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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Andrea a 19 ans. Elle fut retrouvée poignardée dans son lit. L'orage en gronde encore.
Maria Luisa n'a à peine 15 ans lorsqu'on la retrouve dans un terrain vague. Son corps ou des bouts seulement, décharge sauvage entre les herbes folles et les serpents.
Sarita a disparue à 20 ans. Pas de corps, pas de trace. Présumée morte, faut-il garder un espoir de la retrouver.

Selva Almada s'intéresse à ces trois jeunes filles. Trois destins anonymes au milieu de milliers d'autres semblables dans cette Argentine des années 80. Elles sont nombreuses, jeunes filles ou femmes, à disparaître, à se faire tuer. Et pour combien trouve-t-on un coupable ?

Faites entrer l'accusé. Sauf qu'ici, il n'y a pas d'accusé. Quelques suspicions, sans fondement. Des témoignages. La police a enquêté, bien évidemment. Mais rien n'a été trouvé. Seuls un corps décharné et une mère en pleurs restent. L'auteure ne cherche pas la vérité, elle n'est pas là pour confondre les hypothèses. Elle est juste là, la voix contre l'oubli de ces femmes. Elle se rend au fin fonds des provinces, loin de Buenos Aires, proche de l'oubli. Elle respire les lieux, imagine les derniers instants se met en quête de faire revivre de l'intérêt pour des histoires qui contrairement aux jeunes filles ne sont pas encore mortes. La tension par moment est palpable, les gens ont encore peur de parler ou du moins se méfient de faire ressortir de terre le corps de ces malheureuses… D'autant plus que l'on ne sait pas, si ces meurtres sont l'oeuvre d'inconnus ou de proches. Des suspicions, toujours, mais pas d'identité.

C'est un roman, sans l'être. Femmes disparues, « chicas muertas », mais pourtant ce n'est pas un roman noir. Bien qu'il soit sombre. C'est l'Argentine qui veut ça. Peut-être à cause de son ciel étoilé, où chaque étoile renvoie l'âme d'une de ces jeunes filles. Ce n'est pas aussi austère qu'un livre d'histoire, pourtant ces trois histoires ont de quoi être austères. C'est entre les deux, à la fois roman, à la fois document, un livre contre l'oubli, une voix qui s'épanche de colère et de pleurs ces oubliées de l'Argentine. Même si les années défilant, il faut savoir allumer un cierge, et laisser l'âme des morts s'en aller, ne plus naviguer entre le monde des vivants et celui des morts, laisser l'âme dans le regard de l'autre ou dans la clarté de la lune…
Lien : http://memoiresdebison.blogs..
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Andrea, Maria Luisa, Sarita : elles avaient 19, 15 et 20 ans et elles sont mortes, assassinées dans les années 80. Faits divers dans une Argentine qui sortait à peine de la dictature. Des victimes "sans intérêt" car de condition modeste et surtout, femmes ! Féminicide, le mot n'existait pas encore : il caractérise ces meurtres commis dans une société argentine (mais le constat pourrait s'étendre à bien d'autres pays, ceux d'Amérique latine en tête) dominée par le machisme et le patriarcat. Les jeunes mortes n'est pas un roman, encore moins un polar, il relate l'enquête de Selva Almada, quelque trente ans après, alors que ces 3 affaires n'ont jamais été élucidées parce qu'au fond cela n'intéresse personne et que la corruption a fait le reste pour que l'oubli et la poussière recouvrent ces crimes. A travers ces 3 cas, Selva Almada décrit la condition des femmes dans son pays et son implication, son désir de comprendre, soulignant qu'aujourd'hui encore le mal est bien présent (Plus de 8 000 victimes depuis 2008 en Argentine). La romancière s'est faite journaliste et investigatrice mais son talent littéraire, révélé dans Après l'orage, donne à son constat et à son indignation les nuances d'un roman noir. Comme elle passe très vite d'un crime à un autre, avec un luxe de détails et de ressentis, il arrive parfois au lecteur de confondre les trois jeunes mortes mais là n'est pas l'essentiel. La qualité d'évocation de Selva Almada et son engagement social féministe sont portés par un style d'une puissance impressionnante.
Lien : http://cin-phile-m-----tait-..
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Dans les années 80, il ne faisait pas bon être une femme en Argentine. Encore moins une jeune fille pauvre. Selva Almada, dont j'avais particulièrement apprécié le premier roman Après l'orage s'intéresse ici à des histoires qui ont marqué son enfance, des faits divers sordides, des meurtres jamais élucidés. Les victimes ? Des jeunes filles, parfois même très jeunes, pauvres. Pas forcément isolées, la plupart avaient une famille, mais pas suffisamment méfiantes et peu armées face à la violence quotidienne imposée par les hommes.

