J'ai refermé ce livre. J'étais encore sous tension, le coeur serré et bien sonné.
Je n'aurais jamais dû commencer à le lire, car la fin me hante encore.
Mais comment peut-on arriver à une telle finalité ?
Lorsque Magali m'avait lancé ce défi de lire «
Raisons obscures », j'avais bravement écrit « oui, soyons fous ! ». Cela m'apprendra de faire trop confiance aux femmes.
Et puis je ne me doutais pas, après avoir lu le très sensible «
le bonheur l'emportera », que l'auteure
Amélie Antoine avait écrit un roman aussi puissant, aussi percutant, d'un grand réalisme et d'un sujet terriblement actuel.
Pourtant ces deux familles, celle des Kessler et celle des Mariani étaient tout à fait ordinaires.
Deux familles des plus communes et invisibles, comme nous en connaissions beaucoup.
Dont le père et la mère travaillent, qui rencontrent des problèmes dans leur entreprise, qui ont leurs petits ou gros soucis avec leur couple, des ennuis avec leur voisinage. Et qui ont leurs difficultés permanentes avec leurs enfants, surtout lorsque ceux-ci entrent ainsi dans l'âge ingrat.
Mais c'était sans compter sur la plume embrasée et efficace de l'auteure, qui allait rendre l'histoire des deux familles, aussi terrifiante qu'extraordinaire.
Les parents Kessler et Mariani sont aussi les parents que nous sommes ou que nous avons été. Et notre rôle n'est pas toujours facile d'être toujours très attentifs à nos enfants, pour leur donner les meilleures armes lorsqu'ils affronteront leur vie future.
Mais comment pouvons-nous être certains que chacun de nous, père et mère, soit vraiment à l'écoute de sa fille ou de son fils ?
Alors que nous sommes nous-mêmes parfois aussi plongés et empêtrés dans nos propres soucis, dans nos tracas quotidiens, dans nos angoisses. Ou chacune et chacun se remet parfois en question sur sa vie professionnelle ou sur sa vie amoureuse.
Cette question sur l'écoute de nos enfants est tombée, comme un couperet, lorsqu'
Amélie Antoine qui était jusqu'alors narratrice dans son roman, se glisse soudainement dans la peau des enfants des deux familles pour qu'ils se racontent.
Qu'ils nous racontent au départ, des choses de trois fois rien, des gamineries, des « chochotteries » dont personne ne fait attention.
C'est à ce moment-là que mon malaise s'est fait grandissant.
C'est à ce moment-là que j'ai compris que les parents Kessler et Mariani n'avaient peut-être pas été assez vigilants à certains signes de leurs enfants.
Et que peut-être des choses irréversibles allaient se passer.
Et que surtout ces drames qui semblaient se profiler à l'horizon, auraient bien pu s'abattre sur vous, sur nous et nos propres enfants.
Quelque part dans une école, il y a des enfants qui rient, qui crient, qui se bousculent, qui se taquinent, qui se tirent la langue, qui s'insultent, qui se pincent…
Tout semble si accoutumé, si anodin et si lointain, comme le calme avant l'orage.
L'orage de l'épouvantable, celui d'un incommensurable gâchis des âmes et des êtres, celui d'un océan de larmes et de culpabilité.