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EAN : 9782070373208
533 pages
Gallimard (14/10/1981)
3.55/5   20 notes
Résumé :
C'est en prison, à Chicago, que nous lions connaissance avec les deux héros de ce roman, Frankie Machine, dit la Distribe, et le Piaf, dit le Voyou. La Distribe est donneur de cartes dans un tripot clandestin ; il a le coup de poignet facile, il est l'homme au bras d'or. Ancien G.I., il vit dans un hôtel minable avec sa femme, clouée dans une petite voiture à la suite d'un accident d'auto. Frankie, responsable de l'accident, se sent l'obligation morale de subvenir a... >Voir plus
Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Nelson Algren est un écrivain américain, auteur notamment de « The walk on a wild side » (« La rue chaude » Gallimart 1960) qu'il dédicacera à Simone de Beauvoir et qui inspirera une chanson de Lou Reed. « L'homme au bras d'or » remporte en 1950 le National Book Award.
Dans cet ouvrage il raconte l'histoire de personnages à la dérive, des marginaux qui vivent de larcins, de triches, d'alcool et de drogues. Il dépeint admirablement cette faune qui refuse le système et que le système ignore. Nelson Algren écrit sur le même registre que John Steinbeck, l'Amérique des pauvres et des laisser-pour-comptes, ou qu'Erskine Caldwell, l'Amérique des « White trash », les raclures de blancs. Il use et abuse de la langue de la rue, un argot à peine audible qui traduit bien la simplicité d'esprit de ses protagonistes. Car ils ne sont pas de grands penseurs sans pour autant être des idiots, ils ont l'art de la débrouille, le sens de la survie dans le monde sauvage où la fatalité les a parqués, où ils se sont réfugiés.
C'est dans cette fange, au milieu de cette « basse-cour des miracles » que la poésie de l'auteur irradie de ses feux les plus enchanteurs. Il nous rend ces accidentés de la vie attachants et leur destinée poignante. Ils sont nous, si nous avions été aussi les victimes d'un aveugle fatum.
La lecture n'est pas simple. Entre l'argot des personnages, leur multiplicité, leurs sobriquets, le fil conducteur décousu, l'auteur nous faisant passer d'une scène à une autre sans forcément de lien, on est assourdi par une sorte de cacophonie. On en ressort étourdi, énivré par l'effervescence perpétuelle de cette vie fourmillante. On a l'impression que l'auteur a subitement allumé la lumière et qu'un parterre de cafards grouillent en tous sens.
« L'homme au bras d'or » est un grand roman, un rendez-vous avec la vie qu'il ne faut pas manquer.
Traduction de Boris Vian.
Editions Gallimard, Folio, 534 pages.
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« Et la nuit et le jour ne font qu'un, et le coeur lui-même est une pendule, figée sur une heure morte et froide. »

Je suis tellement contente d'avoir rencontré Frankie Machine dit la Distribe, le Piaf, Zosh, Molly-eu et les autres qui comptent tous autant dans cette histoire, entre deux Noël presque trois juste après la seconde guerre mondiale à Chicago, dans Division Street, un quartier où beaucoup d'immigrés polonais vivent de la débrouille. C'est un roman magnifique, énorme coup de coeur.

« Vivants malchanceux, bientôt malchanceux morts. »

Magnifique parce que tous les personnages sont fouillés dans les plus petits détails de leurs âmes chevrotantes, leurs vies misérables.

Magnifique parce que le décor urbain suit les saisons et clignote d'ombres, même l'été il y fait sombre.

Magnifique parce que ça parle une langue qui peut sembler étrange mais qui m'est familière, ou plutôt m'était. Les arpions avaient pour moi la même valeur que les orteils, qui ont la même valeur que des doigts de pieds pour beaucoup. J'ai été élevée dans cette langue et j'ai eu un tel plaisir à la retrouver, sans jugement de valeur. Je l'avais oubliée parce qu'après l'adolescence, on se rend compte qu'il faut avoir un langage qui exclut l'argot, parce que très vite on vous fait comprendre d'où vous venez, si vous la maniez aisément sans montrer qu'elle est « en-dessous », sans le sourcil qui dit « t'as vu j'utilise un mot d'en-bas^^ ».

