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EAN : 9782072956249
384 pages
Joëlle Losfeld (07/10/2021)
4.18/5   17 notes
Résumé :
La ville de plomb, c'est le titre d'un roman qu'écrit Marcel, un tout jeune dessinateur industriel, pour se libérer du quotidien, pour exprimer sa peine, ses espoirs et surtout l'impression pesante, étouffante, que fait sur l'âme de l'adolescent qu'il est encore le monde affreux qu'est le nôtre. Mais la ville de plomb, c'est aussi Paris, le Paris de Belleville, que Jean Meckert, dans ce livre d'un réalisme puissant, ,vrai, sans faiblesse, sans complaisance, fait viv... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Ce roman écrit en 1949 sous le nom de Jean Meckert dans la France de l'après-guerre, donne des clés pour comprendre l'univers à la fois réaliste et onirique de celui qui deviendra Jean Amila et produira des polars sublimes, aujourd'hui oubliés.
« Mon Dieu, épargne moi la honte de devenir un homme de lettres ; hideux individu qui raconte des histoires (…) (d'être) quelqu'un de bien solide, et qui ne soit pas de la cohorte de ceux qui préfèrent une belle histoire, une belle idée à la réalité… »
Dit Marcel Duhaut (notez le nom !) l'un des personnages, romancier en devenir, croupissant dans un bureau d'études où il tire des plans (pas sur la comète !).
Son ami Etienne Ménard fabrique des dynamos dans un atelier sombre.
Ils ont tous les deux dix-neuf ans et s'accommodent tant bien que mal d'une société fracturée par la guerre qui ne leur réserve guère un brillant avenir, et où les lendemains qui chantent s'avèrent n'être que des mélodies pleines de couacs.
Etienne suit des cours de trigonométrie et de dessin industriel pour progresser dans la hiérarchie de sa boite.
Marcel croit dur comme fer que le roman qu'il est en train d'écrire « La ville de Plomb » lui assurera le succès qui lui permettra de sortir de sa condition.
Hélas, c'est compter sans les adultes qui les ramènent à leur condition de mineurs toujours sous la tutelle des parents. Censés être des exemples, les adultes jouent le rôle de repoussoir.
Marcel et Etienne jouent au basket dans l'équipe des gaziers de Belleville et sont surnommés les siamois par leur coéquipiers tant ils paraissent proches.
C'est sans compter non plus sur leurs hormones qui les démangent. Etienne reluque du côté de Marguerite Pillot, la magasinière de quarante ans qui lui lance des oeillades, et Marcel lui n'a d'yeux que pour Gilberte Laurent, 22 ans, la secrétaire de Brocquet le patron combinard de la boite où il travaille.
Le récit se situe à trois niveaux, la réalité rapportée par le narrateur, le journal de Marcel où il reporte cette même réalité, et le roman la ville de plomb dans lequel Marcel utilise des éléments fantasmés de cette même réalité.
Il y a en fait trois récits dans le roman, qui s'imbriquent parfaitement.
La ville de Plomb se déroule dans Paris après qu'une grande partie du centre de la ville ait été irradiée par une explosion de bombe atomique. La zone est interdite, abandonnée aux rats, mais la tentation est grande pour quelques marginaux de vouloir y pénétrer. La légende affirme qu'on peut y vivre en absorbant des pastilles anti-radia et en survivant grâce aux ressources abandonnées dans les magasins et les maisons vidées de leurs occupants. Marcel et Gilberte sont les personnages principaux, Etienne y devient Stefan.
« Les nuits étaient horribles dans la ville morte. J'avais voulu passer la première dans une boutique du Chemin-Vert, un petit tailleur de quartier chez qui j'avais trouvé de quoi m'habiller chaudement. »
Dans cette construction, Meckert montre sa maîtrise de l'écriture. Chacun des niveaux du récit a son propre vocabulaire, sa propre logique dans laquelle les personnages montrent des facettes différentes de leur personnalité.
L'amitié entre les deux héros est magnifiée dans la ville de plomb, mise en doute par Marcel dans son journal, exposée de façon crue au lecteur qui dispose d'éléments ignorés par chacun des personnages.
L'autre force du récit est de rapporter les conflits jeunes/adultes et hommes /femmes dans une société encore sous l'influence de la religion et de sa morale.
Gilberte est à la recherche du véritable amour, elle va de Marcel à Etienne, qu'elle considère comme des « gamins » (ils n'ont pas encore atteint l'âge de la majorité légale) et Robert, un collègue, de treize ans son aîné, toujours sous l'influence de ses parents soucieux de voir leur fils frayer avec une jeune fille qui n'est pas de leur milieu.
La relation homme femme est biaisée par le mensonge, la recherche de sexe à tout prix et le risque de grossesse.
Morceaux choisis :
« Azerty, dieu des dactylos, connais-tu une combine pour me faire avorter ? » pense Gilberte devant sa machine à écrire.
« Mais qui sommes-nous donc enfin pour tant souffrir dans nos carcasses ? Qui sommes-nous pour haleter dans le silence, comme au fond d'un grand puits ? », écrit Marcel dans son journal.
« Et puis moi j'ai besoin d'indépendance, je suis un garçon, et je n'ai pas encore l'âge de faire des promesses. » dit Etienne à la fille qu'il a engrossée.
« Allons avait dit la mère, il faut comprendre. C'est encore un gosse. A cet âge-là, ça ne s'attache pas. En attendant je peux vous dire qu'Etienne n'est pas encore en âge de fréquenter. » disent les parents à la malheureuse venue chercher du réconfort…
« Vous voyez, Madame, la génération de maintenant !... Ah ! C'est beau ! Ah ! Nous pouvons être fiers de nos enfants !... » dit le père Ménard à la mère de Marcel
« Marcel Duhaut était triste. Il lui semblait qu'autour de lui les portes se fermaient et qu'il se retrouvait seul sur le palier, à comparer des paillassons. »
« Ceux qu'on appelle des gens d'action ne sont-ils au fond, que de simples infirmes pour qui la notion du réel est brumeuse ? »
« …il agissait direct, simple race secondaire ; il était là pour prendre, pour trouver du plaisir, bien ahuri sans doute de s'entendre amoindrir au bas du monde animal. »


