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Critique de jeandubus


Fortunes et infortunes d'un exilé cambodgien

Pour « masse critique », Cécile Remy m'a souhaité « bonne lecture » sur un petit carton des éditions Riveneuve. Merci donc chère Cécile.

Kim raconte sa vie. Il a soixante ans a peu près. Kim écrit pour ses enfants qui pensent qu'ils ont été un peu mystifiés… qu'un papa ingénieur chez Hydratec n'a pas pu vivre les aventures qui brillent dans ses yeux et peuplent ses rêves insomniaques.

Kim est un Cambodgien né au Vietnam, c'est un « héros ordinaire » qui parle cinq langues mais ne les écrit pas toutes. Toute sa famille ou presque est morte, décimée par les khmers rouges.

Il quitte le Cambodge à 18 ans pour faire des études d'ingénieur VRD (voiries réseaux et divers) et va au plus pressé (…qu'il est de fuir la guerre civile) dans une école au Maroc, même si son coeur bat pour la France. L'OMS finance ses études.

Loin d'une patrie haïe et lointaine qu'il rejette confusément, il construit son déni. Dix ans passent au Maroc entre études, déménagements nombreux, et rencontres féminines sans avenir puisque le communautarisme musulman lui interdit d'imaginer même un mariage avec une jolie marocaine…Lui reste sa guitare…

Employé comme chef d'équipe chez OTM (un gros bureau d'étude français) il est payé moitié moins que le Français qu'il remplace, il fait de courtes incursions en Afrique noire et se retrouve même prisonnier du front Polisario en plein Sahara occidental. Une grosse frousse…

Il renverse et tue un gamin avec sa voiture et se retrouve en prison. Influences et bakchichs divers le libèrent au bout d'un mois, mais le coeur n'y est plus et après un bref séjour aux States il réussit à séjourner en France avec un emploi dans un petit bureau d'étude qui se développe. Parallèlement il poursuit ses études à l'école des ponts et chaussées .Il habite la cité universitaire et son doctorat est financé par un bon salaire (sic) durant cinq ans.

Désireux de de fondre dans la société il se marie avec une artiste sud-coréenne qui lui donne deux garçons, Francis et Thibaut. Il aménage un pavillon acheté à Colombes et est naturalisé français.

Les garçons sont élevés dans la religion protestante et étudient dans des écoles privées. On imagine qu'après avoir été rendu orphelin par les communistes, Kim n'ait pas couru s'inscrire à la CGT. Kim en est conscient et qui se justifie : il donne à la France deux beaux garçons ( dont un médecin) intelligents et cultivés. Il est pour sa part un « monsieur tout le monde de la classe moyenne ».

En 1988 il vote pour les élections présidentielles, s'étonne et se félicite que l'échec de Chirac ne conduise pas celui-ci à déclarer une guerre sanglante à Mitterrand. C'est assez naïf sans être pour autant touchant.Un vote comme celui là engage d'avantage et mérite une vraie réflexion.

En 2012 retour au Cambodge... en touriste éclairé, et participation au développement du site touristique d'Angkor au niveau de l'assainissement. (formule un jacuzzi pour tous...)

Le déni original s'est transformé en oubli que seul les quelques immigrés survivants de sa famille lui remémorent quand il les croise. Il est bien évident que ses deux garçons sont parfaitement intégrés au point même de personnaliser ce déni enfoui.
Ni l'un ni l'autre n'auront la mémoire du Cambodge et leurs remerciements en forme de postface à fin de l'ouvrage font preuve d' une certaine condescendance :
« Certes, cette prise de conscience est enrichissante pour nous mais cet ouvrage a un toute autre but, probablement plus important. En effet, nous pensons que le livre a eu un effet thérapeutique sur notre père »

Certes ! Merci docteur


Bernard Corbel a aidé Kim dans le traitement et l'écriture de ses souvenirs. Contrairement à celui des deux garçons, le style reste naturel et sincère.

Une suggestion, mon cher Kim : Phnom Penh (où j'ai reconstruit le campus diplomatique français entre 93 et 99) est malade, entre autre, de ses réseaux (eaux usées, eau potables, éclairage public, électricité, voirie secondaire etc.) Il y a des accidents chaque nuit, des personnes renversées par des voitures ou des motos…et plutôt que d'aider au développement du tourisme de masse à Siem Réap (Angkor nouvelle capitale du tourisme) qui a son aéroport international, il faudrait mettre votre savoir, durement acquis (et largement subventionné), au service du peuple cambodgien (et de Phnom Penh une première fois dévastée par les khmers rouges en 1975) en l'aidant à vivre dans des conditions sanitaires convenables. Mais vous considérez vous aujourd'hui encore comme un exilé cambodgien? Difficile de répondre à cette question. (Toute l'ambiguïté du titre).

Je vous assure que les touristes ne vous seront jamais reconnaissants, eux.


Juste un détail l'aéroport de Roissy 1 CDG a été inauguré en 1974 par un vol TWA en provenance de New York, Vous n'avez donc pas pu y atterrir en 1972. C'était encore Orly …(sud même).
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