L'homme est étendu sur le dos, la balle de gros calibre a pénétré par le côté arrière du cou, et a emporté la moitié inférieure du visage, un Arabe qui a été fumé près de l'ancienne voie ferrée. Il s'appelait El Hassan, surnommé "La vache", c'était un menteur, une grande gueule, un mécréant qui aimait un peu trop les femmes, il buvait pas mal et avait toujours de belles sommes d'argent sur lui. Était-il un prospère trafiquant de drogue ?
El Hassan a participé à un documentaire consacré à l'immigration clandestine, vingt-huit secondes pour dénoncer ce qui se passe avec les ouvriers clandestins, un sous-prolétariat agricole, une population invisible et muette. Est-il mort d'avoir trop parlé ?
À travers l'enquête sur ce meurtre, l'auteur dénonce ce quart- monde, à deux cents mètres de la route qui mène les touristes vers les plages du sud de l'île, ces invisibles qui acceptent les plus basses besognes pour un billet de vingt euros. Une enquête minutieuse qui nous raconte l'arrivée des pieds-noirs en Corse qui accaparent les terres, apportant un nouvel essor, une agriculture mécanisée et intensive, profitants de facilités et d'aides auxquelles les Corses n'ont jamais eu droit. Les paysans corses sont étranglés, la mèche est allumée, le nationalisme corse vient de naître. Les arrangements avec la loi, les combines, les menaces la brutalité, le vin importé du continent que l'on met dans des bouteilles tête-de-Maure et que l'on vend par milliers de bouteilles dans les supermarchés norvégiens.
Ces nouveaux colons venus dans leurs bagages avec des milliers de travailleurs marocains, une filière clandestine liant passeurs marocains et agriculteurs corses, ces travailleurs accusés de voler le pain, d'occuper des emplois qu'aucun corse ne veut, injures et vexations, la violence qui gagne du terrain, les rackets, des vagues d'attentats , on les rend responsables du trafic de drogue, la montée du racisme d'une partie de la société corse.
Le travail remarquable d'Antoine Albertini à partir de faits exacts permet de mettre en pleine lumière ces invisibles, esclaves des temps modernes.
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