AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
3,78

sur 23 notes
5
2 avis
4
7 avis
3
1 avis
2
2 avis
1
0 avis
Deux familles, deux garçons , Pajarito Tamai et Marciano Miranda, voisins, amis d’une fois. Leurs pères, ennemis jurés, fabriquent des briques dans un bourg pauvre de l’Argentine du Nord. Almada dans ce troisième livre d'elle que je viens de lire, nous revient avec une histoire d'amour et de violence dans l'Argentine profonde, rembobinant le film du récit à l'envers.
Il s'ouvre sur les deux garçons ensanglantés, en fin de vie, gisant au petit matin sous la grande roue de la fête foraine du bourg. A partir de là on va apprendre leur histoire et la suivre jusqu'au dénouement final. Et c'est là que se déploie l'immense talent littéraire d'Almada. Mêlant la réalité au délire onirique des garçons vidés de leur sang, elle nous offre une chronique de l'Argentine rurale à travers un style aux mots précis et aux images puissantes, sur fond de paysage sec, épineux et plein de poussières. Y défile une galerie de personnages au sang chaud, dans une société de machos, où tout s'obtient par la force, tout se règle par la violence.
J'aime la prose de Selva Almada, que je vous invite à découvrir. Ces deux autres livres, “Après l'orage” et “Les jeunes mortes” sont aussi excellents.
Vive la littérature sud-américaine, rarement déçue !

“Sous la lumière blanche de l'aube, des taches sombres de boue et de sang....”