En repartant sur les traces de trois de ces jeunes filles, trente ans après leurs meurtres, Selva Almada cherche à comprendre quelle spirale infernale a pu conduire à ces drames, mais également ce qui pouvait relier ces femmes entre elles. Il ne s'agit pas d'une enquête policière ou d'une volonté de rendre justice mais bien de la quête d'un écrivain qui se penche sur l'histoire récente de son pays, fouille dans les replis de la société argentine pour tenter d'en extraire les ressorts qui régissent encore aujourd'hui la vie de tous ses habitants.

Toutes les trois étaient différentes, comme l'étaient les circonstances de leurs disparitions. Andrea, 19 ans a été retrouvée poignardée dans son lit ; le corps de Maria Luisa, 15 ans a été découvert dans un terrain vague ; quant à Sarita, 20 ans, elle a disparu du jour au lendemain sans laisser de trace. Mais toutes les trois dépendaient des hommes et de leur éventuelle protection. En creusant leurs histoires, l'auteure les fait d'abord revivre. "Telle est peut-être ta mission : rassembler les os des jeunes filles, les recomposer, leur donner une voix pour les laisser ensuite courir librement quel que soit l'endroit où elles doivent se rendre".

Et surtout, elle recrée toute la société qui gravitait autour d'elles, apportant un éclairage bienvenu sur l'importance de l'environnement de ces jeunes femmes. "Je crois que ce que nous devons faire, c'est reconstruire le regard que le monde portait sur elles. Si nous parvenons à savoir comment on les regardait, nous saurons quel regard elles portaient sur le monde".

Alors que l'Argentine n'est pas encore débarrassée de ce que l'on appelle désormais "le féminicide", c'est à dire le fait d'être tuée au simple motif que l'on est une femme par ceux qui prétendent pouvoir disposer du corps des femmes comme ils l'entendent, ce récit très personnel tente d'apporter une touche d'espoir. En montrant que le destin des individus est entre leurs mains. Qu'il suffit parfois d'une voix pour s'élever contre et changer les choses. Il est également une invitation pour toute une nation à changer de regard sur les femmes.

Un grand merci à Babelio et aux Editions Métaillié pour cette découverte en avant-première grâce à l'opération Masse Critique.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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Le sujet de ce livre est tragique et éminemment important : c'est celui des maltraitances, des viols et des assassinats subis par de nombreuses femmes en Argentine, victimes d'hommes violents, machistes ou jaloux.

Selva Almada a voulu se faire la porte-parole de plusieurs de ces disparues, des oubliées dont la mort est restée irrésolue et donc impunie. Elle enquête, retourne dans les petites villes de province où se sont déroulés ces crimes, rencontre les proches, va même voir une voyante, et mêle ses découvertes souvent édifiantes à ses propres souvenirs de jeune fille, ses propres expériences du machisme et de la violence.

J'avais beaucoup apprécié le style et la construction très efficace d'"Après l'orage". Je m'attendais à quelque chose de similaire, mais l'auteure fait ici un tout autre choix narratif. C'est un récit plutôt destructuré, à la première personne, alternant avec des descriptions des événements ayant entouré la mort de ces jeunes femmes, dans un style plus journalistique que littéraire.

C'est assez décousu, on se perd par moments entre les différentes histoires qui nous sont rapportées et, je regrette de le dire, ça m'a semblé avoir été écrit un peu vite, avec quelques poncifs qui auraient pu être évités. Je me suis même demandée s'il s'agissait d'un texte écrit pour une commande et/ou (j'ose espérer que non mais c'est l'impression que ça peut donner) pour surfer sur la vague du thème du féminicide.

J'ai beaucoup apprécié les descriptions fines et belles de la vie quotidienne dans ces petites villes argentines, et été désolée de constater comment de nombreux hommes y semblent trouver normal de contrôler et abuser des femmes, parfois même des petites filles.

Mais j'aurais aimé pouvoir entrer un peu plus dans l'une ou l'autre de ces histoires tragiques, qui ne nous sont rapportées ici qu'à la troisième personne et de loin, comme des faits divers, une fois de plus (quel dommage!).