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critiques presse (1)
LeMonde
22 octobre 2021
La Ville de plomb est le septième des livres parus chez Gallimard, entre 1942 et 1958, que réédite Joëlle Losfeld. Il constitue assurément une excellente porte d’entrée dans cette œuvre d’une puissance suggestive à la justesse incomparable.
Lire la critique sur le site : LeMonde
Citations et extraits (2) Ajouter une citation
En arrivant à la place des Rigoles, où un autre cinéma faisait donner sa sonnette à petits ressauts, il avait laissé sur sa droite l’école de la rue Levert. Sûr qu’il n’allait pas au cours du soir ! Il avait pris la rue des Pyrénées, large comme une avenue, bordée d’arbres, mais sombre et triste après la fermeture des boutiques.

Il n’y faisait d’ailleurs pas attention. Il pensait plutôt à la façon dont il conduirait sa soirée, puisque c’était quand même lui le bonhomme, dans l’histoire. Il lui poussait une émotion qui lui gênait la démarche. Il se sentait tout viril et ferme, avec aussi la grande inquiétude du petit puceau qu’il était. Est-ce qu’il n’aurait pas l’air trop nouille ? Est-ce que la grosse Margot n’allait pas tout de suite subodorer le petit débutant ?

Au fond, il s’en moquait. Il avait même le vilain coup réfrigérant en pensant que Marguerite avait facilement le double de son âge, et que c’était peut-être bien elle qui faisait la bonne affaire. Mais, après tout, elle n’était pas déplaisante, cette grosse femme avec ses tétons un peu écroulés qui lui balconnaient l’estomac et ses mollets dodus qu’on lui voyait jusqu’au jarret quand elle se baissait, parfois, à l’atelier. C’était du bon article pour petit débutant ; la quarantaine sanguine et enveloppée ; pas de complications.

À choisir, bien sûr qu’il aurait mieux aimé Germaine, du bobinage, pour lui faire son éducation. Elle était autrement jeune, plus fine, avec un fessier à vagues, une poitrine pointeuse et des yeux directs. Seulement c’était une sacrée salope, tout le monde était bien d’accord.

Étienne se demandait un peu ce qu’il allait faire de son carton à dessin. Il n’était pas question de trimbaler ça chez la mère Pillot ; ça ne se faisait pas. Il fallait le mettre en consigne dans un café, pour le reprendre en sortant. Mais est-ce que le troquet serait encore ouvert, quand il aurait terminé ses ébats avec Marguerite ?
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Toute la vie dans un atelier. Celui-là ou un autre. Tous les matins il se lèverait à sept heures moins le quart, il referait un chemin mille fois couru, il retrouverait les mêmes gestes jusqu’au soir…
Les heures étaient longues. Le travail semblable. On recommençait aujourd’hui comme hier, sans plus rien apprendre que des habitudes, des tours de main sans grande valeur. C’était bête !
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