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EAN : 9782742728879
382 pages
Actes Sud (31/08/2000)
3.9/5   10 notes
Résumé :
Fin du XIXe siècle sur l’Empire ottoman. Dans toute sa splendeur, Istanbul vibre au rythme de la civilisation musulmane.
Mais, sur les rives du Bosphore, la liberté individuelle est étroitement surveillée par un système d’espionnage généralisé, personne n’est jamais à l’abri, et les condamnations à l’exil vont bon train.
C’est à cette époque que Hikmète Bey rentre de Paris où il a fait ses études. Ce jeune homme, qui n’est autre que le fils du médecin ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Je n'avais pas l'intention de poster un commentaire sur ce livre car je ne me sentais pas capable d'exprimer tout ce que je ressentais. Mais depuis que je l'ai terminé il continue à m'habiter, il m'impose de penser à lui.
Depuis le procès de Asli Erdogan que je suivais avec indignation, j'ai découvert la terrible situation de la Turquie et les emprisonnements injustifiés des écrivains et journalistes.
Après avoir lu "L'autre rive du Bosphore" et "Le sillon", je voulais lire quelques écrivains turcs.
J'ai commencé par Ahmet Altan, lui-même condamné à la perpétuité.
"Comme une blessure de sable" se situe à la charnière de deux institutions : l'empire Ottoman et la Constitution. le pouvoir absolu et despotique du Sultan et ,peu à peu, le désir des habitants de l'union des différents peuples.
Ceux qui vivent l'injustice, l'oppression, la peur grandissante d'être dénoncés se réunissent en secret bien qu'ayant conscience de risquer leur vie.
Le médecin personnel du Sultan lui-même, bien apprécié au Sérail, redoute ses accès de colère qui occasionnent des exécutions.
Au cours de lecture, il était possible d'oublier la période, fin 19è siècle et se croire de nos jours : le tyran n'est plus le même mais les pleins pouvoirs oui.
Le même climat d'espionnage, de délation, de dénonciations. le présent dans la continuité du passé.
On ne peut pas rester indifférents.
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J'ai découvert Ahmet Altan par le court texte qu'il a écrit en prison en 2018, alors qu'il est condamné à perpétuité pour avoir fomenté un coup d'État et avoir passé un message subliminal (sic) à la télévision dans ce sens… Ce texte lumineux malgré l'iniquité de la peine m'avait fait forte impression et c'est les yeux fermés que j'avais acheté dans la foulée les deux seuls romans de lui qui étaient alors disponibles en français (un autre a été publié à l'automne 2021). Je me suis enfin décidée à les ouvrir, alors qu'Ahmet Altan a entre-temps été libéré, puis emprisonné à nouveau, et encore libéré en novembre dernier, avant on ne sait encore quelle péripétie.
Comme une blessure de sabre nous amène à Istanbul à la fin du XIXème siècle et au début du XXème. En suivant une galerie de personnages tous plus ou moins connectés entre eux, on pénètre dans les sphères aisées et éduquées de la société et on approche au plus près des intrigues de cours et des mesquineries de courtisans. On se retrouve plongé dans un climat de suspicion où chacun est soit espion, soit espionné, voire les deux. C'est dans ces milieux que se dessine peu à peu une opposition d'abord sourde, puis qui ose se dire, puis s'organiser et enfin agir. En montrant comment des hommes, pour certains profondément attachés aux traditions et au Sultan, en arrivent à s'opposer et même parfois à trahir est un sujet passionnant. de même, découvrir la Turquie dans ces années-là m'a beaucoup intéressé. Hélas, tout ce beau sujet pour un roman est à mon avis gâché par la vie privée des personnages, qui occupe probablement les deux tiers du livre, le rendant lourd, verbeux et inutilement long.
C'est surtout la façon dont sont traités les personnages féminins que j'ai trouvée dérangeante : Une femme ne compte finalement que par sa beauté (ou son absence de beauté, mais celles-là sont reléguées dans le fond et ont autant de consistance que des potiches) et par sa volupté (ou son absence de volupté, mais là aussi, malheur à celles que les plaisirs de la chair ne transportent pas au septième ciel, elles devraient s'excuser d'exister). Mehparé Hamin, qui pourrait être le personnage principal de ce roman est donc belle d'une beauté inégalée et voluptueuse au-delà de toute description. La façon dont Ahmet Altan décrit ses personnages féminins m'a donc beaucoup gênée, et je ne pense pas faire preuve d'anachronisme. Que les femmes de cette époque ne soient pas, pour l'immense majorité, au fait de la chose politique, c'est compréhensible. Mais en faire des êtres uniquement préoccupées par l'assouvissement de leur jouissance personnelle, cela me paraît une psychologie un peu courte.
En définitive, et à mon grand regret, je n'ai pas aimé ce livre. le sujet aurait pu être intéressant mais, noyé dans ces descriptions d'alcôves, il n'est traité que d'une façon superficielle qui m'a laissée sur ma faim. On sent aussi tout l'amour que l'auteur porte à sa ville, telle qu'elle est aujourd'hui et telle qu'elle était alors, mais tout cela n'est pas suffisant pour racheter le livre à mes yeux. J'ai le deuxième tome, acheté en même temps que le premier. Je me mets à le lire tout de suite, je sais que sinon je ne le lirai jamais. J'espère, sans trop y croire, que la lecture en sera plus intéressante.
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Alors que le régime turc actuel s'illustre encore et toujours par ses exactions et ses répressions permanentes, j'ai envie de vous présenter ce livre d'Ahmet Altan, publié dans son pays en 1998. L'auteur, journaliste et écrivain, a été condamné en Février à la prison à perpétuité (aggravée et incompressible) suite à la tentative de coup d'Etat de Juillet 2016, pour lequel il est accusé, ainsi que son frère et quatre autres personnes, de terrorisme et de tentative de renversement du gouvernement via "un message subliminal" qu'il aurait délivré la veille lors d'une émission de télévision...

