Dès lors que j'ai ouvert l'ouvrage, je ne l'ai plus refermé ! le style tout d'abord : vif, clair, concis. Les faits : en mission de courte durée en juillet-août 1994 pour le Comité international de la Croix-Rouge, j'ai eu l'occasion de rencontrer le Cap
Guillaume Ancel et l'Etat-Major de la force Turquoise basée à Cyangugu. Je puis confirmer les faits suivants :
a)assistance & protection du camp de Nyarushishi, soit environ 8-10'000 Tutsi : si l'assistance médico-nutritionnelle était fournie par le CICR, la protection du camp fut assurée par des éléments de la Légion étrangère, ce qui a évité une tuerie de ces rescapés.
b) l'auteur évoque les "extractions" de Tutsis rescapés dans des villages mais voués très probablement à la mort. Je puis confirmer que l'extraction de la famille Moreira a bien eu lieu et en ai été témoin dans ses préparatifs. de telles opérations devaient conjuguer la fiabilité des informations relatives aux localisations, la rapidité et la légèreté des moyens militaires mis en oeuvre. Je sais par d'autres témoignages que des sauvetages analogues furent entrepris par le Cap Ancel
c) l'auteur distingue l'action de ses compagnons d'armes, censés obéir et astreints à ne rien dévoiler de celle de l'Elysée. L'opération Turquoise devait à ses débuts sécuriser la zone du sud-ouest du Rwanda en empêchant les forces du RPR d'y pénétrer avec le risque politique pour Paris de se trouver en appui du gouvernement génocidaire.
d) le génocide rwandais s'est déroulé sur une période de 4 mois faisant 800'000 victimes ce qui démontre son intensité. Il fut le fait de soldats, de gendarmes, de simples citoyens et même d'enfants, attisés par la propagande de la radio des Mille Collines qui demandait d'écraser ceux qu'elle nommait les cancrelats. L'identification des Tutsi fut facilitée par l'inscription de leur ethnie sur leurs cartes d'identité.
e) je ne puis me prononcer sur la livraison d'armes effectuées par l'armée française aux milices dès lors qu'elles passèrent la frontière zaïroise; cette action qui m'était inconnue jette un discrédit indélébile sur la politique française. S'agissant de la fuite des troupes rwandaises sur sol zaïrois dans une débandade totale, les armes en leur possession furent bien remises au poste frontière. Que devinrent-elles ? Furent-elles revendues ou simplement redonnées ? Il est évident que la Kalachnikov a toujours voyagé en Afrique. Pourquoi, pour le moins, une tentative de désarmement n'a pas été décidée par l'EM alors que la soldatesque gouvernementale était sans chefs et totalement démoralisée ? du génocide rwandais, on passait alors aux tueries zaïroises, moins médiatisées.
f) si l'ouvrage relate des faits précis, il interroge aussi et apporte des éléments nouveaux pour la compréhension du drame rwandais. Cet ouvrage va faire date, alors que les commémorations du 25ème anniversaire approchent.Ouvrage à lire d'urgence !