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Critique de Nelja


Nelja
29 novembre 2014
Ha, la saga de Njall le Brûlé ! Déjà, pendant ma lecture, je résumais cette histoire en "une histoire de Vikings qui se font des procès". En effet, quand quelqu'un de leur famille se fait tuer, que font les personnages ? Ils portent plainte !
*voix intérieure* Euh, c'est normal, non ?
*moi* Tiens, oui, je ferais pareil. Mais je ne suis pas censée être un personnage d'un drame de vengeance ! Voir des Vikings se comporter ainsi crée pour moi une impression de décalage qui m'a fait rire, même si ce n'est probablement pas fait exprès.

En général, je trouve que la loi et la justice ont un rôle central et intéressant dans cet univers. Dans les péripéties, il y a entre autres la création de la Quinte Cour (l'équivalent de notre Cour de Cassation) par Njäll, un duel épique de révocation de jurés basé sur des détails légaux très pointus, une quête sous une fausse identité juste pour trouver _la_ formule légale qui permettra de réouvrir un procès conclu, ou bien ce passage que je trouve plein d'humour noir avec deux femmes qui passent leur temps à faire tuer les esclaves les unes des autres, et les maris qui n'ouvrent même plus la bourse de l'amende et se l'échangent à chaque fois...
Je trouve que la loi est presque une forme de magie dans ce récit. Des mots qui, s'ils sont exactement parfaits, obtiendront l'effet désiré et sinon peuvent être dangereux, des duels pour savoir qui est le plus fort... quand quelqu'un prévoit l'issue d'un procès à l'avance, est-il très doué en loi, ou a-t-il le don de prophétie ? Quelle est la différence ?
Il en est de même pour la poésie, d'ailleurs. La façon dont une épigramme pointue ruine la réputation de quelqu'un est presque magique aussi, dans la catégorie des mots qui deviennent des actes. Mais pour cela, c'est beaucoup moins central, dans cette saga-là au moins

Bien sûr, il n'y a pas que des procès. Il y a, donc, des disputes familiales, des meurtres, des razzias, des combats, des vengeances, des mariages, un peu de magie... mais c'était moins une surprise

Autant dire tout de suite les deux reproches principaux que j'ai à faire à ce livre.
D'abord, il y a 123 personnages récurrents (il y a un lexique à la fin, il m'a été bien utile), et même si tous agissent selon les traits de caractère qu'on leur définit, on ne peut pas parler de grand développement psychologique pour chacun d'entre eux. Il n'y a pas assez de place. On passe sans cesse d'un personnage à un autre. Même Njall, qui est dans le titre, n'est pas là dans le premier cinquième, ni dans le dernier, et même quand il est là une bonne partie de son temps de présence est consacré à donner de bons conseils à des gens qui ne l'écouteront pas forcément. Cela empêche un peu de s'attacher à quelqu'un, et de fait, personne ne m'a marquée.
Ensuite, il est un peu répétitif. Forcément, vu tous les personnages différents qui font partie de l'histoire, il y a beaucoup de demandes en mariage et d'alliances entre familles, de voyages à l'étranger pour se former une réputation, de combats - et surtout de procès. J'aime la façon dont sont tournés chacun de ces faits, les demandes en mariage très pragmatiques, les combats très descriptifs et visuels, les procès plein de magouilles, mais au bout d'un certain temps ils se ressemblent un peu tous.

L'auteur de la préface prétend que le centre de ce livre est l'arrivée du christianisme en Islande, que cela sous-tend tout le livre, que ce n'est pas qu'une digression. Moi je l'ai vue comme séparé du reste (ainsi que le duel pour le trône d'Irlande qui intervient comme un cheveu sur la soupe à deux doigts du dénouement), mais au moins, justement, ces passages, comme l'incendie, ne se répètent pas ! Ils font donc partie de mes préférés !

L'auteur de la préface dit aussi qu'il s'agit là, même à l'époque, de romans historiques, visant à exalter des vertus qui n'ont peut-être jamais existé et à glorifier l'ancienne Islande. Cela explique toutes les apparitions de personnages récurrents sans être centraux ou cruciaux qui dans un roman moderne ne serviraient à rien d'autre qu'à distraire le lecteur, mais ici, ont peut-être existé, peut-être même été dans les ancêtres des gens qui écoutaient la saga. Cela explique aussi que plein de personnes connaissent plus ou moins la fin, au point qu'il y a un spoiler dans le titre.

Pour moi, pas un coup de coeur, mais quelques passages hilarants, ou épiques, ou étrangement poétiques, et un trou dans ma culture comblé. Si je retombe sur cette catégorie, je lirai probablement une autre saga islandaise, mais une plus centrée sur le surnaturel. Certains de mes passages préférés (la terrible malédiction sur Hurtur qui fait qu'il ne pouvait satisfaire sa femme, les Valkyries tissant avec des entrailles humaines à la fin, la dernière poésie composée par Scarphedinn ou peut-être par son fantôme) sont ceux qui sont surnaturels.
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