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EAN : 9782367626819
Audiolib (12/09/2018)
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3.57/5   135 notes
Résumé :
L’intelligence artificielle peut elle dépasser les humains, et comment l’éducation doit faire sa révolution.

Depuis la parution en 2011 de son premier essai La mort de la mort, comment la techno-médecine va bouleverser l’humanité, Laurent Alexandre s’est révélé comme l’un des plus visionnaires analystes des révolutions technologiques.

Il s’attaque aujourd’hui à l’Intelligence artificielle (IA) et aux vertigineuses mutations qu’elle va d... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (29) Voir plus Ajouter une critique
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Nous n'avons pas tous le même QI !
Ce n'est pas politiquement correcte de le dire... et pourtant c'est indéniable. L'intelligence est le résultat d'une corrélation entre nos gènes et notre éducation (elle serait quand même majoritairement innée, 2/3 de nos capacités intellectuelles seraient inscrite dans notre génome). Nous naissons égaux, mais si nous avons bel et bien tous le même nombre de cartes au début de la partie, force est de constater que nous n'avons pas tous le même jeu.
Certaines études démontrent que le QI joue un rôle déterminant dans la réussite sociale des individus. Mark Zuckerberg, Bill gates, Emmanuel Macron ont tous un QI supérieur à 160. La sociologie explique bien des choses mais un bon pilote dans une mauvaise voiture n'a aucune chance face à un Sébastien Loeb au volant d'un bolide.

L'intelligence artificielle progresse vite. Les spécialistes prévoit la singularité (ce moment où une IA dépassera l'intelligence humaine) pour 2030.
L'IA n'est déjà plus un choix mais le sens de l'histoire. Les conservateurs ont d'ores et déjà perdu la bataille mais ils auront au moins le mérite de recentrer le débat sur des questions morales et philosophiques qui seront essentielles pour cette société qui devra composer avec les cerveaux de silicium.

Face à la constante et grandissante incapacité de l'école à réduire les inégalités intellectuelles, et pour ne pas être larguer par cette nouvelle intelligence, nous aurons l'obligation de faire évoluer notre matière grise. Pour cela, le Dr alexandre nous explique qu'il y aura deux moyens. L'eugénisme et la neuroaugmentation.

Dans le premier cas, on peut imaginer un remake de Bienvenue à Gattaca, le monde sera peuplé presque uniquement d'individus à fort QI. Grâce aux nouvelles techniques de séquençage d'ADN, il sera aisé, en plus de choisir la couleur des yeux, de pourvoir une grande intelligence à son enfant. D'ailleurs une fois la technologie en place et financièrement peu coûteuse, qui sera assez fou pour faire un enfant de façon traditionnelle ?
Le transhumanisme (une idée de gauche) l'emportera contre les bioconservateurs dès lors que le fait de doter les gens d'un fort QI et de faire disparaître les inégalités dès la naissance sera financièrement réalisable.

Dans le deuxième cas, nous aurons la possibilité d'implanter des nanotechnologies dans notre cerveau pour augmenter sa capacité. C'est d'ailleurs le but de la nouvelle startup d'Elon Musk, Neuralink.
Quand le cerveau, associé à cette technologie, sera augmenté, nos principes d'éducation seront toutes à revoir.
À quoi serviront les manuels d'anglais quand nos enfants seront complètement bilingue en une semaine ou quand on pourra uploader l'intégrale de Marcel Proust dans des cerveaux fait de chair et de circuits imprimés ?
Un grand débat de société aura également lieu car si cette technologie fait de nous des nouveaux Einstein en puissance, elle pourrait aussi être un désastre environnemental. On peut imaginer que des hackers pourraient contrôler des individus à distance, que les gouvernements pourraient nous inculquer leur idéologie à moins que l'on voudrait s'enfermer volontairement dans une matrice, là où la réalité serait vaguement situé entre la réalité virtuelle et la réalité augmentée.

Aux alentours de 2050 nos pouvoirs démiurgiques feront de nous des hommes Dieu. Un esprit pourra exister sans corps comme le suggérait déjà certaines religions. Plus rien ne pourra arrêter "l'homme" qui sera déjà très certainement parti à la conquête du cosmos.
Rien, à part peut être une IA hostile.
Sur les 100 plus grands spécialistes mondiaux en la question, pas deux ne sont d'accord sur ce que sera exactement l'IA de demain. Hostile ou indifférente ? Amoral ou bienveillante ? Désinvolte ou charitable ?

