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Voilà un livre fort original et étonnant, comme le laissait augurer son très beau titre, à la fois très terrien et aérien.

Terrien par son contexte qui nous plonge dans les racines de l'Angola moderne, celui de l'après indépendance de 1975, de l'après colonisation portugaise, des 25 ans de guerre civile entre les forces de l'Unita appuyé par les Etats-Unis / l'Afrique du Sud et le MPLA d'Agostino Neto, premier président d'un Etat congolais sombrant dans une dictature soutenue par Cuba et l'URSS. Pourtant, tout est léger dans la façon qu'a le roman d'avancer. Rien d'indigeste ou de somme pédante, juste des personnages qui se débattent pour survivre, aimer, s'exprimer sous un régime dictatorial sans transiger avec ses valeurs. L'auteur, José Eduardo Agualusa, est un dissident, persona non grata en Angola, vivant entre Portugal, Brésil et Mozambique, habitué à appuyer là où cela fait mal dans l'histoire de son pays.

Aérien par son angle d'approche à la lisière du fantastique. Contre la dictature, une république de quatre rêveurs. le journaliste Daniel qui rêve de gens pris en photographie par un autre que lui. Moira , l'artiste qui met en scène en photographie les rêves des autres. Hossi, l'ancien guérillero, l'intrus somnambule qui envahit les rêves de tous ceux qui dorment à sa proximité. Hélio, le neuro-scientifique qui invente une machine pour voir les rêves, traduisant l'activité cérébrale en images animées. Tous d'étranges chamans qui vont s'unir et passer à l'action lorsqu'une demi-douzaine de jeunes angolais libertaires ( dont la fille de Daniel et le neveu de Hossi ) décident de ne plus subir, affrontent leur peur de la dictature pour s'y opposer.

Comme si les rêves pouvaient nous aider à affronter le monde réel. Dans le mot «  révolutionnaire », n'y a-t-il pas « rêve » ? Très belle idée que de proposer un message universel de résistance collective, d'optimisme par le biais d'une guérilla onirique emplie de folie douce lorsqu'arrive, en final, la confrontation, avec le dictateur.

Lu dans le cadre d'une masse critique ! Merci Babelio et les Editions Métailié.
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Daniel Benchimol, angolais, est journaliste le jour et grand rêveur la nuit. Il rêve de gens qu'il ne connaît pas. Un jour, sur la plage d'un hôtel il trouve un appareil photo dont la carte mémoire contient des portraits des personnes dont il rêve, en particulier d'une femme aux longs cheveux. Incrédulité. Daniel discute avec Hossi Kaley, angolais, aujourd'hui gérant de l'hôtel précité et hier guérillero dans la rébellion de l'Unita, qui lui confie que lui ne rêve plus depuis longtemps mais que, depuis tout aussi longtemps, ce sont les autres qui le voient en rêve, affublé d'une veste violette. Stupeur. Daniel découvre ensuite que l'appareil photo appartient à Moïra Fernandes, mozambicaine, artiste qui rêve la nuit et reconstitue ses rêves le jour pour les mettre en scène et les photographier, et qui s'avère être la femme aux longs cheveux dont rêve Daniel. Battements de coeur. Daniel et Moïra se donnent rendez-vous au Cap, où vit cette dernière. Ils rencontrent par hasard Hélio de Castro, brésilien, neurobiologiste qui rêve d'arriver à filmer les rêves des autres. Il leur propose de participer à son projet de recherche. Méfiance ou enthousiasme, c'est selon.
Le rêve est donc le dénominateur commun qui relie ces quatre personnages et les rassemble dans une expérience au départ purement scientifique, qui va peu à peu muer en "instrument de transformation du monde". Parce qu'on est en Angola, pays totalitaire à deux doigts d'imploser, parce que la fille de Daniel est une jeune activiste des droits humains qui vient d'être emprisonnée avec quelques comparses pour avoir commis un "attentat" contre le Président. Parce que pour mettre la pression sur ce régime et obtenir la libération de sa fille et des autres jeunes qui se sont mis en grève de la faim, Daniel veut une méthode qui amènerait le peuple angolais à une révolte pacifique et unanime, et que pour cela il faut faire rêver les gens à l'unisson...
"La société des rêveurs involontaires" est une satire politique qui se donne des airs de polar, de roman fantastique et d'histoire d'amour. Mais la charge contre la dictature est virulente. A la brutalité du régime, Agualusa oppose et propose une révolution subtile et onirique : "rêver, c'est comme vivre, mais sans le grand mensonge qu'est la vie". Partir de l'idée d'un rêve collectif pour renverser une réalité faite de faux-semblants de démocratie et de justice, remplie de violence, de misère et de corruption, et se réapproprier la vie, les idéaux, la pensée, la liberté, cela semble naïf, grandiloquent. Peut-être, mais il n'y a que les rêves pour échapper au contrôle des dictatures… Une fable engagée, pétrie d'humour, de fantaisie et de folie douce, de résistance, d'espoir et de rêves de liberté.