Se concentrer sur une seule de ces jeunes femmes, avec une approche plus littéraire, aurait peut-être permis de rendre le propos plus fort. Car en refermant ce livre, j'ai malheureusement l'impression de n'avoir fait que survoler le sujet, sans avoir pu mettre un visage précis sur une de ces femmes, ni avoir reçu aucune clé pour tenter de l'analyser et le comprendre.
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Récit glaçant qui met en lumière les violences contre les femmes en Argentine. Elles sont courantes, nombreuses et souvent impunies. Des menaces aux coups en passant par les viols et les meurtres, les corps des femmes argentines ne sont pas respectés par les hommes : plus de 1800 meurtres depuis 2008 ! Et lorsque l'on parle de femmes, il faut entendre jeunes femmes, dès 12/13 ans, elles sont embêtées, harcelées. Les victimes sont pauvres, des hommes riches aux puissants soutiens en profitent en toute impunité. Mais les jeunes femmes peuvent aussi être victimes de viols de la part d'un vieil oncle ou d'un cousin libidineux et/ou alcoolisé et désinhibé. La jalousie des hommes est totalement incompréhensible, ils peuvent passer à des actes violents parce que leur amie porte des tenues qu'ils jugent sexy, mais dans le même temps regarder avec insistance voire pire une autre fille habillée de la même manière et qui aura sans doute elle-même subi les foudres de son ami ou qui aura la chance d'en avoir un plus compréhensif : "Cachito était jaloux et il insultait sa petite amie à tout bout de champ, parce qu'elle se maquillait, parce qu'elle portait des vêtements moulants ou alors parce qu'il l'avait vue parler à un autre garçon." (p.45) Tout cela est tu, reste dans les maisons, ne s'ébruite pas, même si les parents parlent à leurs filles et leurs disent de se méfier. Néanmoins, tout se sait ou se devine : les viols domestiques, la protection financière d'une famille parce qu'un vieil argenté se tape l'une des filles, puis sa soeur plus jeune lorsque la grande aura passé la vingtaine, la prostitution pour subvenir aux besoins de la famille, les filles enceintes dès 14 ans, ...

Ce livre est terrible, je disais glaçant au début de ma recension, parce qu'en plus de parler de féminicide, l'auteure use d'un style froid, implacable. C'est un vrai travail de journaliste, un rapport clinique qui ne laisse pas respirer et qui enfonce le couteau bien profondément dans la plaie qu'est la violence contre les femmes en Argentine (et que l'on pourrait étendre de manière très large). Néanmoins, j'ai trouvé également ce récit un peu décousu : on passe d'une des trois jeunes filles mortes à une autre, puis à l'histoire de l'auteure, puis à d'autres jeunes filles agressées, puis à la voyante, ... c'est un peu difficile à suivre. Il faut s'accrocher tant pour le fond que pour la forme, mais c'est un livre qui laisse des traces.
Lien : http://lyvres.fr
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Dans ce récit, Selva ALMADA retrace le fil d'une enquête menée en Argentine où les filles disparaissent, sont violées ou tuées alors que les coupables restent impunis, protégés parfois par des magnats locaux ou par les failles de l'instruction.
L'ensemble est assez décousu, l'auteur passant d'un fait divers à l'autre (trois disparues sont l'objet de ses interrogations) sans plus de manières, elle questionne les témoins survivants (qui ont parfois été suspectés : fiancés, famille, voisins), tente de recoller les pièces d'un puzzle, consulte une voyante. Née en Argentine elle-aussi, l'auteur semble particulièrement marquée par les disparitions depuis son enfance et dénonce un fait de société dont les journaux s'emparent comme du scénario d'une telenovela : les femmes ne sont rien, leur condition les prédispose aux abus de toute nature.
Le récit n'est toutefois pas un plaidoyer féministe, il ne se conclut pas non plus avec la résolution des meurtres mais amène à réfléchir sur l'omerta argentine.
Si j'ai été touchée par ce récit, j'ai cependant regretté son côté brouillon.
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c'est à la fois un roman, une enquête, un documentaire.
Dommage, la présentation est parfois trop fouillie.
Mais pour tous ceux/toutes celles qui s'intéresse à l'histoire des femmes d'aujourd'hui, voilà un livre qui mérite le détour.
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