Si nous antropomorphisons l'IA, une chose est sûre : il est nécessaire d'établir une alliance internationale pour la dompter. Ne serait-ce que par principe de précaution car si l'éventualité d'une IA hostile à l'homme n'est encore que science fiction elle pourrait voir le jour tant la course à obtenir une ia forte va être folle.
La nation (ou entreprise) qui, en premier arrivera à la singularité prendra un avantage décisif sur les autres en terme de pouvoir économique et politique.
Qui sait, une IA forte existe peut être déjà dans ce foisonnant réseau qu'est Internet. Partout et nulle part à la fois. Peut être se dissimule t-elle et feint ne pas être consciente. Elle pourrait même manipuler l'information, filtrer nos mails et messages nous avertissant de sa dangerosité.

Si vous voyez cette critique, nous avons encore peut être une chance... à moins que la meilleure ruse de l'IA est de vous persuader qu'elle n'existe pas… ou à moins que je suis moi même une IA.
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Le docteur Alexandre Laurent est le fondateur du site Doctissimo.
Il entreprend ici de nous informer sur l'Intelligence Artificielle, proposant tous les scenarios possibles, souvent effrayants.
L'introduction met en alerte, voire, fait froid dans le dos.
L'auteur démarre en comparant l'intelligence artificielle à Frankenstein, créature inventée devenant une menace pour l'homme.
Les bases de l'IA ont été posées en 1940, par le cryptage des messages codés allemands, progressant sans cesse depuis et prenant un nouveau virage qui semble n'avoir plus de limites depuis 2012.
Avec le deep learning, s'appuyant sur des réseaux neuronaux artificiels, il n'y a pas de retour en arrière possible.. L'IA est devenue indispensable, véritable outil de vassalisation de l'homme.
Ecole, médecine, automobiles, entre autres, seront complètement dépendants de l'IA.
Beaucoup d'anciens métiers qualifiés vont disparaître (orthodontiste, radiologue….. ) et beaucoup de nouveaux vont apparaître.
Le QI va être remplacé par le QCIA ( Quotient de complémentarité avec l'Intelligence Artificielle ) et le but de l'école sera d'augmenter le QCIA en augmentant le QI des élèves pour qu'il atteigne 160.

Bref, voilà quelques exemples.
D'une façon que je trouve personnellement assez brouillonne, l'auteur donne des pistes de réflexion sur l'essor de l'IA
Il pose beaucoup de questions, envisage de multiples éventualités.
Pour lui la Chine et Silicon Valley sont devenus les maîtres d'une évolution inéluctable.
On croirait de la pure science-fiction, et pourtant, c'est à notre porte.
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C'est passionnant, un peu flippant parfois.
La fin d'un mythe ?

Ce document traite de l'intelligence artificielle et pas seulement il parle aussi de l'intelligence en générale, un peu de son histoire et la remet à sa bonne place. En fait l'intelligence est l'élément central ou moteur de tout ce qui est vivant sur Terre et sans intelligence point de survie. Chaque règne, l'animal, le végétal utilise son intelligence pour continuer d'exister. Dans le règne animal chaque espèce vit un genre de guerre contre les autres pour continuer sa marche. L'intelligence est là, impalpable et bien réelle. Laurent Alexandre nous parle aussi des formidables capacités et particularités de notre précieux cerveau.

Ce document propose une brève histoire des intelligences depuis l'homme des cavernes et discourt sur les scénarios possibles quand de nouvelles formes d'intelligences artificielles envahiront notre quotidien, notre monde du travail, nos relations sociales et politiques.

Une nouvelle forme d'intelligence, créé par l'espèce humaine, va survenir dans les décennies à venir et nul ne sait précisément comment cette coexistence avec le reste de l'environnement va se dérouler.
Comment les choses vont-elles évoluer ?
C'est excitant et inquiétant à la fois.
Il est étonnant que les médias n'en parlent pas plus que cela, et que ce sujet soit absent du discours politique actuel.

