Le bestiaire ou Cortège d'Orphée

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« Je suis certain qu'avec votre art que vous possédez bien et votre culture, un idéal vous transportera et que le résultat de votre travail sera merveilleux » - Lettre de Guillaume Apollinaire au peintre et graveur Raoul Dufy en 1911.

Comme le fit avant lui La Fontaine avec ses fameuses fables, Guillaume Apollinaire brosse des portraits pleins d'esprit de différents animaux mythiques.
Cette première oeuvre poétique est un recueil adressé à Orphée, autrement dit au personnage de la mythologie grecque qui « passe pour représenter la perfection de toute musique " ou « la musique absolue ». Curieuse association d'un poète moderne et d'un être imaginaire vieux de plusieurs siècles, fils d'une muse et d'un roi grec, à qui le dieu Apollon confie une lyre magique, grâce à laquelle il enchante le monde.
Le chef d'orchestre « Orphée » présente les animaux : les « aériens », les « terrestres », les « aquatiques », les « volants ». Les traditions antiques imprègnent l'oeuvre.
Orphée apparaît sous les traits du Christ dans l'introduction de la troisième partie. La gravure le souligne par le mot ιχθυς, « poisson » en grec.

Orphée revit par Apollinaire au début du recueil :
Admirez le pouvoir insigne
Et la noblesse de la ligne :
Elle est la voix que la lumière fit entendre
Et dont parle Hermès Trismégiste en son Pimandre.

En 1906 Apollinaire a demandé à son ami Picasso qui réalisait des gravures sur bois expérimentales d'animaux de bien vouloir lui graver 18 poèmes très courts qu'il avait publié dans « La Phallange », un journal expérimental. Les lecteurs attendaient une édition illustrée.
Au dernier moment Picasso se désiste. le poète se tourne donc vers le peintre Raoul Dufy qui, en 1911, illustre les poèmes, qui deviennent trente, en les gravant sur bois.
L'impression sur les presses à bras exigeant un grand soin est très lente pour donner des résultats parfaits. le résultat du « Bestiaire ou Cortège d'Orphée » est à la hauteur et est digne d'être regardé comme un des plus beaux et plus rares livres de l'époque.

Par la suite, de nombreux compositeurs mettront ces poèmes en musique dont Francis Poulenc.

La devise choisie par Apollinaire pour ce livre : « J'émerveille ».

L'Éléphant
Comme un éléphant son ivoire,
J'ai en bouche un bien précieux.
Pourpre mort !… J'achète ma gloire
Au prix des mots mélodieux.

J'ai emprunté à la bibliothèque ce livre à la taille hors norme après avoir relu "Alcools" de Guillaume Apollinaire parce que les deux recueils sont souvent associés. Il est aussi grand que les poèmes sont courts parce que "Le bestiaire ou cortège d'Orphée" est illustré par Raoul Duffy et ses gravures sur bois méritaient une place conséquente. Il utilise une technique ancienne où la planche est coupée dans le sens des fibres du bois et gravée à la gouge et au canif ce qui donne un aspect archaïque qui fait penser au moyen-âge. Cela va bien avec les textes animaliers.
Grands ou petits, à plumes ou à poils, Apollinaire dresse le portrait des animaux en quatre lignes. Il sait être drôle et celui que je préfère c'est le paon.
En faisant la roue, cet oiseau,
Dont le pennage traîne à terre,
Apparaît encore plus beau,
Mais se découvre le derrière.
Certes, on est loin des Fables de la Fontaine mais ce livre d'art montre un travail collaboratif innovant pour l'époque puisque la première édition date de 1911 et qu'il s'agit du premier recueil du poète.


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Publié en 1811, le Bestiaire ou Cortège d'Orphée est un recueil de trente courts poèmes de Guillaume Apollinaire (1880-1918).