En partenariat avec les Editions Métailié.
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« I have a dream ». Un homme seul se fait le porte-parole des opprimés face à l'injustice. On sait, hélas, que depuis Martin Luther King le sort des Noirs ne s'est guère amélioré: le rêve est du côté de l'utopie; il ne console guère que celui qui dort - et pour peu de temps.
Agualusa nous livre sa version 2.0 de la rêvolution, fille de Martin Luther King et de Christopher Nolan. Moins mégalomaniaque qu' « Inception », « La Société des rêveurs involontaires » prend acte de ce que nécessite une rêvolution réussie: du désir, une bonne dose d'irrationnel (Changer le monde, voyons!), et surtout un élan collectif.
Rêveurs de tous les pays, unissez-vous. Quand votre rêve sera devenu celui de l'humanité, quand chacun pourra arpenter le pays nocturne de l'autre, alors la peur disparaîtra, entraînant avec elle la chute du tyran.
Depuis l'écriture de ce livre, le dictateur Dos Santos a quitté l'Angola après 40 ans de règne. La réalité, dit Agualusa, est toujours plus grande que la fiction: « Mon travail est de couper un peu les ailes de la réalité pour la rendre crédible. »
Agualusa rêve juste.
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Ce que j'ai ressenti:


*J'ajoute à mes nuits, un peu de cette énergie artistique que j'ai saisi dans ces pages, pour peindre des aquarelles d'orchidées bleutées sur des lignes de rêves. J'enfile une veste violette et je vous emmène en Afrique découvrir l'étrange enquête de Daniel Benchimol… Et si des funambules s'invitent dans vos songes pastels, c'est sûrement que vous êtes vous aussi, touchés par cette histoire fantastique. Pour ma part, je l'ai été plus que de raison, et peut être que la folie me guette, mais avant, j'aimerai vous dire que j'ai adoré me perdre dans d'autres ailleurs…Je nage encore dans un océan aérien d'euphorie et je lance des voeux au ciel:
-Exercez-vous à rêver. Croyez à vos rêves. Et maintenant réveillez-vous, mon ami!



*J'ajoute à mon temps, un moment de lecture particulier, singulier, onirique où les métaphores s'incarnent et se répondent en miroir. L'envol d'un oiseau se reflète dans l'épanouissement d'une jeune femme combative, la naissance d'une fleur à l'instar d'une artiste qui se révèle par son talent, un arbre qui s'enracine contre des souvenirs qui s'étiolent, des observateurs de rêves qui font face à l'oeil avisé d'un journaliste engagé. Dans la forme et dans le style, José Eduardo Agualusa réalise une prouesse littéraire où rêves et réalités se réinventent dans une histoire plurielle ou l'amour, l'art et les songes dansent sur les cendres de la barbarie. Derrière l'insoutenable atmosphère d'un pays totalitaire, quelques esprits s'éveillent… Surprendre une jeunesse qui se révolte face à la dictature, dépeindre un pays au bord du gouffre et éclairer nos consciences, c'est le pari fou de la société des rêveurs involontaires.