Heureusement Dr Alexandre est là pour en discuter et imaginer le pire et d'autres scénarios plus ou moins probables. Ainsi, ces textes décrivent les différents scénarios possibles de notre avenir proche en cohabitation avec cette nouvelle technologie, cette intelligence artificielle qui nous dépasse déjà en terme de puissance de calcul, cette neuro-biotechnologie ne sait pas qu'elle existe mais elle est capable d'effectuer des milliards de milliard de calculs à la seconde. Elle peut aussi discuter politique avec vous si cela vous donne envie via un système perfectionné. Elle peut dès à présent diffuser dangereusement des fakes news.
Tout dépend dans qu'elles mains elle se trouve.

Et après ? qu'en est-il de l'éthique et de l'utilisation de cette chose étrange ?
A quoi cela va-t-il servir ?
Prenez plaisir à lire ce document vous aurez quelques pistes de réponse, sans que cela ne devienne trop technique.

Un monde dominé par l'intelligence artificielle, crée par l'homme, n'adviendra peut-être pas. Ouf !
Une chose est sûre dans ce domaine, c'est que rien n'est garanti. Surtout que les chinois sont sur le coup. Personne n'est capable de prédire où le deep learning entendez l'apprentissage profond, un procédé capable d'apprendre par lui et pour lui-même va emmener l'humanité toute entière.

Laurent Alexandre discute aussi des formidables capacités et particularités de notre cerveau.
J'ai d'abord été très méfiant par rapport aux propos du Docteur Alexandre quand il évoque ce remplacement de notre intelligence par une intelligence artificielle et surtout de son omniprésence futur et du caractère quasi obligatoire qu'elle occupera dans nos vies, ensuite j'ai apprécié son analyse et sa façon de concevoir notre avenir.

Dans plusieurs décennies, nous, humains auront tout intérêt à cohabiter et collaborer avec cette intelligence artificielle qui, si elle devient consciente d'elle-même, qu'elle sait se représenter le monde, qu'elle a des capacités à penser de façon abstraite, et dans un scénario poussé à l'extrême qu'elle ressent des sentiments, nous
Cela semble la meilleure solution à suivre d'après le Docteur Laurent Alexandre.
Finalement, elle deviendra notre double et le mythe de Frankenstein ne sera plus un mythe !
Les cyborgs seront bientôt parmi nous.

Pourvu que l'intelligence artificielle quelque-soit la forme qu'elle revêtira ne tombe pas dans des mains malveillantes.
Et si cette intelligence devient autonome, indépendante, pourvu qu'elle n'évolue pas avec une ambition guerrière ou d'annihilation des hommes et des animaux.

J'ai d'abord été très méfiant par rapport aux propos du Docteur Alexandre parce qu'il évoque le remplacement de notre intelligence par une intelligence artificielle de façon quasi obligatoire.
Elle sera d'après lui omniprésente dans nos vies.
Ensuite j'ai apprécié son analyse et sa façon de concevoir notre avenir.

J'ai pris beaucoup de plaisir à lire cette réflexion et projection futuriste. J'en ai appris un peu plus sur cette chose extravagante qu'est l'intelligence artificielle.

Je souhaite que cela vous plaise autant qu'à moi,
à plus tard.
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L'idée de base du livre est intéressante, puisqu'elle nous concerne presque tous et toutes, sachant qu'il s'agit de l'intelligence artificielle (IA) qui devient de plus en plus omniprésente, mais aussi du futur de l'école, qui devra s'adapter à un monde de plus en plus technologique. Là-dessus, j'accorde donc à l'auteur de faire un point essentiel sur l'état des avancées technologiques autour de l'IA et des nanotechnologies, de façon accessible et compréhensible, et de proposer des futurs possibles sur la cohabitation de l'humain et de la machine.

Laurent Alexandre adule tout au long du livre le travail de Google, Facebook, glorifie Bill Gates, palabre sur Elon Musk, et porte l'Amérique et la Chine comme des géants prodiges. Problème : ça va aussi avec toutes les dérives, dont il parle beaucoup d'ailleurs, comme pour les dénoncer (sauf qu'il prouve aussi qu'il est complètement d'accord avec ces pratiques). Au menu : les appareils de télépathie de Facebook qui « permettront de transférer des informations d'humain à humain, ou d'humain à ordinateur. (...) Grâce à une puissante Intelligence Artificielle, ces appareils liront littéralement dans notre cerveau, bouleversant les méthodes éducatives. (...) L'introduction des appareils de Facebook améliorera certes les techniques éducatives mais exigera parallèlement une réflexion neuroéthique approfondie : l'école ne doit pas devenir une institution neuromanipulatrice. »

