” Elle, Christine, était presque consentante. Elle avait au moins douze ans. Entre violée par un dingue et abusée par un ami, il y a une différence, non ? “
Les enfants sont charmants. C'est le matin, calme, thé, jeux dans l'eau, piscine surveillée. Ceux qui ont faim trouvent des beignets, des sandwichs, des barres de chocolat, des sortes de bonbons. Une jeune fille achète des chips: elle est blonde et délicate.
Ses cheveux mouillés, coiffés en arrière, elle mange assise et ses jolis orteils touchent le sol. Les enfants s'amusent dans l'eau.
Quand elle est seule chez elle, y a-t-il quelqu'un ?
Je me répète cette phrase : "Y a-t-il quelqu'un ?"
Peu à peu ma vie et moi nous nous détachons, je ne sais même plus à qui elle est. Elle me fait pitié. Bientôt je la confondra avec celle d'une autre petite fille. Je ne saurai même plus. Voilà le cours normal des choses éternelles. On perd jusqu'au souvenir, on acquiert un supplément de grâce et on finit par oublier qu'on vient de si bas.
Les HLM seront rasés, les placards à compteurs électriques définitivement fermés. Jamais plus on ne reverra ça. Sainte Séverine Nivet, dernière martyre de l'amour sale. Jamais plus. Et le sexe rentrera en grâce. On aura châtré tous les déviants. Point-du-Jour n'existera plus. La vie des petites filles va changer. Toutes seront des reines.
J'ai fait ce film par pure compassion. S'il est sordide, qu'y puis-je ? C'est la vie qui l'est.
"On viole les enfants, maintenant". Plus c'est petit, plus ça plait. Les amiénoises sont jalouses.
Elle peut être très crue quand personne n'entend. Devant moi, c'est différent, je ne suis qu'absence. En réalité ses mots sont signe de douleur.