Étonnant roman qui décrit la France pendant la drôle de guerre d'août 39 à mars 40, toute la France, des trouffions et leurs officiers qui creusent des tranchées autour de Meaux, de la haute bourgeoisie se promenant de l'avenue Henri Martin au cap d'Antibes, des ouvriers communistes des quartiers pauvres de l'est parisien. A peine un fil rouge avec la mise au banc des communistes, les arrestations arbitraires, et la déchéance des députés élus, première étape dans la vilenie qui conduira au régime de Pétain et la déchéance des élus socialistes et juifs au nom de la protection de la nation, de la vraie France. Tout ce beau monde est beaucoup plus préoccupé par le péril rouge et les conséquences du front populaire que par la menace des troupes nazis que pourtant beaucoup imaginent déferlant sur la France vu l'impéritie de nos généraux., mais on pourra toujours négocier avec Monsieur Hitler, tandis que les rouges… Ce n'est pas un roman historique mais la description d'une époque plan par plan ou des personnages passent et discutent avec des dialogues enregistrés au café du commerce ou dans les salons de thé, des propos souvent décousus, des phrases qui ne se terminent pas, la vraie vie quoi. Une suite d'images sans construction logique hors le temps qui passe, des gens qui subissent les événements sur lesquels ils n'ont aucune prise, hormis peut être les communistes de base qui, menés par leur foi aveugle dans le parti, s'investissent corps et âme dans La défense de la classe ouvrière et de leur rêve ultime la dictature des soviets. Mais
Aragon est aussi un grand sentimental, on lui doit les plus beaux
poèmes d'amour mis en musique et chantés par
Jean Ferrat, et son roman serait incomplet s'il n'était traversé par des idylles toujours tristes, sans issues heureuses. Il faut relire
Aragon.