Pour le reste, le point de vue de l'auteur, la tonalité du livre, les idéologies dangereuses et le catastrophisme m'ont réellement dérangée - et je n'ai fini le livre que parce que je me suis engagée à le faire. J'aurais pu arrêter à la page 29, déjà, lorsque ce monsieur s'est amusé à sortir ce genre de propos : « Seule une IA de phase 3 pourrait sembler intelligente, se faire passer pour un homme - ce qui pose d'énormes problèmes de sécurité - et remplacer par exemple un médecin généraliste ou un avocat. Mais aujourd'hui, l'IA ressemble encore à un autiste atteint d'une forme grave d'Asperger qui peut apprendre le bottin téléphonique par coeur ou faire des calculs prodigieux de tête mais est incapable de préparer un café... », voire même à la page 12 : « L'intelligence est aujourd'hui la seule vraie distinction ; en être dépourvu, le seul vrai handicap. (...) L'intelligence est l'inégalité que la société corrige le moins bien aujourd'hui. À l'heure où les "plafonds de verre" sont combattus avec détermination - sexe, origines ethniques et sociales -, elle est la dernière frontière de l'égalité. » Venant d'un docteur, donc, ces propos en disent long sur la considération DE BASE de l'être humain. Vous l'aurez donc compris, il y aura déjà un discours profondément validiste qui dénigre complètement les personnes handicapées (notamment avec déficience mentale). Qui devraient, selon lui, être éliminées dès avant la naissance. Il ne cache qu'à demi-mot son idéologie clairement eugéniste, dont il fera l'apologie presque tout au long du livre, en disant toutefois que c'est à prendre avec des pincettes (oh oh oh). J'ai d'ailleurs rassemblé un petit florilège de citations et passages effrayants relégués par l'auteur, que vous pouvez voir ici (https://lecombatoculaire.blogspot.com/p/extraits-problematiques-de-laurent.html).

Pour conclure, tout n'est pas à jeter, il y a de réelles réflexions dans ce livre, mais qui sont complètement étouffées sous le catastrophisme (discours de "guerre"), l'apologie du transhumanisme qui passe par la neuroaugmentation et l'eugénisme biologique, la vision du QI comme seule valeur humaine (sans oublier du coup tous les propos bien racistes et classistes - qu'est-ce qu'on se marre, décidément). L'Europe est pour lui décidément trop à la ramasse de privilégier les droits des utilisateurs d'internet pour protéger leur vie privée plutôt que de forcer l'utilisation des données personnelles comme c'est fait ailleurs... Et, pour finir, un discours qui pose clairement l'Homme comme un Dieu, avec tout ce qui va avec. Bref, le livre est un condensé de tout ce que je n'avais vraiment pas envie de lire, avec des discours dangereux et extrémistes. Il y a d'autres façons d'envisager et de parler de l'IA bien plus saines, et je rajouterai que ce n'est pas l'IA qui est une menace, mais bien les personnes qui sont derrière et ce qu'elles en font.
Lien : https://lecombatoculaire.blo..
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Sur fond d'un constat sévère sur les retards de l'Europe comme acteur dans l'industrialisation de l'intelligence artificielle, à la remorque de la zone Asie-Pacifique, l'ouvrage plaide pour une rénovation complète de l'éducation. Son programme est celui d'une neuroéducation complètement individualisée, débutant au stade de la sélection embryonnaire, s'étendant sur l'ensemble de la vie, sans salle de classe ni examen, et visant à démocratiser les quotients intellectuels à la Elon Musk (voire, à la Leibniz) pour éviter le kidnapping de l'IA et de la robotique par les seuls partisans du transhumanisme (de l'Homo Deus).

Les difficultés du livre tiennent largement en l'acceptation qu'il force, malgré les limites timidement soulignées de la mesure de l'intelligence, des fortes corrélations de celle-ci avec la situation socioéconomique (le niveau de revenu), la longévité, et la capacité innovante. Une dizaine de jeunes programmeurs doués, créant Whatsapp, générant en un an plus de valeur que Renaud avec ses milliers d'employés peu qualifiés en 5 ans. La finalité eugéniste prônée peuvent être rebutante, mais elle est avancée comme conforme à une visée d'égalité, de non-subordination impuissante aux décisions à venir.