Commenter  J’apprécie          802
Au pied de la grande roue, Pajarito et Marciano, 20 ans et quelque, sont étendus, agonisants. Au-dessus d'eux, le ciel est blanc, c'est l'aube. Le jour se lève sur une nuit au bout de laquelle les deux frères ennemis, après une énième et ultime provocation, se sont affrontés à couteaux tirés, au sens propre, eux qui jusque là ne se battaient qu'à mains nues. Dans les soubresauts hallucinés de leurs derniers instants, les flashs se bousculent derrière leurs paupières qui veulent se fermer, mêlant dans le chaos l'histoire de leurs vies et de celles de leurs pères respectifs. Marciano et Pajarito ont pourtant été amis pendant leur enfance. Même âge (à quelques heures près), même village, même quartier (à quelques mètres près), même école (assis l'un à côté de l'autre), ils étaient inséparables, jusqu'à l'arrivée d'un nouveau en classe. Depuis lors, ils se livrent à une rivalité aussi acharnée que celle qui oppose leurs pères depuis toujours, sans que personne se rappelle exactement pourquoi. Leurs pères, justement, tous deux piliers de comptoir (comme tous les hommes du coin), tous deux briquetiers, l'un par héritage familial, l'autre par hasard et sans enthousiasme, l'un aimant son fils, l'autre le détestant (et le lui faisant comprendre à coups de ceinture) parce qu'il lui ressemble trop, l'un qui finira assassiné et l'autre qui s'en ira comme il est arrivé, juste parce qu'il en avait marre ou envie. Dans ce trou perdu du Chaco argentin écrasé par la chaleur, leurs fils auront du mal à résister à l'atavisme ambiant. Parce que dans ce pays machiste, il est obligatoire d'endosser le rôle du mâle dominant (ou de faire partie de sa meute hurlante), il faut savoir s'imposer, se battre comme un homme, un vrai, dompter les femmes, si nécessaire en les tabassant ou en les violant. Un pas hors de ce rang-là et il vous en coûtera. C'est ainsi que pour Marciano et Pajarito, la grande roue du destin s'est arrêté de tourner. Tout ça pour ça. Comme le dit l'inspecteur chargé d'enquêter sur la bagarre : "Quel gâchis, putain !"Cet ultime combat est donc l'épilogue dramatique d'une histoire de violence presque ordinaire, d'une lutte d'ego à la fois noble et stupide. Lorsque les esprits sont échauffés par la brutalité, l'alcool, la drogue, le sexe (l'amour aussi, un peu, quand même) et la convoitise, cela ne peut que se terminer en tragédie. Et comme dans "Après l'orage", avec une trame et un style épurés, Selva Almada fait de cette triste histoire un roman cinématographique, âpre et incisif, redoutable d'efficacité.
En partenariat avec les Editions Métailié.
Lien : https://voyagesaufildespages..
Commenter  J’apprécie          707
La littérature contemporaine argentine au féminin se porte très bien et affiche une diversité de talents que bien des pays pourraient lui envier. Lucia Puenzo, Elsa Osorio, Samanta Schweblin, Eugenia Almeida et Claudia Pineiro en sont quelques unes des figures marquantes, sans oublier Selva Almada, dont on a déjà pu lire Après l'orage et Les jeunes mortes. S'il ne nous parvient qu'aujourd'hui, Sous la grande roue a été publié en Argentine entre les deux livres précités sous le titre Ladrilleros (briquetiers) qui fait allusion au métier des deux pères des jeunes "héros" du roman. Sous la grande roue commence comme une tragédie grecque ou encore un western, avec deux garçons qui gisent au beau milieu d'une fête foraine, se vidant peu à peu de leur sang. le style très visuel de la romancière, et souvent crue, accompagne alors une batterie de flashbacks, dans un savant désordre chronologique, afin de remonter aux sources du drame. L'action de l'ouvrage se situe dans la province d'Entre Rios, au nord de Buenos Aires et à l'ouest de l'Uruguay, sur une terre aride où chaleur et alcool exacerbent les animosités et les rancoeurs. Sous la grande roue est une histoire de violence et d'hérédité plus ou moins consciente et surtout de machisme, où l'on se bagarre souvent pour montrer aux autres et à soi-même que l'on est un homme, un vrai. La plume de Selva Almada est aiguisée et clinique, il y manque peut-être un semblant d'émotion et d'empathie pour ses personnages, voire d'humour, pour que l'on soit entièrement conquis. Mais elle ne dépare dans la constellation des autrices argentines et mérite que l'on suive attentivement la suite de sa production (elle a 46 ans).
Lien : https://cin-phile-m-----tait..
Commenter  J’apprécie          150
Deux hommes sous une grande roue ... morts? en train de mourir?
C'est l'entrée qu'a choisie l'autrice dans la vie de ces deux personnes, une manière pour remonter le temps, jusqu'à leurs pères, et pour nous présenter les circonstances qui les ont emmenés là.
Un roman très sombre sur des jalousies, des rivalités entre deux familles qui ont entrainé nombre de violence.
Commenter  J’apprécie          120
J'ai lu la première fois Selva Almada dans son récit sur les féminicides argentins : Les jeunes mortes. Un livre glaçant. Elle revient au roman avec Sous la grande roue. Un roman dur et âpre. La construction déroute un peu au départ, puis dès que le pli est pris et qu'on se repère bien dans les familles, impossible d'en sortir. Sur fond de misère, de galère dans les campagnes argentines, elle bâtit une tragédie dans laquelle les hommes sont comme prédestinés à payer et reproduire les actes de leurs pères. Car ce sont bien les hommes qui apportent et transmettent la violence et la haine, les femmes doivent se contenter d'élever les enfants, de faire tourner la maison lorsqu'elles ne sont pas obligées de travailler pour que leurs maris puissent sortir et aller boire avec leurs copains. Elles sont effacées et subissent le poids des traditions machistes et leurs enfants en pâtissent autant qu'elles, même si les garçons auront la chance (?) de vivre comme leurs pères.

L'ambiance est brûlante, le soleil tape fort, attise les passions. L'environnement est pauvre, la région aride. Tout cela mène doucement mais sûrement vers la tragédie, les esprits sont chauffés à blanc. Selva Almada décrit cela admirablement, on visualise très bien les scènes, le décor, même les silhouettes et attitudes de ses personnages. Une écriture simple et directe qui ne s'embarrasse pas d'effets, qui va coeur des hommes et des femmes de son histoire. On pourrait y voir un scénario de cinéma tant les images sont nombreuses, un film noir, tragique avec des gueules, des acteurs burinés, des actrices qui rêvent d'une belle vie avant de se confronter à la dure réalité. du cinéma réaliste.
Lien : http://www.lyvres.fr/
Commenter  J’apprécie          60
Deux familles dans un même quartier. Deux pères entachés par le même laisser aller ; deux mères prises avec les mêmes inquiétudes ; deux fils animés d'une même fougue.
Deux jeunes gars qui, quand le roman s'ouvre, sont au pied de la grande roue. Gravement blessés, ils cherchent, qui son père, qui de l'aide. Et tous deux un sens à ce qui leur est arrivé.
Comme dans un jeu de miroirs déformants, on suit ces gosses dans leur amitié puis dans leur rivalité, dans un environnement de violence plus ou moins marquée.
La tension monte crescendo, rendant l'ambiance de plus en plus poisseuse, de plus en plus électrique. Jusqu'à l'élément déclencheur. Jusqu'à comprendre comment on en est arrivé là, au pied de cette grande roue...
Encore un beau roman noir et fiévreux de cette auteure qui sait décidément ficeler ses personnages aussi bien que ses atmosphères. Je me suis régalée.
Commenter  J’apprécie          40
C'est un nouveau roman dur et sans concession de cette écrivaine originale. Sa manière d'entrelacer critique sociale et réalisme poétique est unique et très intéressante. le délire des hommes, toute une société basée sur cette folie machiste, avec les conséquences macabres qu'on connaît.
Commenter  J’apprécie          30
(...)
Sous la grande roue est la chronique d'une tragédie annoncée dès les premières lignes. Après une ultime altercation, Pájaro Tamai et Marciano Miranda gisent au sol, l'un sur le dos, l'autre sur le ventre et la tête dans la boue, agonisant tous les deux au pied de la grande roue de la fête foraine installée près de leur village du nord de l'Argentine.

