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EAN : 9782840496946
344 pages
Seguier Editions (05/05/2015)
4.6/5   5 notes
Résumé :
Hervé Guibert (1955-1991) fut, en France, l’un des premières personnalités à vivre son sida au grand jour, mais aussi à mettre en scène la maladie, à en faire un objet littéraire comme jamais aucun écrivain ne l’avait fait auparavant. Avec une précision déroutante, Guibert s’est filmé, photographié et a décrit ses métamorphoses sans relâche jusqu’à son dernier souffle.
Mais sa courte vie ne se résuma pas à la maladie. Loin s’en faut. Intime de Foucault, Chére... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
"J'avais fermé les yeux pour revivre l'histoire. L'histoire de sa vie. Cette route sinueuse, tiraillée entre la pudeur et l'impudeur, entre un quotidien feutré et l'expression éhontée de cette littérature qui fut pourtant le reflet fidèle de son existence.
Avoir été à ce point capable de faire de son vécu la matière même de son écriture et, dans une moindre mesure, de ses photographies. Il n'y avait que Montaigne et lui pour ça. Il avait voulu illustrer, à sa façon, ce que le philosophe moraliste revendiquait déjà dans l'introduction de ses Essais : "Être lui-même la matière de ses livres"."

Ma Rencontre avec Hervé Guibert vient d'avoir lieu...

Je remercie vivement Babelio et les éditions Séguier qui, dans le cadre de masse critique, m'ont permis de lire ce bel hommage de Frédéric Andrau consacré à l'écrivain- photographe suicidé et atteint du SIDA.
Hervé Guibert ? J'avais aperçu le nom dans une liste de Moravia dédiée aux écrivains qui s'étaient suicidés. Merci Moravia de m'avoir incitée à découvrir Guibert...
Dès les premières pages du livre, le lecteur est embarqué : l'écrivain est mort à trente-six ans, a beaucoup écrit ; photographe, il était aussi cinéaste (La Pudeur ou l'impudeur), acteur... Il disposait de multiples talents.
Ami de Michel Foucault et de bien d'autres personnalités, détesté par Marguerite Duras, Guibert à beaucoup écrit sur le sexe, la souffrance et la mort.
Très vite, je n'ai pu m'empêcher d'acheter son premier livre "La mort propagande" : il me fallait un livre de lui. Une présence de Guibert m'est vite devenue indispensable : le livre d'Andrau m'obligeait à me rapprocher déjà davantage de l'écrivain animé par une "irrépressible envie de vivre"...
Car chez Guibert, la vie et la mort sont intimement liées. Et l'écriture permet la vie avec la mort et autorise la mort dans la vie. Avec l'idée de la mort et avec la mort qui arrive, la littérature s'affirme. L’œuvre grandit et Guibert intensifie le sentiment de la vie...
Le mérite du livre d'Andrau est de nous montrer Guibert photographe et du coup, de révéler le rapport entre les mots et la photo. Aux yeux de l'écrivain-photographe, l'image et les mots sont complémentaires. L'image permet ce que ne disent pas les mots. Son langage, qui évoque, permet de montrer une réalité, un moment fondateur.
"Il prétendait depuis toujours que "la photographie parlait, ou plus exactement exprimait quelque chose que l'écriture avait vocation de parachever."
Ce furent les prémices de l'invariable théorie qui guida sa vie et selon laquelle les mots étaient indissociables des images, comme une sorte de complément naturel. Il ne se privera jamais d'appliquer ce principe."

Les mots, les images, la mort, la souffrance, l'amitié aussi :

"C'était également un garçon très exclusif qui n'aimait pas partager ses sentiments. Il n'aimait pas aimer deux personnes à la fois, il n'aimait pas profiter de deux amis en même temps. Il aimait donner et recevoir du temps unique avec chacun.

Encore un point commun avec Montaigne ?