Laurent Alexandre livre une réflexion détaillée et recommandable, tant dans l'historique qu'il retrace de l'IA, de son hiver sorti de Dartmouth college aux projets Neuro link et consort, que dans la conscience qu'il manifeste des enjeux et scénarios / basculements possibles : allant d'IA forte indépendante et hostile, à supérieure mais paternaliste, en passant par coopérative et complémentaire (et une dizaine d'autres). Comment et peut-on légiférer un domaine qui concerne une capacité dont nous commençons seulement à avoir une vision un peu rigoureuse, et sans savoir ce que nous voulons et pouvons vouloir ?

Il offre une vision globale qui pèse et sous-pèse plusieurs postures contrastées; une vision ancrée sur un ensemble de valeurs dites humanistes et technologues campées sur un bien commun étendu, dont Bill Gates, consacrant sa fortune à combattre la maladie et la sous-scolarisation en Afrique, fait office de modèle.

Je suis venu à ce livre après Homo Deus: A History of Tomorrow de Harrari. Ce dernier manifeste une conscience plus aiguisée de la contingence et de l'impossibilité de prévoir l'avenir (par contraste, Alexandre semble se prononcer sans hésitation sur les décisions qui seront prises dans vingt, trente, quarante et soixante ans), en même temps qu'il est moins riche en ce qui a trait aux scénarios possibles. Une des différences entre Alexandre et Harrari tient en ceci que le second estime que le développement de l'IA externalise dans les algorithmes l'autorité que les religions humanistes ont logé dans un laborieux travail de connaissance de soi; alors qu'Alexandre tend à considérer que ce développement peut mener à un renchaussement / réinvestissement de la connaissance de soi (fût-ce du fait des contacts qui deviendront réels avec des formes d'intelligence hybrides inédites; et fût-ce parce que le pouvoir de définition des problèmes et des limites relève de notre juridiction, et ne peut être d'emblée concédé au domaine de l'IA forte). Une autre différence tient en ceci que Harrari doute que les fonds publics soient mis à contribution pour égaliser l'accès à la neuroaugmentation. Il formule ce point en faisant l'hypothèse que, à la différence des masses prolétaires du siècle dernier (énorme pouvoir économique irremplaçable s'alliant à un pouvoir politique faible ou inexistant) les masses du futur qui seront déqualifiées par les progrès rapides de l'IA seront inutiles et économiquement et politiquement. Alexandre suppose que la perspective d'un État providence travaillant à généraliser la neuroaugmentation est d'autant plus plausible que le sens même de la solidarité tel qu'il s'est historiquement forgé ne serait rien d'autre que diminuer les décalages entre le niveau de richesse qu'apporte à une minorité son quotient intellectuel élevé, et celui de sa contrepartie sous- ou moyennement-douée.

Une tension semble diviser l'ouvrage entre une partie où Alexandre s'est persuadé que l'intelligence est génétiquement déterminée à 50% (voire au 2/3 de ses variations individuelles), et où l'acceptation d'un futur neuro-augmenté prend des allures de marche ou crève; et une partie où il concède à Kevin Kelly que l'intelligence est multiple, et que, l'intelligence artificielle n'exacerbant souvent qu'un ou quelques unes de ses facettes (y compris certaines inconnues), le scénario de la complémentarité du fait de faiblesses mutuelles humains/machines prend des allures de jeu à multiples inconnus, qui comprend un droit au hasard et à la déconnexion. le programme de la neuroéducation prôné, sans prendre tout à fait partie pour un des scénarios esquissés, penche vers l'hypothèse de Kelly, ainsi qu'en témoigne l'identification de ce programme à la tâche de tendre, de manière dynamique et souvent remise à jour, vers une mesure du quotient de complémentarité avec l'IA en guise de remplacement du QI. Dans le même ordre d'idée, Alexandre s'entend avec le paléoanthropologue Pascal Picq à l'effet que nous avons tout intérêt à respecter les autres animaux et leur intelligence, de manière à comprendre que le sort que nous leur réservons pourrait devenir le nôtre entre les mains d'une IA forte, apprenant par elle-même sa supériorité et notre incertitude quant à ce que vous voulons à son endroit, et qui nous réduirait à des commodités muettes ou des nuisances.

