Nelson Algren est un écrivain américain, auteur notamment de « The walk on a wild side » («
La rue chaude » Gallimart 1960) qu'il dédicacera à
Simone de Beauvoir et qui inspirera une chanson de
Lou Reed. «
L'homme au bras d'or » remporte en 1950 le National Book Award.
Dans cet ouvrage il raconte l'histoire de personnages à la dérive, des marginaux qui vivent de larcins, de triches, d'alcool et de drogues. Il dépeint admirablement cette faune qui refuse le système et que le système ignore.
Nelson Algren écrit sur le même registre que
John Steinbeck, l'Amérique des pauvres et des laisser-pour-comptes, ou qu'
Erskine Caldwell, l'Amérique des « White trash », les raclures de blancs. Il use et abuse de la langue de la rue, un argot à peine audible qui traduit bien la simplicité d'esprit de ses protagonistes. Car ils ne sont pas de grands penseurs sans pour autant être des idiots, ils ont l'art de la débrouille, le sens de la survie dans le monde sauvage où la fatalité les a parqués, où ils se sont réfugiés.
C'est dans cette fange, au milieu de cette « basse-cour des miracles » que la poésie de l'auteur irradie de ses feux les plus enchanteurs. Il nous rend ces accidentés de la vie attachants et leur destinée poignante. Ils sont nous, si nous avions été aussi les victimes d'un aveugle fatum.
La lecture n'est pas simple. Entre l'argot des personnages, leur multiplicité, leurs sobriquets, le fil conducteur décousu, l'auteur nous faisant passer d'une scène à une autre sans forcément de lien, on est assourdi par une sorte de cacophonie. On en ressort étourdi, énivré par l'effervescence perpétuelle de cette vie fourmillante. On a l'impression que l'auteur a subitement allumé la lumière et qu'un parterre de cafards grouillent en tous sens.
«
L'homme au bras d'or » est un grand roman, un rendez-vous avec la vie qu'il ne faut pas manquer.
Traduction de
Boris Vian.
Editions Gallimard, Folio, 534 pages.