Ce roman, lui, n'a rien de subliminal et dire qu'il est sublime serait facile... Ce qui est certain, c'est qu'il nous conte une page d'histoire de l'Empire ottoman qu'il serait bon de nous rappeler aujourd'hui tant les similitudes foisonnent. Osons rêver à la fin d'un autre règne, bientôt.

Nous sommes à la fin du XIXe siècle, Stamboul n'est encore que le nom de la vieille ville, le Sultan règne sur un Empire agité de velléités d'indépendances diverses mais, retranché en son palais, il ne prête qu'une attention discrète aux remous qui frappent à la Sublime Porte. Fort qu'il est de sa police, de ses espions et de la fidélité de ses pachas, c'est plutôt de son frère qu'il pense voir venir la félonie.

C'est par la voix d'Osmane - un vieil homme à moitié fou qui vit et parle avec ses morts, enfermé dans un appartement rempli d'objets ayant appartenus aux différents protagonistes - que leur histoire nous est contée. Hikmète Bey, fils du médecin du Sultan, a grandi à Paris où il a vécu après la séparation de ses parents. A vingt-quatre ans, il est de retour à Istanbul sur ordre de son père qui veut le marier, entre au service du Sultan comme secrétaire de chancellerie et ne cessera de gravir les échelons. Mehparé Hanim sera celle qu'il se choisira pour épouse alors qu'elle a été répudiée par son premier mari, le Cheikh Youssouf Effendi, grand maître soufi dont le nombre d'adeptes ne cesse de croître. Raguip Bey, un jeune officier prometteur, est rappelé lui aussi à Istanbul par son maréchal, un héros de l'Empire contre lequel complotent les pachas du sérail. Les destins de tout ce beau monde vont se croiser et tenter de composer malgré les multiples réseaux d'espionnage des uns et des autres et la délation élevée au rang d'oeuvre de salubrité publique. Ajoutons à cela, les rébellions de plus en plus fréquentes que le Sultan règle à coup de solutions sanglantes et d'emprisonnements massifs, qu'elles concernent les Arméniens, les Albanais, les Kurdes, les Bulgares, les Serbes ou les Macédoniens, et voilà planté un décor romanesque sur fond de Bosphore.

Bien sûr, il sera question de passions amoureuses, sexuelles, partagées puis contrariées, portées par les figures de la belle Mehparé, mais aussi par la scandaleuse et délicieuse Mihrichah, mère de Hikmète Bey, qui s'en revient de Paris et sème le trouble dans la capitale ottomane, cheveux au vent et décolleté en avant. Mais bien plus, c'est à l'éveil d'une nouvelle conscience politique que nous convie l'auteur, celle des jeunes officiers qui bientôt changeront le destin de l'Empire, et dont le plus célèbre est Mustafa Kemal.

La figure centrale du roman est sans conteste Hikmète Bey qui, fort de son éducation européenne mais coincé de par ses fonctions, va devoir composer avec ses aspirations et les traditions. On assiste à l'évolution de cet homme qui mettra ses déconvenues amoureuses au profit de son pays en s'engageant à sa façon dans une résistance balbutiante qui ne sera pas exempte de dissonances. Tous soudés pour réclamer la chute du Sultan, l'identité turque va rapidement se heurter à celles des autres peuples de l'Empire. Et Hikmète Bey, partagé puis déboussolé, aura bien du mal à abandonner celle de l'Ottoman cosmopolite épris de liberté et de plaisirs, contrairement à Raguip Bey qui restera droit dans ses bottes et nous instruit sur la genèse du rôle déterminant de l'armée dans l'histoire de la Turquie moderne.

Roman de la sensualité et de la transgression, ce livre est à lire, à offrir, à partager, à réclamer à votre libraire pour comprendre les fondements de ce qui se joue encore aujourd'hui dans ce pays et faire entendre haut et fort, par delà les barreaux, la voix de son auteur afin ne pas oublier le combat de ceux qui s'élèvent pour une société éclairée contre le pouvoir des armes et des religions.

