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EAN : 9782710323907
172 pages
La Table ronde (17/01/2001)
3.9/5   10 notes
Résumé :
Trois personnages dérivent en train vers le sud, au bout de leur destin. Une femme qui va mourir et qui le sait, deux hommes qui l'aiment, chacun à sa manière. Un voyage de la dernière extrémité, depuis Boston jusqu'à Mexico, à travers l'Amérique et ses sierras, une tragédie mezza voce car les uns savent peu des autres, ils s'épient, convoquent leur passé. Ce chef-d'œuvre de psychologie impressionniste, le premier roman d'Aiken paru en français, est comme un long so... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
« Un coeur pour les dieux du Mexique » de Conrad Aiken (1994, La table Ronde, 172 p.), traduit par Michel Lebrun de « A Heart for the Gods of Mexico » (1939)

Conrad Aiken (1889-1973) est un auteur américain, né à Savannah en Géorgie. Une demi-douzaine de romans, des nouvelles et de nombreux poèmes, dont peu sont malheureusement traduits en français, mais dont les plus connus sont « Au Dessus de l'Abysse » traduit par Patrick Repusseau (1994, le Mercure de France, 456 p.) et « le Grand Cercle » traduit par Joëlle Naïm (2017, Editons La Barque, 320 p.).
Sa jeunesse se passe à Savannah, petite ville d'une quarantaine de milliers d'habitants où son père était chirurgien de bonne réputation. Mais à 11 ans, la famille se suicide suite à des déboires financiers, et c'est le fils qui découvre les corps de ses parents. Il en parle beaucoup dans « Ushant: an essay », sous-titré « Autobiographie narrative ». Il est alors élevé par une grand-tante dans le Massachussetts. Etudes dans des écoles privées et à l'école de Middlesex à Concord, MA. Il suit ensuite des cours à Harvard, ville qu'il décrit dans « le Grand Cercle » et écrit des poèmes, pour lesquels il reçoit le Prix Pulitzer en 1930.
Roman de voyage, mais qui se déroule en train de Boston jusqu'à Mexico. Trois personnages errent ou plutôt dérivent vers le sud. Il y a là une femme qui va mourir et qui le sait, et deux hommes qui l'aiment, chacun à sa manière. Un voyage de la dernière chance si l'on peut dire, à travers l'Amérique et ses sierras « ces kilomètres et ces kilomètres d'armoise et de mesquine, les amas disséminés de figuiers de barbarie longeant la voie de chemin de fer, le cactus-candélabre, les dents de scie des montagnes de fer et cuivre se découpant sur un ciel brûlant et sans nuage ». L'intérêt du roman réside dans son lien avec celui de Malcolm Lowry « Au Dessous du Volcan ». C'est aussi un Bref un voyage (initiatique ? je ne crois pas) ou plutôt la recherche (désespérée ?) d'un amour (??), non pas impossible, mais irréaliste (Yvonne et le consul ?). et surtout une superbe description du paysage. « Les champs opulents se déployant en éventail, en nervures et en volutes vertes, un troupeau de vaches, un chien, des meules de foin près d'un bouquet d'arbres, une ferme en silhouette se découpant sur l'Est ensoleillé ».
Blomberg rencontre son ami Key dans l'espoir de lui emprunter cent dollars. Cette somme doit servir à un voyage au Mexique que Blomberg organise pour lui-même et deux autres amis : Noni et Gil. Noni vient d'apprendre qu'elle n'a plus que quelques mois à vivre. Il veut organiser un divorce rapide avec son mari absent depuis longtemps afin qu'elle puisse épouser Gil, un homme qu'elle affectionne depuis quelques temps. Blom est lui aussi un peu amoureux de Noni. Enfin il l'aime, comme il aime tout autant les paysages de la sierra qu'ils traversent. « Aimes tu les couchers et levers de soleil ? Ou ta propre main droite ? ». Il veut l'aider à organiser ce voyage et à garder son secret. Une fois le prêt accordé, c'est le voyage en train. Environ un tiers du livre. C'est donc un huis clos, long et douloureux. Un voyage, cinq chapitres, pendant lesquels ils vont être face à face avec la vie et avec la mort en toile de fond.
Tout débute donc en train de New York à Boston où il rentre. Il est très anxieux à la pensée que sa femme a une liaison avec un autre homme et qu'il pourrait le découvrir. Cela ne traine pas, et à son retour chez lui, il découvre que ce qu'il craignait. L'homme et sa femme ont une scène. Retour en flash-back sur son enfance d'adolescent dans une station balnéaire, où il découvre l'infidélité de ses parents. Il en garde le secret. le quatrième chapitre est véritablement une bizarrerie de la littérature psychanalytique. Il arrive à l'appartement de son analyste ivre, à 1 heure du matin. L'alcool aidant, son analyse commence, avec une logorrhée verbale longue et créative. Tout cela en face d'un analyste qui souffre depuis longtemps de sentiments douloureux et de problèmes d'alcoolisme, lui aussi. le tout est très soft alors que les deux personnages boivent et reboivent. L'analyste finit par s'endormir. Dans le chapitre suivant, il rencontre son ex-épouse, ils ont une conversation ambiguë et il part passer quelques jours seul à la station balnéaire où se sont produits les événements tragiques de son enfance.
