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Critique de AlexLiernais


La quatrième de couverture dit ceci :
«Un roman solaire : Irène, fille d'une grande bourgeoise excentrique et déchue qui a transformé sa résidence en hospice de vieillards, noue avec Francisco, fils d'émigrants rescapés de la guerre civile espagnole, une relation d'amitié complice que l'épreuve transmue peu à peu en un amour indissoluble.
«Un roman des ténèbres : journaliste, Irène se trouve incidemment à l'origine de la révélation d'un des massacres politiques dont abondent les annales des dictatures d'Amérique du Sud. La répression se tourne alors contre elle, contre Francisco, manque plusieurs fois de les faire disparaitre et les condamne finalement à l'exil, nouveaux émigrants d'une nouvelle guerre civile...
«Passant sans cesse de l'ombre à la lumière et de l'amour à la terreur, ce second roman d'Isabel Allende fait vivre des dizaines de personnages pathétiques ou burlesques, de la jeune paysanne épileptique et faiseuse de miracles au général fantoche qui régit le pays depuis le bunker, du prêtre-ouvrier des bidonvilles à l'inventeur de la machine à cueillir des noix de coco, du clown à la retraite à l'officier tortionnaire, du vieil anarchiste impénitent au coiffeur pour dames homosexuel et résistant(...)»
Bien dit. Quelques remarques. Fantoche désigne une personne sans consistance ni volonté, qui est souvent l'instrument des autres, et qui ne mérite pas d'être prise au sérieux. le rédacteur du texte ci-dessous emporté par son lyrisme dérape quelque peu. Pinochet -car même s'il n'est pas nommé, il ne peut s'agir que de lui comme il s'agit du Chili- n'est certes pas présenté comme un personnage sympathique et n'apparaît que très peu. Lorsqu'il est mis en scène, c'est pour donner des ordres que l'on ne discute et qui ont la force de leur efficacité.
Face à la dictature toute puissante, I. Allende place comme seule force pouvant s'y opposer l'Église et particulièrement le Cardinal à qui Pinochet n'a pas l'air de vouloir vraiment se frotter (je vais me renseigner pour savoir s'il s'agit d'un personnage historique).
J'aimerais aussi mentionner un personnage particulièrement intéressant dont il n'a pas été fait mention dans la quatrième de couverture. S'il n'intervient que peu souvent, il plane sur tout le récit dans la mesure où il est le fiancé de Irène qu'il connaît depuis son enfance, à qui il est promis depuis cette époque et avec qui Irène vit une relation amoureuse avant de se rendre compte de son amour pour Francisco -prise de conscience de son amour jumelée à une prise de conscience politique. le capitaine Gustavo Morante apparaît d'abord comme un militaire brillant, sûr de lui, beau et bronzé, viril et tout. On peut croire qu'il est l'antithèse de Francisco (il le surnomme d'ailleurs le Fiancé de la Mort). Personnage simple et carré, l'auteur ne s'attarde guère sur lui. On le croit disparu après qu'Irène lui ait signifié qu'elle en aimait un autre et qu'elle ne l'épouserait donc pas. Il réagit sans furie pourtant le monde s'écroule autour de lui. Au moment où Irène git sur son lit d'hôpital criblée de balles, il réapparaît et voyant ainsi la femme de sa vie et les causes qui l'ont amenée là, se révolte. Ce qui est intéressant c'est qu'il ne vire pas sa cuti, mais qu'il se rend compte que sa vision de l'armée n'est pas la vision de tous ses membres. On entre alors dans ses pensées :

"Ces crimes ne pouvaient rester impunis, parce qu'alors toute la société foutrait le camp, et ça n'aurait eu aucun sens de prendre les armes pour déboulonner le gouvernement précédent en l'accusant d'illégitimité, si eux-mêmes se mêlaient d'exercer le pouvoir hors de toute loi et toute morale. Les responsables de ces irrégularités sont une poignée d'officiers qui doivent être châtiés, mais la pureté de notre Institution est intacte, Irène, il y a dans nos rangs beaucoup d'hommes comme moi, prêts à se battre pour la vérité (...)" pp. 338 & 339 (dans l'édition Fayard)
et cela continue du même tonneau. Il décide alors de renverser le gouvernement et évidemment se fait éliminer. Ce qui fait dire à Francisco : «S'il se trouve dans les rangs de l'Armée des hommes comme lui, (...), alors tout espoir n'est pas perdu.» Ce personnage permet de nuancer la vision certes juste, mais effroyable de l'armée représente par le lieutenant Ramirez, crapule parmi les salopards.
Dans l'ensemble, le roman, s'il est très bon, bourré d'humour, mais aussi de macabres, est moins «fou» que "La maison aux esprits". L'histoire est beaucoup plus ramassée dans le temps et l'unité en est plus grande, mais on y perd la richesse de l'éclatement du premier.
À propos de amour et ombre, bon, d'accord avec ce qui est dit plus haut, mais pas convaincu. Je noterais simplement cette phrase qui me semble éclairer le roman : «La peur est encore plus forte que l'amour et la haine» dit Irène, effrayée au poste de frontière lors de son exil avec Francisco.
Bref, il est évident que je m'en taperais bien un petit troisième. Peut-être pas tout de suite, mais...
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