« le pacifisme, mon frère, c'est comme les sirènes: hors de la mer de l'imagination il ne respire pas, il a du mal avec la réalité. Encore moins avec la nôtre, cette réalité si cruelle. »



*J'ajoute à mes carnets, des dizaines de citations poétiques et de réflexions méditatives. Des échos de mots et des éclats d'images pour nager dans l'infini de l'idée même de Liberté. Elle brillait de mille façons, Liberté dans ses pages: dans la lumière d'un clair de lune, sur les murs des galeries, dans le viseur d'un appareil photo, sur la surface d'un écran, dans l'obscurité d'une cellule, sur la mer imaginaire, dans la profondeur de l'inconscient, sur le crane d'une enfant, dans la grandeur des souhaits. La voir ainsi prendre multiples facettes, cela donne envie de déplier nos ailes et s'envoler vers elle…
« Je suis tombé par terre comme un pétale de fleur. »

*J'ajoute à mes coups de coeur, ce livre, La société des rêveurs involontaires, comme un des plus beaux livres que j'ai eu le plaisir de lire, parce qu'il contait à mon inconscient, une vérité intime. Et ce matin, c'est en toute conscience, que je vous dévoile la vague déferlante de mes émotions…Magnifique!


« Tous les rêves sont inquiétants, parce qu'ils sont intimes. Ils sont ce qu'on a de plus intime. L'intimité est inquiétante. »



Ma note Plaisir de Lecture 10/10.
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Daniel est en plein divorce. Journaliste angolais , il se réfugie au bord de la mer, où il retrouvre Hossi le propriétaire d'un hôtel où il a ses habitudes.
En se baignant, il tombe sur un appareil photo d'une artiste qui peint ses rêves. En parlant de rêves, Hossi a la particularité d'apparaître en veste violette dans les rêves d'autrui, dont ceux de Daniel.
Bon , je ne suis pas sur de vous avoir accrochés, mais c'est un roman un peu compliqué à introduire.
Toujours est il que cette immersion dans la vie des rêveurs involontaires est très agréable. le rêve est certes omniprésent, mais le roman est avant tout un cri de liberté contre le despotisme des dirigeants .
L'auteur montre très bien que l'arme favorite du pouvoir est la peur. le peuple ne bouge pas parce qu'il a peur.
Ici, cette peur est contournée par sept jeunes gens qui vont changer la face du pays, bouleverser l'opinion politique .
Ce roman est aussi un support à l'histoire post indépendance (1975) de l'Angola, aux guerres civiles qui ont suivi et le chaos engendré, au poids du colonialisme.
Luanda est réputée pour être la ville la plus chère du monde. On effleure ce monde là, dans les quartiers sécurisés des privilégiés, mais finalement , on côtoie peu le peuple angolais.
On est dans un beau roman fantastique où le rêve permet de nouer une intrigue solide sous fond d'histoire angolaise.
Une belle découverte, originale, comme beaucoup de romans africains.

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Déjà traduit 8 fois en français, l'angolais José Eduardo Agualusa est un auteur majeur du continent africain, apprécié comme il se doit dans les pays lusophones, et bien au-delà. La société des rêveurs involontaires est peut-être le meilleur de ses romans, celui en tous cas qui réussit à tenir majestueusement en équilibre entre onirisme réalisme, passant sans difficulté du rêve à la réalité. le splendide titre du livre évoque plusieurs personnages dont un particulièrement, qui a le "don" d'apparaître dans les songes nocturnes de ceux qu'il côtoient, dans une veste violette du plus bel effet. Il y a de très beaux passages, dignes du réalisme magique latino-américain, consacrés à cet ancien guérillero devenu modeste hôtelier. Mais les temps de la guerre et de l'indépendance puis le passé récent de l'Angola sont également très présents, illustrant le versant réaliste du roman. Et Agualusa ne se prive pas de s'attaquer avec virulence à la corruption qui sévit dans son pays et qui nourrit une dictature sans pitié avec ses opposants. En reliant les deux principales thématiques du livre, apparait en fin de compte l'idée que quoi qu'il fasse, un gouvernement autoritaire ne pourra jamais empêcher son peuple de rêver et de croire en des lendemains moins désenchantés.
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La société des rêveurs involontaires est un roman où j'ai perdu pied littéralement. Entre fiction et réalité, on suit 4 personnages liés les uns aux autres dont les rouages du passé referont surface sur le présent.
José Eduardo Agualusa nous présente un roman engagé et poétique racontant par bribes l'histoire de son pays : l'Angola.
Malgré la richesse d'informations et le travail de qualité par la maison d'édition Métaillé (et notamment de son traducteur), j'ai failli abandonner.
D'ailleurs, je n'étais pas assez préparée à cette lecture.
Je vous conseille donc d'être en forme et d'effectuer des recherches au préalable sur l'Angola car l'intrigue prend dès lors une autre dimension.
Si vous ne le faites pas ou vous le faites en fin de lecture, vous prenez le risque de passer à côté. Des informations subtiles se sont glissées et glanées au fil des pages. Bref, je m'en veux ! Une lecture laborieuse dont j'en suis en partie responsable. Je lirais volontiers un autre livre de José Eduardo Agualesa car il a mérité mon estime littéraire et a suscité en moi la curiosité sur un pays dont j'ignorais complètement l'histoire.
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Tout d'abord, merci à Babelio et aux éditions Métailié pour l'envoi de ce livre remporté dans le cadre de la Masse Critique Littératures.

