Citations sur Ma belle, (42)
Ça doit être trop bien d'être trop belle.
Il n'y a pas de suspense, en se réveillant. On n'a pas besoin d'aller discrètement dans la salle de bains pour mesurer l'étendue du chaos. Ce que le miroir renvoie ne conditionne pas l'humeur de la journée. On peut s'habiller comme un cul, ça ne changera pas grand-chose. Les autres penseront même 《Oh lala, ce style, ça me donne trop envie à moi aussi de m'habiller comme un cul》.
Elle est sidérée par la lâcheté des hommes. Leur sacro sainte virilité dont ils ne savent pas quoi faire. Ils violent et battent, ou ramollissent comme des poupées de chiffon. C’est la peste ou le choléra.
Leur pseudo-puissance, en présence de femmes, s’exerce par la violence ou meurt par paresse. Le repos qu’ils trouvent, grâce à elles. Ça doit être si confortable de pouvoir compter sur quelqu’un. De laisser la vie couler comme un robinet qui fuit jusqu’à ce qu’une femme prenne leur destin en main.
Elle vomit cette façon dont, systématiquement, les choses tournent en leur faveur. Ils se laissent faire, obtempèrent, déposent leur indécision comme une offrande. Ils obligent les femmes à porter le fardeau de leur vie, et un beau jour leur reprochent de les infantiliser.
Ils les contraignent à développer toute leur détermination, jusqu’à l’épuisement, et en guise de remerciement les condamnent au bûcher.
Toutes les femmes puissantes sont des sorcières. Leurs bourreaux se prétendent victimes.
Je te fais le coup de la femme qui laisse son mec choisir. Alors choisi. "
Erwann se sent con.
Soudain, tout lui convient.
Il boufferait un paquet de serviettes hygiéniques si ça pouvait le sortir de là.
Il reprend les pois chiches en disant : "Non mais je t'assure, ça me va très bien."
Ils rentrent. Silence dans la voiture. Elle monte avant même d'avoir mangé.
Elle entend le bruit de l'opercule et les pois chiches qui tombent mollement dans l'assiette.
Elle s'endort les mâchoires serrées, ses beaux cheveux noirs comme un soleil fâché sur l'oreiller.
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Elle vomit cette façon dont, systématiquement, les choses tournent en leur faveur. Ils se laissent faire, obtempèrent, déposent leur indécision comme une offrande. Ils obligent les femmes à porter le fardeau de leur vie, et un beau jour leur reprochent de les infantiliser.
Le plaisir irradie de partout sur son visage, c’est furtif, il faut n’en rater aucune miette parce que bientôt sur ses traits, ça sera comme si rien d’un sourire n’avait jamais existé. Elle virgule souvent quand il dit oui, alors il dit souvent oui.
Il dit oui pour la maison, oui pour la résidence aux volets noirs, oui pour le quartier, oui pour la formule déménagement avec cartons inclus, oui pour refaire le sol avant d’emménager, oui pour le chat, oui pour arrêter la pilule, oui pour baiser ce soir, oui, oui, putain mais oui Irène, ce que c’est bon quand tu me fais ça.
Irène doit bien le reconnaître : l’existence de cette femme éveille en elle un instinct presque animal. Elle devient femelle. Son évocation, dès leur première discussion au bar, ses sous-vêtements délicats dans la salle de bains d’Erwann, ce triangle amoureux, au début de la relation, les larmes de sa rivale dans les mois qui suivent la rupture et l’inconfort d’Erwann agissent sur Irène comme un puissant excitant.
À l’idée que cette femme, dont elle ne sait presque rien sauf qu’elle est belle, puisse encore exercer un effet quelconque sur Erwann, elle ressent un curieux mélange de crainte et d’excitation. Elle redoute de partager un temps la tête d’affiche, mais savoure d’avance sa victoire.
Quant au fait que je lui fais du bien, j’en suis très heureuse, mais I'idée serait qu’il m'en fase autant : je suis sa meuf, pas son livre de développement personnel.
Ne pas être belle fut une bénédiction. Cela m’a obligée à développer d’autres ressources intérieures.
Pour l’instant, il confond encore amour et souffrance. Il mesure l’intensité de l’amour à la souffrance éprouvée. La souffrance a atteint son point culminant au moment de sa séparation.
Je ne savais pas que la vie pouvait être aussi douce. J’ai eu de la chance jusque-là, je n’ai jamais connu de grand malheur. Ce n’est pas avec ton père que j’apprends le bonheur. C’est pire que ça, mieux que ça : avec ton père, je découvre la douceur.
Douceur de se réveiller ensemble, douceur de son sourire au réveil, douceur de l’odeur du café, douceur de son baiser quand il part travailler.