
Au mur des peintures tibétaines et cette citation qui avait marqué son adolescence : "Le monde est une charogne et ceux qui s'y attachent sont des chiens" ! Il n'est pas signé d'un cynique grec, mais de Pierre Valdo, qui fonda au 16ème siècle le mouvement protestant des Vaudois.
Quand elle rentre pendant les vacances dans la maison de ses parents, elle retrouve sa mère taciturne, plongée dans son tricot près de la lampe à pétrole, son père dans la bibliothèque. Le silence est pesant entre ces deux adultes qui n’échangent aucun mot, aucun geste. L’adolescente se réfugie dans les livres, et particulièrement dans la lecture des romans de Jules Verne. « Leurs héros peuplaient de leurs exploits mes rêveries enfantines : Phileas Fogg, Passe-Partout, les enfants du capitaine Grant, le capitaine Hatteras et d’autres m’étaient devenus compagnons familiers. Ma résolution était prise… Comme eux, et mieux encore si possible, je voyagerais !
L'Inde! Le jasmin et la vanille, le coco et le citron mêlés à l'odeur rance des ordures, des fruits pourris, des rats crevés. L'Inde baignée d'une lumière embrumée. Les voiles vertes et rouges des saris flottent autour du corps des femmes. L'Inde rêvée depuis vint-et-un ans!
psaume 115-16 "les Cieux appartiennent à l'Eternel mais il a donné la terre aux enfants des hommes" .Et Alexandra ajouta en souriant: "Ah! Ce qu'Il a dû le regretter..."