Voici un thriller remarquable qui sort du rang pour plusieurs raisons :
Tout d'abord, c'est la première véritable tentative d'un auteur plutôt versé d'habitude dans l'Imaginaire (Notamment le remarquable «
le Sarcophage des dieux ») dans le domaine du thriller.
Et c'est une vraie réussite, un coup de coeur pour moi.
Je n'ai pas pu lâcher ce livre avant la fin. Pour employer un vilain mot de franglais, nous avons affaire à un véritable turn-over.
Les lecteurs d'imaginaire pourront se dire que leurs auteurs favoris sont capables de tout écrire (
Serge Brussolo, à qui j'ai beaucoup pensé en lisant ce roman en était déjà la preuve).
Quand aux lecteurs de polar qui méprisent la
Science-fiction, je ne peux que les inviter à lire ce roman. S'ils sont conquis par l'auteur, ils devront bien se pencher sur ces autres livres…
Le pitch ? Théo Vince, jeune corse, se rend à Paris, à la demande de Laetitia – sa mère – qui vient de décéder, pour y rencontrer Leoni. Vince ne sait rien de cet homme, sinon qu'il a une dette envers Laetitia et qu'il ne pourra donc lui refuser un job.
Je n'irais guère plus loin pour ne pas spoiler. On verra Vince, qui souffre d'une maladie rare tomber successivement dans des pièges de plus en plus monstrueux.
Tout cela est émaillé par des retours en arrière sur la triste jeunesse de Vince et la vie de sa mère ( très émouvants chapitres).
Nous sommes ici dans un roman noir, très noir. Et l'on est proche de l'atmosphère des romans de la Série Noire d'antan.
L'auteur ne verse cependant pas dans le pittoresque gratuit ou l'argot de bazar mais il adopte un un ton encore plus désespéré. Il ne semble y avoir aucune échappatoire pour les personnages qui se débattent pourtant du mieux qu'ils sont ; L'intrigue est menée par l'auteur de main de maître. Rien n'est en trop. Tous les personnages, même secondaires, même (et surtout) ceux qui restent dans l'ombre ont une épaisseur confondante. On a vraiment l'impression que
Dumé Antoni les a visualisés et qu'il nous transmet ces images.
Vince, le personnage principal paumé attachant au coeur tendre, perdu dans saviez et sa maladie, cherchant estime et amour est décrit avec une empathie remarquable malgré es aspect terrifiants,
Leoni, le patron d'abord perçu comme un brutal chef de clan est peu à peu dévoilé dans sa monstruosité. La scène finale de la confrontation décrite jusqu'aux plus infimes détails dans des dialogues crus est une réussite totale. L'écrivain ne ménage pas ses lecteurs jusqu'au plus infime détail.
Les autres personnages sont encore plus attachants de l'émouvante jeune fille de Leoni, broyée par cette histoire en passant par
Jean-Charles, le vieux gangster sentimental, tous dégagent une empathie certaine. On me permettra d'avoir une pensée émue pour la voisine toxicomane et sa petite fille, figures douces et totalement innocentes de cette histoire.
Il faudrait parler aussi des décors ; avec une économie de mots et sans s'y attarder outre-mesure, l'auteur arrive à nous rendre l'atmosphère et les odeurs d'un club interlope, d'un petit bar parisien, d'un petit appartement parisien ou d'une villa cossue de Versailles…
Le style de l'auteur s'adapte bien à chacune des situations. Il peut passer de l'âpreté pour les scènes de violence à un ton plus mélancolique pour conter la jeunesse de Vince.
Vous l'avez compris, ce livre est hautement recommandable, IL peut seulement susciter la crainte que l'auteur abandonne l'imaginaire pour le thriller.
( Et au fait, ce n'est pas anti corse, l'auteur est lui même originaire de l'Île de Beauté)