Freud était un admirateur des romans de Conrad Aiken. Il a notamment décrit ce livre comme l'un de ses romans préférés. Réciproquement, Aiken s'est intéressé à Freud et ils ont correspondu. Résultat, Aiken est parti pour l'Angleterre en bateau dans l'espoir de se faire analyser par Freud On se souvient du traumatisme vécu par le gamin, à 11 ans, à Savannah, quand sa famille se suicide suite à des déboires financiers. C'est le fils qui découvre les corps de ses parents. Il en parle beaucoup dans « Ushant: an essay » (1972, Oxford University Press, 376 p.), sous-titré « Autobiographie narrative ». Il est alors élevé par une grand-tante dans le Massachussetts. Par chance, Eric Fromm était sur le même navire et lors de la traversée, Fromm a persuadé Aiken que c'était une mauvaise idée. Donc, Aiken et Freud ne se sont jamais rencontrés, bien qu'Aitken ait vécu quelques années en Angleterre.
C'est finalement un chef-d'oeuvre de psychologie impressionniste, le premier roman d'Aiken paru en français, est comme un long soupir intimiste de trois êtres pathétiques
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Un livre dur, difficile et éprouvant, un voyage désespéré à travers le Mexique avec la mort qui rôde, des secrets, une très belle écriture qui tente de mêler les paysages fantastiques et les pensées mortifères, une femme solaire, une fin digne des dieux aztèques, voici ce que vous trouverez dans ce livre. le lien avec Au-dessous du volcan, de Malcolm Lowry, est puissant, puisque ce dernier y figure en tant que personnage sous le nom de "Hambo". D'après ce que j'ai lu, Lowry a la réputation d'avoir été le disciple d'Aiken. Je retiens de ce livre une grande souffrance latente, qui m'a par bien des égards, fait penser à la Cloche de détresse, de Sylvia Plath.
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Trois hommes se rendent de Boston à Mexico, deux hommes qui aiment la même femme qui va mourir et le sait. Un parcours à travers l'immensité américaine, un parcours existentiel, symbole du dernier voyage, repli sur soi et abandon à l'ultime mystère. Un ton doux-amer, d'une extrême pudeur. Une impression de brisure irréparable.
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Le hululement du sifflet ponctuait son sommeil ; puis l'éclatante boule du soleil surgit au-dessus de la terre fertile, l'éblouissant par l'interstice du rideau moucheté d'escarbilles ; les champs opulents se déployant en éventail, en nervures et en volutes vertes, un troupeau de vaches, un chien, des meules de foin près d'un bouquet d'arbres, une ferme en silhouette se découpant sur l'Est ensoleillé. Des faisceaux de clarté orange se glissant sous le rideau baissé, son et lumière si confusément mêlés, au point d'être interchangeables : les rails vibrant dans ses os et ses yeux comme la lumière, les rayons du soleil assaillant ses tympans dans une cacophonie incessante. Et puis, les voyageurs lève-tôt, les nouveaux arrivants, les envahisseurs...
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- Avez-vous remarqué que nous venons d'entrer directement dans l'été? Cette année, nous n'aurons pas de printemps. Nous l'avons sauté pendant la nuit...
Blom regarda, amusé.
- C'est ma foi vrai, Noni. Quel sens de l'observation! Et quelle idée fascinante. Nous avons plongé à travers le printemps, comme si le train était un nageur et le printemps une vague de fleurs et de feuilles, une déferlante de bourgeons au sein du continent entier...
- En effet, le maïs est presque mûr. Alors qu'à Boston et dans les Berkshire, les feuilles sortaient à peine...
- Privés de printemps cette année!
- C'est un peu triste...
En silence, ils observèrent la terre changeante, la terre qui maintenant se divisait très vite en longs ravins parallèles, comme sous l'effet d'anciennes inondations. Maisons, cahutes, petites propriétés de Noirs. Et ensuite, ce qui était manifestement une digue - et les cabanes délabrées des squatters, sur le rivage - barques dans les jardins, arrimées aux vérandas en ruines, canots voguant sur l'herbe luxuriante - et soudain, indiscutable, le fleuve!
- Ah! lança Noni. Le Mississippi, père éternel des eaux! Maintenant, nous pouvons rentrer chez nous!
- Rentrer? fit Gil.
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Ces paysages sont des états d'âme, comme les sensations, comme les appréhensions. La petite ville d'Encadata, abandonnée de tous, sauf de cette silhouette noire encapuchonnée et énigmatique, en plus de ce crépuscule matinal d'un désert au milieu des montagnes... Tout cela, c'était bien davantage une partie de lui-même, qu'un banal lieu géographique... Il l'avait toujours su, comme en ce moment il sentait qu'il avait déjà vu ces kilomètres et ces kilomètres d'armoise et de mesquine, les amas disséminés de figuiers de barbarie longeant la voie de chemin de fer, le cactus-candélabre, les dents de scie des montagnes de fer et cuivre se découpant sur un ciel brûlant et sans nuage.
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Le Mexique, ce pays fabuleux, ce pays de fantômes sauvages et d'autels ensanglantés, commença à tourbillonner et à s'évaporer comme de la fumée, repoussé une fois encore loin d'eux, perdu comme un nuage rouge.
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Elle vivait - et cette pensée le fit resserrer gentiment sa pression sur la main qui était dans la sienne - elle vivait - comme si peu de gens osent le faire ! - sa mort. Elle était en train de vivre sa propre mort...
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Video de Conrad Aiken (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Conrad Aiken
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