Vous pouvez signer la pétition lancée par Actes Sud, via notre ministre de la culture et fondatrice de ces mêmes éditions. C'était un minimum, l'autre aurait été de remettre en avant sur les tables des libraires les romans d'Ahmet Altan au côté de ceux d'Asli Erdoğan, ce qui n'est pas le cas. A lire également la défense d'Ahmet Altan sur le site de KEDISTAN
Lien : http://moustafette.canalblog..
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Nous sommes à la fin du XIXe siècle dans l'empire ottoman finissant. Nous suivons les destins de plusieurs personnages, qui incarnent les différentes facettes de la Turquie de l'époque. Hikmète Bey, élevé à Paris, fis du médecin personnel du Sultan, épouse une femme très belle, dont il va devenir éperdument amoureux. Il a du mal à supporter l'ambiance étouffante, les dénonciations, et le climat de peur dans son pays natal. Des jeunes officiers s'agitent en coulisse, écoeurés par les injustices, et souhaitant stopper la déliquescence de l'empire. Les destins individuels s'imbriquent dans l'histoire, et la forgent en même temps.

Un roman polyphonique riche et très prenant, avec de nombreux personnages, dont certains très attachants. L'auteur possède l'art du conteur d'une façon incontestable et sait maintenir l'intérêt du lecteur. Il raconte aussi l'histoire d'une façon vivante, intéressante, tout un restituant sa complexité.

Le plus à mon avis, est un ton un peu détaché, distancié, non dépourvu d'un certain humour. Même si le livre est au final assez classique, cela donne une pointe de singularité à l'ensemble. Une deuxième partie existe (L'amour aux temps des révoltes) que j'ai bien l'intention de lire pour continuer à suivre les personnages, ainsi que l'histoire de la Turquie.
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La lecture de Je ne reverrai plus le monde, m'a donné fort envie de découvrir les romans d'Ahmed Altan, dont seulement deux sont traduits en français.
Comme une blessure de sabre est un roman historique, qui transmet vraiment la fascination de son auteur pour la littérature du XIXe. Il m'a d'ailleurs donné envie de relire quelques classiques, cette impression de lenteur et d'imprégnation est unique.
Il réussit le tour de force d'expliquer précisément les raisons de la fin de l'Empire ottoman et de la chute du sultan, sans jamais mentionner une date. On est immergé à Istanbul, dans le palais du sultan, dans les demeures des pachas ou dans les tekké où défilent une galerie de personnages qui prennent une épaisseur considérable au fil du roman. Entre intrigues amoureuses et complots politiques.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
La peur et l'oppression qui régnaient dans la ville couverte de sureaux et de cèdres, où la mer, les chèvrefeuilles, les roses, les figues, les citrons et les melons embaumaient obstinément pendant que résonnaient les appels à la prière et les cantiques, composaient le climat à la fois conservateur et excitant de ce pays où les âmes des habitants, enfouissant constamment dans les profondeurs de leur être des sentiments bridés par les interdits et le péché, se changeaient en nuits noires au milieu desquelles leurs sentiments explosaient soudain comme un feu d'artifice.
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Au cours de la vague d'arrestations qui commença dès le lendemain matin , un grand nombre de pachas ainsi que des centaines d'officiers subalternes furent raflés et emmenés à la caserne de Balmoumdjou ; la ville bruissait de la rumeur annonçant que "l'on arrêtait tous ceux qui avaient pris par à l'insurrection et que certains seraient pendus", et la peur, qui tel un monstre souterrain tapi dans les entrailles d'Istanbul faisait périodiquement son apparition, se répandait à nouveau comme une épidémie.
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Rechite pacha s'ennuyait ; depuis le temps qu'il entendait prononcer les mots "je m'ennuie" par les mères vieillissantes de ses amis pachas auxquelles par amitié il prodiguait parfois des soins, ou bien par ses sœurs restées veuves de bonne heure et qui trainaient leur inquiétude dans de vastes résidences à hauts plafonds en se plaignant de tout, il découvrait pour la première fois le sens réel de ce sentiment et se prenait de remords au souvenir du ridicule dont il accablait secrètement ces femmes, prenant soudain conscience qu'il n'y avait rien de plus pénible qu'un ennui qu'on ne s'explique pas.
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Hikmète Bey se garda d’expliquer à sa femme qu’en cherchant « la liberté » au cours de conversations et de réunions auxquelles il participait avec ses amis journalistes, il avait découvert dans leurs propos ou encore dans les articles qu’ils lui demandaient de traduire, la notion nouvelle de « peuple » dont il ne voyait pas très bien en quoi elle consistait, mais qui lui avait plu dans la mesure où elle était synonyme d’opposition à la tyrannie.
(p. 280, Chapitre 19).
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Je n'ai jamais oublié ces instants ; assis au pied de l'arbre, tout frissonnant, j'avais découvert qu'il ne me restait plus aucun espoir, aucun rêve concernant l'avenir, et sais-tu ce que l=j'ai compris : rien ne peut davantage faire honte à quelqu'un que de renoncer à ses rêves...Tu es pris d'un tel sentiment de trahison que lorsque tu cherches le traître, tu aboutis à toi-même.
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