- Bonjour, brigadier, dit-elle d'une voix enjouée.
Belhomme salua avec raideur.
- Madame Frotton, j'aimerais vous parler en particulier.
- Mais certainement. Toute à votre service.
L'épicière donna un tour de clef à sa porte.
- Nous serons tranquilles, reprit-elle. Voulez-vous me suivre dans ma chambre à coucher ?
- Merci, madame.
Le sanctuaire de Pauline Frotton était encombré de bibelots du plus parfait mauvais goût, de coussins peints à la main, de napperons brodés. Une poupée andalouse trônait sur le lit recouvert de satin rose bonbon. De mièvres gravures à base de clair de lune, de Vésuve fumant et d'arlequins masqués ne parvenaient pas à corriger l'ignominie d'une tapisserie sortie tout droit d'un vomitoire.
Pauline Frotton cligna de l'oeil.
- Que diriez-vous d'un petit pastis, brigadier ?
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Belhomme se débarassa de son verre, sortit le livre de sa poche.
- Reconnaissez-vous ceci ? demanda-t-il.
Hortense se pencha.
- Bien sûr, répondit-elle. C'est un bouquin à Félicie. Elle l'avait acheté à Vernissard, en janvier, au café-tabac que tenait Amédée Filoup qu'est mort maintenant, tout d'un coup, d'une "infection du jeu de cartes".
- Comment ? fit Belhomme, étonné.
- Enfin, je sais point trop. C'est des mots de médecine.
Belhomme songea à l'infarctus du myocarde.
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