Comment ces deux jeunes autrefois inséparables en sont-il arrivés là? C'est ce que Selva Almada s'attache à démontrer tout au long de ce court mais non moins intense roman. Au moyen de chapitres courts, d'une écriture directe, parfois crue, et d'une trame narrative non linéaire oscillant entre passé et présent, entre réalisme brut et touches de magie liées aux divagations des deux blessés, elle remonte aux sources du drame en faisant défiler la courte vie de Pajarito et Marciano ainsi que celle de leurs pères avant eux.

Sous la grande roue est une plongée dans l'Argentine profonde, une immersion très visuelle et réaliste au sein d'une petite communauté rurale marquée par la pauvreté, rongée par le machisme, l'alcool et la violence. Dans ce village vivotent notamment les deux voisins et modestes briquetiers Oscar Tamai et Elvio Miranda. Leur vie se résume à travailler (un peu), à boire et à jouer (beaucoup) et à entretenir bêtement leur haine réciproque et le conflit qui les sépare depuis des années, le tout en laissant sans états d'âmes leurs épouses se débrouiller seules pour gérer les enfants, les finances et trouver une solution aux innombrables problèmes de leur quotidien.

En s'intéressant à une histoire d'amitié qui dégénère pour se transformer en quelque chose qui se rapproche de la haine que se vouaient leurs pères avant eux, Selva Almada questionne la transmission filiale et la reproduction des schémas familiaux. Elle dénonce par ailleurs le machisme et la violence multiforme à l'égard des femmes, que ce soit au sein du couple ou dans la société en général. Enfin, en s'appuyant sur le parcours de Celina et Estela, les mères de Pajarito et Marciano, qui ont toujours refusé de prendre part au conflit insensé opposant leurs maris, elle met en avant le courage de ces femmes et mères déterminées à s'en sortir malgré un environnement défavorable et chargé de violence.

Une très bonne découverte.


Lien : https://livrescapades.com/20..
Commenter  J’apprécie          20
Un roman loin d'égaler d'autres titres de Selva Almada tant il est difficile de suivre l'intrigue et de s'y retrouver dans un foisonnement de personnages en raison de flashbacks incessants qui suivent l'effervescence des pensées de chacun plus qu'une véritable construction romanesque,
Le livre dit la condition de familles populaires gangrenées par l'alcool, la violence, la banalisation du meurtre.
Commenter  J’apprécie          10
Je suis passée totalement à côté de cette lecture. Encore un roman social qui dépeint la misère d'une classe sociale défavorisée : de la violence, de la haine, des amitiés brisées et des rancoeurs tenaces, rien de très joyeux. Un récit sombre, dur, même, mais le tout dénué d'émotions. Un récit qui m'a eu l'air trop factuel et descriptif et qui ne prenait pas assez en compte les subtilités des personnages et les différentes nuances et ce qu'ils pouvaient ressentir (à part cette rage qui était partout).

Ajouté à ça une chronologie totalement éclatée avec des allers-retours incessants, une fin attendue, et une narration qui reste le portrait de cette classe sociale, difficile de réellement accrocher.
Commenter  J’apprécie          10




Lecteurs (72) Voir plus



Quiz Voir plus

Les classiques de la littérature sud-américaine

Quel est l'écrivain colombien associé au "réalisme magique"

Gabriel Garcia Marquez
Luis Sepulveda
Alvaro Mutis
Santiago Gamboa

10 questions
371 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature sud-américaine , latino-américain , amérique du sudCréer un quiz sur ce livre

{* *}