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Livre posé. Premier contact.
Visage "botticellien" et "rimbaldien".
Chevelure d'angelot, lèvres délicatement entrouvertes, regard clair.
Photo miroir : "Moi" autoportrait de 1981.
L'auteur médiatiquement connu (de façon réductrice) pour son livre "A l'ami qui ne m'a pas sauvé la vie", irrémédiablement associé au sida, est figé à jamais dans sa beauté intemporelle et dans sa finitude avilissante.
Gisant à jamais dans la jeunesse de ses 36 ans fracassés, on mesure le Temps qui passe : il aurait eu soixante ans cette année.
La biographie que lui consacre Frédéric Andrau le fait renaître.
Que reste-t-il de lui après ce presque quart de siècle écoulé depuis son départ?
Que demeure-t-il de l'homme, de l'écrivain, du photographe, du combat final?
Flash-back.
Le livre déroule le fil d'une vie : de l'enfance au jeune adulte qui ne devint pas un vieil adulte et reste à jamais un jeune mort.
Fil rompu.
L'auteur l'aime, on le perçoit : sincérité, pudeur, défense...
Il tente l'objectivité si malaisée. Il est allé sur l'île d'Elbe où repose l'écrivain, il a rencontré des témoins qu'il remercie en fin de livre.
Il faut dire qu'Hervé Guibert n'est pas un "sujet" facile.
Il y a chez lui des espoirs de jeune loup, une violence nihiliste d'exister, des dérobades, des foucades, des provocations dérangeantes, masochistes, sadiques, des fantasmes... qui pourraient faire renâcler un lecteur non averti.
Frédéric Andrau nous guide dans la planète guilbertienne pas à pas, avec empathie et compassion.
Les rencontres, les passions, les déceptions, les trahisons, les scandales (la famille, le 7ème art, l'interviewer, les chroniques, la photographie, les auteurs, les lieux, les amours, les amis...), la soif de reconnaissance, une certaine sauvagerie, le charme tour à tour volontaire et involontaire, sont présentés, simplement dits, et contribuent à nous faire connaître (un peu) cet être complexe qui ira de déceptions à des succès confidentiels jusqu'à cette deuxième période où un public plus large découvrira "L'Homme au chapeau rouge".
La présentation des livres d'avant et d'après la maladie aide à mieux situer l'écrivain que fut Hervé Guibert : provocant, hanté de façon prémonitoire par la mort, la sienne, le sexe réel ou fantasmé dans une réalité crue qui peut toujours choquer, une esthétique de l'écriture.
Sexe et mort. Toujours ce jeu de miroirs. Toujours cette fiction/réalité dans des livres où le "je" joue un jeu de chat et de souris.
"Je" qui s'éclaircit de plus en plus jusqu'à devenir lui à part entière dans une vérité qu'il revendique : crue jusqu'à l'écoeurement, crue jusqu'au malaise, crue parce que nécessaire pour conjurer la maladie et la mort, crue pour en faire le chef d'oeuvre final sans quoi la vie ne vaut pas la peine d'être.
Difficile de sortir indemne de ce livre car au-delà de la souffrance et du combat d'Hervé Guibert, réapparaît la manière dont les sidéens étaient traités à l'époque.
Hergé Guibert, un mystère qui demeure et soulève des pourquoi sans réponses si ce n'est la sienne à chercher entre les lignes de ses livres, à scruter dans ses photos puisque mots et images se rejoignent dans l'univers de l'auteur.
Par ce livre, Frédéric Andrau rend un bel hommage accessible à tous.
"Hervé Guibert ou les Morsures du Destin".
Elles l'ont certes brisé mais le font apparaître envers et contre tout comme un être singulier usant sans tabou de sa liberté à s'exprimer.

Un grand merci à Babelio et aux Editions Séguier de m'avoir permis de revenir dans les pas d'Hervé Guibert.