Un titre accrocheur et évocateur. Une société de rêveurs involontaires. Des citoyens qui cherchent à améliorer leurs conditions de vie dans un pays en guerre et totalitaire. L'histoire se base sur quatre protagonistes qui utilisent et exploitent de différentes manières, le rêve, en tant que vecteur de rassemblement, de réappropriation, de changement et dont le but est de faire sortir le pays d'un marasme dictatorial. Tout au long de l'histoire, nous les suivons, dans différents pays où chacun s'affaire à être le changement de demain.

J'ai aimé les messages sous-entendus de l'auteur tout au long de son histoire. Les arrestations pour ce que l'on lit, ce que l'on a pensé ou acheté. L'emprisonnement de ce qui sort du rang et tend à éveiller les consciences. La faculté des haut-placés à retourner leurs vestes quand le pouvoir se met à trembler et à s'effriter. le contrôle des populations par la privation, mais également par la police censée les protéger. La répétition des mêmes erreurs que cela soit en Amérique du sud ou en Afrique.

Une fable sans vraiment l'être qui nous parle des dissidences, des régimes totalitaires dans des pays faussement démocratiques ou sans quelconque démocratie. Les questions de l'appropriation de ce qui nous a été enlevés pour une cause qui n'est pas la nôtre. Une histoire de vigilance qui nous invite à toujours rester prudent face aux fausses promesses et à la prise de pouvoir violente dont chaque pays du monde n'est à l'abri.

Une véritable guérilla urbaine contée avec une forme de poésie onirique. Un drame social où la survie collective du peuple passe par le soulèvement d'un rêve non inerte, mais plein d'espoir actif.
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Voici une lecture captivante !! Tant par l'histoire, que par sa conception... Y'a de ces pépites dans la littérature africaine, et je me réjouis de participer à un challenge Tour du Monde, qui m'en a, jusqu'à maintenant, fait découvrir beaucoup. D'abord, le titre est juste magnifique... Et puis, la couverture n'est pas piquée des vers non plus !! Et le contenu est à la hauteur de leurs promesses... Un livre onirique, atypique, dur et très léger à la fois... Un moment de lecture suspendu, hors du temps... Pour mon plus grand bonheur ! J'ai beaucoup aimé, et je vais me pencher un peu plus sur la bibliographie de l'auteur.
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Et si les rêves pouvaient libérer le monde...c est l Angola pour le coup, pays colonisé avant de subir la dictature...c est au travers de différents personnages très particuliers que l auteur nous parle de son pays, de ses plaies..le rêve est omniprésent dans ce livre vraiment maîtrisé et magnifiquement écrit..cet aspect onirique s imbrique complètement avec la réalité, les deux ne font plus qu un..
Si l on apprend bcp sur l Angola, c est également (et surtout) un livre poétique qui ouvre une nouvelle porte au réalisme magique..
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