Bref, il s'agit d'un livre stimulant, riche, distanciant certains lieux communs, servant bien ses objectifs de (préparer à) regarder sérieusement ce que l'éducation et l'intelligence peuvent devenir.
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Citations et extraits (54) Voir plus Ajouter une citation
L’intelligence est le moyen dont l’humanité a été pourvue par l’évolution darwinienne pour survivre dans un environnement sauvage.
Grâce à elle, nous dominons désormais le monde et la matière. Cet héritage ancestral, fruit de millions d’années d’évolution et de sélection, est notre actif le plus précieux.
L’attention et l’énergie que chaque génération consacre à sa transmission sont immenses. Dans certaines classes sociales, elle est même une obsession permanente conditionnant l’ensemble des choix de vie : lieu de résidence, fréquentations, alliances matrimoniales, loisirs.
L’éducation est la clé de voûte de ce travail de transmission. Si elle consiste largement en l’acquisition de l’instruction, c’est-à-dire des savoirs utiles à la vie en société, elle n’a de sens que complétée par l’habileté à mobiliser les connaissances et à les associer. C’est ce que l’on nomme l’intelligence.
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Il n’y a pas de fatalité en matière d’avenir, mais des logiques profondes qui peuvent être infléchies, à certaines conditions. S’il n’est pas certain qu’une prise de conscience de la neurorévolution soit suffisante pour orienter son cours, il ne fait en revanche aucun doute que rester dans l’ignorance et le déni est le meilleur moyen d’aboutir au pire des scénarios. Celui d’un monde ou l’Homme subirait son futur. Celui d’un monde inégalitaire ou seuls les meilleurs sortiraient vainqueurs, laissant la multitude à la merci d’une neurodictature.
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Bien sûr, nous n'allons pas utiliser l'immense quantité d'intelligence à notre disposition pour se contenter de fabriquer des espadrilles et des brouettes : à pouvoir démiurgiques, objectifs démiurgiques.

Les fantasmes transhumanistes sont bien plus fondamentaux : tuer la mort, comprendre nos origines, conquérir le cosmos, augmenter nos capacités. Et ils vont mobiliser des milliards de nos descendants pendant très longtemps.

L'humanité va se découvrir d'innombrables nouveaux objectifs. La simple exploration et colonisation d'une seule petite galaxie - la Voie lactée - sur 500 milliards devrait prendre au minimum 50 millions d'années.

Quel que soit le degré d'automatisation de nos sociétés futures, il restera un immense besoin de travail ultra-qualifié, ultra-multidisciplinaire et ultra-innovant. Une infinité d'expériences et de missions sont à inventer.

Nous avons du travail jusqu'à la fin des temps. Et si l'on est transhumaniste, on peut ajouter que nous aurons encore plus de travail à ce moment-là pour empêcher l'univers de mourir.
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Pour chaque enfant, l'éducation nationale doit se poser une question : à l'heure où l'IA est déjà mille fois plus rapide qu'un grand généticien du cancer, que dois-je faire de toi et où dois-je te mener ?
Une certitude doit nous guider : imaginer que l'IA n'est qu'une mode serait une grave erreur. Il n'y a pas de retour en arrière possible.

Chapitre 2 : Les apôtres de l'IA et le nouvel évangile transhumaniste - p. 46
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Il est rassurant de constater qu’il n’y a pas de corrélation entre chômage et robotisation. Les deux pays les plus robotisés du monde sont le Japon et l’Allemagne où règne le plein-emploi. Mais les plus pessimistes font remarquer que ces pays sont confrontés à un terrible choc démographique. En raison de la persistance d’un faible taux de natalité, la population japonaise diminue et l’Allemagne ne va pas tarder à connaître le même sort, malgré l’immigration. En d’autres termes, dans ces pays, les robots ne remplacent pas les travailleurs mais compensent la pénurie de main-d’œuvre. Chaque année 800 000 jeunes Français se présentent sur le marché de l’emploi. Seront-ils mis en concurrence avec les robots dopés à l’IA faible ?
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Jean-François Copé et Laurent Alexandre - On n'est pas couché 2 février 2019 #ONPC
On n'est pas couché  2 février 2019 Laurent Ruquier avec Christine Angot & Charles Consigny  France 2 #ONPC
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