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Citations sur Les autres fleurs font ce qu'elles peuvent (10)

Son enfance n’était plus. A dix ans fraîchement célébrés, elle venait de se faire brutalement débarquer d’un monde qui promettait il y a peu de temps encore son lot d’insouciants instants pour basculer avec fracas dans celui de l’âge adulte, sans tambours ni trompettes, mais avec la violence d’un coup de fouet qui vous lacère les chairs. Quand elle reprit un semblant de conscience, Violette n’était plus une petite fille face à ce grand frère exsangue, son idole aux yeux baignés de larmes. Elle naviguait désormais dans un monde étranger, elle n’avait plus d’âge, plus de repères ni de colonne vertébrale, plus rien qui lui permette de tenir debout. p. 82
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> Elle n'imaginait pas qu'un des adultes partageant sa vie puisse un jour avoir l'idée de lire ce que la jeune fille consignait dans son journal intime.
> un papa, ce n'est pas un cow-boy ou un brigand. Un papa, ça ne meurt pas.
> Elle naviguait désormais désormais dans un monde étranger, elle n'avait plus d'âge, plus de repères ni de colonne vertébrale, plus rien qui lui permette de tenir debout.
> La vie tient à peu de choses parfois. Une station de radio plutôt qu'une autre et c'est le destin d'une génération entière qui fait une embardée.
> A quoi sert de conserver ces vieilleries puisque vivre dans le passé n'a aucun sens ?
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Chacun en rajoutait pour le plaisir de l'autre. Entre eux, l'humour était devenu un bon moyen de se vautrer dans l'amour sans avoir l'air d'y toucher.
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Et si, chez les Delabbé, on avait écouté "Lorsque l'enfant paraît" ? Et si, entre le fromage et le dessert, Françoise Dolto avait évoqué la perte d'un parent, si elle avait conseillé à ses auditeurs de convier les enfants aux obsèques de leur géniteur disparu, au lieu de les protéger en les écartant de ces funestes célébrations ?
Et si quelqu'un avait tourné la molette de l'Optalix ?
La vie tient à peu de choses parfois. Une station de radio plutôt qu'une autre et c'est le destin d'une génération entière qui fait une embardée. (p.112)
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Comment pouvions-nous imaginer être un jour plus âgés que toi ? Tu vois un peu le bordel ? […] Nous sommes vieux. Plus que tu ne le seras jamais, papa.
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Je l’ai tant attendu, cet instant. Enfin, je commence à m’approprier une histoire qui m’a échappé à cause d’une de ces innombrables erreurs qui jalonnent nos vies graciles. On a tort parfois de vouloir protéger les enfants.
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Elle n’avait pas posé un pied dans ce foutu service où Paul avait vécu ses dernières heures, pourtant elle se projetait sans cesse dans ce lieu qu’elle fabriquait de toutes pièces. Elle forçait son imagination pour entrer dans la chambre, comprendre, peut-être, ce qui s’y était passé, pour le voir une dernière fois.
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Et de toute façon, Paul n’allait pas mourir : un papa, ce n’est pas un cow-boy ou un brigand. Un papa, ça ne meurt pas.
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Quand elle entra dans la cour de l’école, aux alentours de huit heures vingt, les collègues de Paul étaient au courant de son absence. Jeanne avait téléphoné. Il ne manquait jamais à l’appel, alors de bonne grâce, ils se partageraient ses élèves jusqu’à son retour. Ils pouvaient bien faire ça pour lui, l’instituteur toujours fidèle au poste, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il neige. Voyant Violette s’approcher, ils fondirent sur elle pour prendre des nouvelles de l’absent.
— Ça va. Il a vomi cette nuit. Il a mal à la tête mais ça va, leur répondit Violette avec le plus grand sérieux.
Pour la première fois peut-être, Violette ressentit la puissance dont jouit celui qui sait.