Alors ce livre de Nelson Algren traduit par Boris Vian, c'est une plongée dans un univers oublié. Et avec la magie de l'écriture de Vian, j'ai pris en pleine poire ma honte. Jusque récemment encore je repasssais derrière ma mère pour que ses petits enfants comprennent le mot qu'elle venait de dire mais surtout pour qu'ils ne l'utilisent pas. Bien évidemment ma honte se cachait sous les atours de l'éducation « vois-tu ce mot signifie… mais il vaut mieux ne pas l'utiliser… » parce que j'en avais probablement souffert dans le regard des autres, à un moment. Et je transmettais cette honte accrochée à mon passé, à mes enfants. Quelle honte ! oui j'ai honte car c'est mon passé et pas mon passif. C'est une chance d'avoir aussi ce paquetage. Je l'ai tellement compris avec cette lecture.

« Frankie, si on cessait de se crucifier tous les deux ? » Donc si vous n'avez pas ce bagage argotique, vous allez trimez et ouvrir des quinquets, mon Vieux j'vous dis pas. Mais si vous y allez vous serez tellement gagnant car ce roman c'est de la bonne came, et au détour vous y verrez de la poésie qui sourd de ces mots.

« Ce n'était que la vieille femme du vent, de l'autre côté de la vitre, qui s'entortillait dans les feuilles grises de la pluie. »

Et puis ce roman c'est beau. Tout simplement beau. La beauté des déshérités qui se battent pour y croire au flush qui vient, « car les cartes tenaient au large l'éternelle obscurité », qu'une distribe enfin s'annonce au clair de lune empapilloté de milles petites joies et que les gouttes de pluie éclairent les rues d'un scintillement gris-diamant.

Et avec les brèmes c'est l'alcool qui soutient « car tout au fond du faux-cul de verre d'un bon double, tout finirait par aller bien. » Mais de petits turbins qui nourrissent pas, aux larcins y a pas loin, surtout quand la bibine coule, voire même « Mac Gantic le Frénétique » qui se pointe, ça vous enfouraille. En dedans autant qu'en dehors. « Pas de sortie au cul-de-sac de la déveine. Pas d'évasion derrière les barreaux bleu acier de la culpabilité. »

J'ai pas raconté l'histoire ?! mais c'est un drame ! Ciselé, fignolé, rien n'est oublié, tout est dit. Magnifique.

‘tain, il est bon Algren. Vraiment mérité son National Book Award pour L'homme au bras d'or. Quand je pense qu'il est mort dans l'oubli et sans tune…

« Il rit encore du rire le plus gai et le plus argentin pour voiler l'énorme désespoir gris du monde. » J'voudrais bien moi aussi…
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Boris Vian avait de nombreuses cordes à son arc. En plus d'être écrivain, musicien, poète ou encore ingénieur, il était également traducteur. Et c'est à lui que l'on doit la version française du roman de Nelson Algren. Dans ce cas précis, il semble compliqué de parler de traduction. J'imagine qu'il s'agit même plus d'une interprétation. En effet, la langue que l'on peut lire dans L'homme au bras d'or est à ce point argotique et expérimentale qu'elle semble tout simplement intraduisible. Il y a donc fort à parier que l'auteur de Vercoquin et le plancton en aura écrit sa version personnelle, puisée dans sa propre langue, plutôt que de rester coûte que coûte fidèle au texte d'origine. Et c'est certainement cette langue incroyable que je retiendrai de ma lecture.

La langue, certes, mais également les personnages : Frankie Machine, dit la Distribe, le Piaf, dit le Voyou, et toute la ribambelle de types interlopes aux surnoms éloquents et imagés qui gravite autour d'eux. Tous ces personnages, petites frappes et types louches, s'agitent dans le ballet romantique, cynique et poétique du Chicago des années cinquante. Et l'intrigue ? Oh, disons qu'en nous faisant suivre la descente aux enfers de la Distribe, partagé entre sa relation tendue avec sa femme et malsaine avec la drogue, l'intrigue n'est finalement que secondaire. Secondaire car l'auteur s'est clairement évertué, avant tout, à créer un décor pour ses personnages et à restituer l'ambiance propre au roman noir "hard boiled". Ainsi il plonge son lecteur dans les bas-fonds d'une société rongée par la violence, le désoeuvrement, les spiritueux et la crasse. Et c'est indéniablement la langue qui rend tangible l'atmosphère de ce roman qui, pour l'anecdote, décroche le premier National Book Award ever. C'était en 1950.

