Un roman graphique poignant et foisonnant.
Pourquoi se suicider à l'âge de 90 ans, si tardivement ?
Antonio a grandi au sein de la campagne espagnole, près de Saragosse, peu avant l'avènement du franquisme.
Il s'est construit au milieu des querelles de clochers (en l'occurrence de lopins de terre) qui tournent souvent à l'absurde.
Son père, un pauvre agriculteur aux moeurs rurales bien ancrées, se montre d'un esprit peu ouvert. le seul avenir qu'il puisse envisager pour ses fils est la continuité de son activité. Il n'est pas question de permettre à l'un d'eux de rêver à une autre destinée.
A plusieurs reprises, Antonio tente de fuir cet environnement dans lequel il ne trouve aucunement sa place. A plusieurs reprises, il se rend en ville, empli de l'espoir d'un avenir meilleur. Mais ses rêves ne sont que désillusions et il essuie de nombreux échecs.
Son retour au village n'en est que plus douloureux, au vu des railleries paternelles et des villageois qu'il doit subir.
La guerre civile espagnole éclate et Antonio y prend part. Il y développe ses idées d'anarchistes et combat aux côtés des antifascistes.
Il se rendra en France en tant que réfugié républicain, sans papier. Une période là aussi très difficile, à la limite de la survie.
Mais finalement, il trouve refuge au sein d'une famille d'agriculteurs et il vivra des moments heureux.
Lui qui fuyait la vie agricole, aura trouvé ses instants de bonheur pendant cette période grâce à un paysan qui aime la terre et la respecte.
De retour en Espagne, il est contraint d'abandonner ses idéaux pour se plier aux règles du régime franquiste. Il se range et épouse une femme dont il a un enfant. Il mène une vie qui devient très vite monotone et sans plaisir. Il parvient à faire vivre sa famille grâce au travail qu'il exerce dans une biscuiterie.
Mais c'était sans compter la trahison d'un collègue qui le mène à la faillite. Il a tout perdu, son travail et son appartement.
Il vivote avec des travaux ingrats qui leur permettent à peine de se nourrir, lui et sa famille.
Cette épreuve l'éloigne d'autant plus de sa femme, avec qui il n'a jamais réellement eu de complicité. Cette distanciation les mènera jusqu'au divorce.
Cette séparation le conduit à intégrer une maison de retraite où Antonio ne trouvera jamais l'apaisement, si ce n'est le jour de sa mort.
Il prend enfin son envol vers un ailleurs dont il a tant rêvé et qu'il a toujours manqué jusqu'à présent.
Si vous vous attendez à une fresque historique de l'Espagne du XIXème siècle, passez votre chemin. L'auteur s'est bel et bien focalisé sur la vie de son père, dont il a été acteur de certains événements politico-historiques. Nous sommes bien en présence d'une histoire dans
L Histoire.
Je mets un bémol au graphisme dont les traits ne m'ont pas beaucoup plu. Ils manquent, selon moi, de précision et de netteté. Si le choix du noir et blanc peut paraître judicieux, les dessins sont trop denses, massifs et donnent une sensation de fouillis voire d'étouffement.