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INCIPIT
7 mars 2009
C’est pas Dieu possible d’être aussi conne. J’ai beau frapper la touche Eject de mon index, l’appareil ne veut rien savoir. Je pourrais m’y briser le doigt que cela n’y changerait rien. La cassette est là, sous mes yeux, coincée derrière le clapet en plastique transparent. La fonction lecture ne veut rien entendre non plus. La bande magnétique demeure immobile, agrippée aux bobines crantées comme si elle m’en voulait d’avoir mis près de trente ans à venir la récupérer.
Sur l’étiquette verte derrière la paroi translucide, quelques mots écrits à la main il y a vingt-sept ans.
La scène serait à pleurer si elle n’était pas aussi ridicule. Me voilà à deux heures du matin seule dans ma cuisine, unique point lumineux d’un immeuble parisien endormi. J’allume une cigarette et la fume comme la précédente, sans y prêter la moindre attention. La suivante subira le même sort. Je m’acharne. Je peste. Je jure comme un charretier. À vrai dire, je tente de ne pas fondre en larmes. Il y a encore quelques minutes, je tenais dans ma main cette cassette, vestige des années quatre-vingts. Désormais, elle est enfermée dans feu ce miracle de technologie, un ghetto-blaster Philips reçu pour mon dixième anniversaire.
À presque quarante ans, je pensais m’être suffisamment échauffée pour clore ce soir un lourd chapitre. Visiblement, la technique néerlandaise en a décidé autrement.

17 octobre 1982
Violette se réveilla en sursaut au cœur de la nuit. Elle alluma sa lampe de chevet. Les gestes encore endormis, l’enfant ouvrit la porte de sa chambre et traversa le palier qui menait à la salle de bain. Elle était désormais la seule à occuper ce niveau de l’appartement, ses deux aînés ayant quitté le nid quelques semaines plus tôt pour suivre des études supérieures dans la grande ville voisine. En passant devant l’escalier qui reliait le deuxième étage au premier, son regard plongea sur la porte des toilettes en contrebas. Miracle des insomnies collectives, au même instant, Paul surgit de sa chambre et se rua dans la petite pièce. Il portait son pyjama bleu marine en coton. Violette le connaissait bien, ce pyjama, son père le portait souvent.
Paul s’agenouilla. Puis il vomit. Immobile depuis son poste d’observation, Violette le contempla en train d’éructer, la tête penchée au-dessus de la cuvette. La curiosité la poussa à attendre qu’il sorte. Elle désirait lui offrir un sourire de connivence, de ceux que deux humains hagards échangent quand ils se croisent en pleine nuit, puis elle irait à son tour se soulager avant de retrouver son lit.
Paul se redressa lentement. Il tira la chasse d’eau et dut sentir une présence au-dessus de lui. Il leva la tête et regarda sa fille debout en haut de l’escalier en bois, ses longs cheveux châtains en bataille. Violette était vêtue de sa chemise de nuit préférée, celle avec les manches ballon volantées et un trio de petites souris dansant sur le buste. Paul ne dit rien, ne sourit pas plus et retourna d’un pas lourd s’allonger auprès de Jeanne, son épouse.
Violette remballa sa connivence et réfléchit à leur dernier repas. Qu’avait bien pu manger son père qu’il n’ait pas supporté ? Ce lundi soir, on n’avait pas dîné spécialement gras. La famille avait pris l’apéritif chez la sœur de Paul, et pour une fois, le sacro-saint apéro ne s’était pas éternisé. Violette se remémora la soirée. Paul avait réclamé un petit bisou à sa fille assise sur ses genoux, avant de se faire rabrouer sans ménagement. À dix ans, on ne fait plus de câlins à son père sauf quand on a une requête en tête. Violette s’en voulut un peu de l’avoir envoyé dans les cordes quelques heures plus tôt. Le lendemain, elle l’embrasserait plus fort que d’habitude.
Après s’être acquittée de son besoin nocturne, l’enfant retrouva son lit. Dans la pénombre de sa chambre, elle garda les yeux ouverts, guettant le moindre bruit afin de s’assurer que personne ne s’était levé à nouveau. Le silence s’imposant, elle se rendormit. 
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