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Un national book award écrit par l'amant de Simone de Beauvoir et pour finir traduit par Boris Vian, en le commandant, je m'en léchais les babines. le sujet un ancien GI's, croupier dans des bouges est accro à la drogue et n'arrive pas à s'en sortir. Entre alcool, jeu, femmes et drogue, je n'en pouvais plus d'attendre. J'ai vite ravalé ma salive, c'est illisible. Boris Vian utilise pour la traduction de l'argot totalement incompréhensible pour moi. Une grande déception.
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Une histoire de drogue, de jeu, d'amour et de mort dans le Chicago des années 50, magnifiée par la traduction/transcription de Boris Vian. Plus noir que ça, tu meurs... Mais attention : connaissance de l'argot indispensable. Petit exercice : les "brèmes", ça vous dit quoi ? Si ça ne vous dit rien, pas la peine de le lire, mais si vous "entravez", alors là quel régal !!
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Citations et extraits (8) Voir plus Ajouter une citation
- Si c’était moi, je leur dirais de me laisser sauter à la corde, dit Frankie qui voulait dire aussi quelque chose d’astucieux. Mais Calva ne vit là rien d’astucieux.
- Et à quoi que ça lui servirait ? demanda-t-il. Il échapperait pas au fauteuil pour ça. La cravate de chanvre, personne en prend plus en Illinois.
Frankie n’avait pas si tort que le croyait Katz. Il restait encore, sur les registres de l’Illinois, le nom d’un fugitif qui mourrait par la corde s’il était repris. Dans la cave du shériff, parmi les machines à sous confisquées de cinquante auberges et les roulettes qui tournaient jadis pour Guzik, Nitti et Trois-Doigts-White, se dressait le gibet qui attendait, depuis des années, le retour de Tom O’Connor le Terrible.
Et bien peu de gens savent que derrière l’immeuble du Conseil de la Santé, où jadis s’élevait la prison du comté, se trouve encore la cellule des condamnés à mort d’où Tommy s’est échappé. Le bâtiment démoli depuis longtemps, la petite chambre de briques est restée là, au milieu d’un parking, attendant que Tommy revienne. La loi interdit que l’on démolisse la cellule et le gibet avant la pendaison d’O’Connor. Apparemment, on attendra longtemps.
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- J'peux me coller dans plus d'emmerdements en deux jours sans en chercher que les trois quarts des gens toute leur vie si ils les cherchent - pourquoi c'est comme ça, Frankie ?
- J'sais pas, sympathisa Frankie, c'est juste qu'y a des mecs qui swinguent comme ça.
Quoi que Frankie entendît par là, le Piaf le négligea pour fournir sa propre explication.
- C'est parce que j'aime vraiment les emmerdements, Frankie, c'est ça ce qui cloche. Sans les emmerdements, je serais déjà crevé tellement on se fait salement suer dans ce coin pourri. Quand t'es aussi laid que j'suis, faut tâcher que rien ne s'arrête pour que les gens ils aient pas le temps de se foutre de ta gueule. Y a que comme ça que t'évites d'avoir le noir.
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- Je crois que t'es maboule, conclut enfin le capitaine.
- Il est pas boule, confia l'ancien combattant à Casier-Chef. Il est riôle. Vous pigez : plus mariole que maboule.
De son visage plat, placide, inexpressif, il fixa distraitement un cafard de taille extra qui, sous le radiateur, agitait vers lui ses antennes dans un geste accueillant de demi-drogué. Viens donc en bas, où tout est tiède amour et rêves rafraîchissants pour toujours. Puis, sentant l'œil de la loi fixé, immobile, sur lui, l'ancien combattant se ressaisit et avertit confidentiellement le capitaine :
- On a été cueillis ensemble, et si cette cloche s'en va, moi aussi. Sans ça, c'est du double abus d'pouvoir ou quèque chose comme ça.
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C'était l'heure des ramasseurs d'ombres : l'heure de tous ceux, sur terre, qui n'ont de repos dans le sommeil ni dans la veille. Certains ramassent leurs ombres comme des souvenirs ; mais elle rassemblait les siennes comme des enfants des limbes dans ses yeux pâles et secrets.
À la lumière dont luisait doucement le crucifix lumineux, elle savait que les ombres attendaient d'entrer. Elles venaient à elle pour se réchauffer, tout le jour elles s'étaient senties indésirables. Comme ceux de ce monde pour qui les choses se sont détraquées.
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Tout était rance pour ces déshérités. Leur vie même avait une odeur de prison : ils la traînaient derrière eux dans les rues de Skid Row et la ville elle-même devenait une prison à ciel ouvert, avec des murs pour tous, des rires pour personne. Nés sur place, à Skid Row, ils cessaient de se croire nés en Amérique. Ils avaient émergé du mauvais côté des pancartes.
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