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le 16 mars 1990: j'entends pour la première fois le nom du diaphane jeune-homme, assis à la droite de Pivot.
En mai 2005: Babelio et les éditions Séguier, que je remercie, m'adressent "Hervé Guibert ou les morsures du destin".
Entre-temps, j'avais acheté deux livres d'Hervé Guibert, lu des articles, mais l'étude de Frédéric Andrau, complète, objective, nuancée, m'a beaucoup enrichie, comme elle enrichira ceux qui ont la volonté de dépasser l'image facile et médiatique de "L'homme au chapeau rouge", qui ne fut pas seulement le provocateur, victime - peu après son maître et ami Michel Foucault - du sida, mais un jeune homme aux talents multiples, passionné de littérature, de photographie et un être complexe et contradictoire.
Il écrivait depuis l'âge de 5 ans, lisait et relisait inlassablement des auteurs comme Knut Hamsun ou Thomas Bernhard, et son imagination foisonnante lui permit de jouer avec talent de ses fantasmes, de savoir lier mort, sexe, sang et beauté.. Son originalité essentielle fut de faire de sa maladie et de sa mort un objet littéraire.
Outre ses activités journalistiques, cinématographiques, il fut un théoricien de la photo et un photographe de talent que l'on découvre enfin. Ses photos se sont voulues l'écho visuel du sida, et furent aussi pour lui un moyen de supporter l'insupportable.
Si Frédéric Andrau met l'accent sur la gentillesse, la générosité, la fidélité d'Hervé Guibert, qualités qui tendent à être occultées par les éléments scandaleux de sa vie, il montre aussi les paradoxes et les contradictions du jeune homme, à la fois pudique et exhibitionniste, refusant les tabous, revendiquant dans son oeuvre une totale transparence et pourtant longtemps dans le déni de sa maladie, vivant le sida à la fois comme une immense angoisse mais aussi comme un moyen de s'ouvrir les portes de la renommée, fasciné en même temps qu'horrifié par la transformation et la dégradation de son corps.
Frédéric Andrau non seulement analyse finement l'oeuvre, mais en met en évidence les thèmes majeurs: érotisme, fantasmes, pornographie, et même pédophilie -ce qui, curieusement, ne fit pas scandale à l'époque - dérision, récurrence des autoportraits, fascination - et ce, bien avant les premières atteintes du sida - pour la mort, cette mort qui rôde en permanence dans ses photos comme dans ses écrits.
Par les éléments biographiques qu'il donne, sans aucun voyeurisme et même avec une immense discrétion, lorsqu'il évoque Christine, l'épouse, ou Thierry, le compagnon, Frédéric Andrau permet de voir plus clair dans cet enchevêtrement de la réalité et de la fiction propre à Hervé Guibert, et pour tout cela, on salue son ouvrage.

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critiques presse (1)
NonFiction
15 mai 2015
Frédéric Andrau livre la biographie d’un Hervé Guibert fasciné par la mort et qu’il tient à présenter comme un « écrivain-photographe ».
Lire la critique sur le site : NonFiction
Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Déjà à cette époque-là, Hervé était fasciné par la mort. personne ne savait encore qu'il en ferait l'un des thèmes obsessionnels de son écriture. Lui-même le savait-il ? Il en jouait comme d'un concept provoquant qu'il n'épargnait à personne, comme s'il avait trouvé le thème qui permettait de repousser chaque interlocuteur, chaque lecteur dans ses retranchements les plus profonds et les plus obscurs, de sonder la résistance de chacun.
Il le disait, il l'écrivait.
Écrivait-il ce qu'il disait ou disait-il ce qu'il écrivait ? personne n'a jamais vraiment eu la réponse.
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Tout y est.

L'aveu le plus terrifiant de ce livre est sans doute contenu dans ce passage où le jeune homme parle avec sa mère et où cette dernière lui révèle qu'elle ne l'a jamais désiré, que c'est le père qui "l'avait forcée à cet enfantement" et que, pendant ces neuf mois, "elle se faisait tomber dans l'escalier pour le perdre". Comment, avec un tel aveu, ne pas comprendre toute la complexité du personnage et l'ampleur du trouble familial ?
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"Je suis allé en Afrique pour trouver l'oubli et m'oublier moi-même". Si l'on admet que dans tous les livres d'Hervé Guibert, le narrateur n'est jamais très loin de l'auteur, on peut en conclure que cette phrase en dit long sur la raison de ce voyage.
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Le jeune écrivain, apprenti cinéaste, était en train d'apprendre, d'une façon un peu brutale, ce que signifiait cette notion de "paternité frustrante" lorsqu'on était scénariste, a fortiori coscénariste, et qu'un film voyait concrètement le jour et tombait à la portée du public.
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Il lisait beaucoup. Il relisait inlassablement Thomas Bernhard, Peter Handke, Stefan Zweig, Zola, Hermann Ungar, Hermann Hesse. Kafka bien sûr. Il avait aimé aussi lire Fred Uhlman. L'Ami retrouvé en particulier, cette histoire d'amitié impossible entre Hans le juif et Conrad l'aristocrate, en plein montée du nazisme. Ce livre faisait partie de ces lectures sombres qui l'avaient bouleversé et qui nourrissait cet étrange besoin de tristesse, de morbidité.
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Videos de Frédéric Andrau (3) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de Frédéric Andrau
Frédéric Andrau invité de Jean-Noël Mirande à "Face à Face" France 3 Paris Ile-de-France pour son ouvrage " Régine Deforges une femme liberté" (http://bit.ly/2FcRKu8).
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