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Critique de StCyr


StCyr
09 février 2016
En ces temps de détente relative dans les rapports entre les Etats-Unis et Cuba, voici une autobiographie qui devrait retenir toute l'attention du lecteur avisé.

Reinaldo Arenas fut un opposant au régime de Cuba; il mit fin à ses jours à l'âge de quarante-sept ans, exilé à New-York, épuisé par le sida, en proie à une profonde dépression, à la solitude, et incapable de poursuivre plus avant sa mission d'écrivain engagé. La reproduction de la lettre d'adieu, en fin de volume, et particulièrement émouvante à ce titre. Né dans un milieu paysans des plus pauvre, mais libre de part sa proximité avec la nature, Arenas vécu une enfance qu'on ne peut qualifier de malheureuse, dans un milieu matriarcale, dont les femmes, à commencer par sa mère, furent abandonnées par des maris peu concernés par leur devoir de père. Enfant de la nature, très tôt son esprit et sa personnalité furent influencés par son environnement, par le mysticisme et la forte personnalité de sa grand-mère, par le fantastique émanant des forêts qui l'entouraient, par la sexualité omniprésente et la violence perpétuelle du monde paysan. Puis vint la révolution, une guerre remportée sans véritable combat, Batista ayant pris la fuite. Ce furent le temps des purges, des exécutions sommaires, des procès à grande audience prenant la forme d'humiliations publiques, des camps de concentration pour les personnes ne rentrant pas dans le moule puritain et machiste du castrisme, du "paramétrage" ou marginalisation des artistes dissidents ou originaux, des travaux forcés dans les plantations agricoles, ainsi que des queues interminables pour les actes les plus bénins de la vie courante. Il fallait se défier de ses amis, de sa famille, ils pouvaient être des agents ou des informateurs de la sûreté de l'état. Arenas subit comme les jeunes cubains de sa génération l'endoctrinement en règle selon l'orthodoxie Marxiste-Léniniste auquel était soumis les étudiants, afin de devenir l'avant garde de la révolution cubaine. Toute manifestation de tendances homosexuelles était durement réprimée mais de telles pratiques avaient bien cours malgré cela. Puis vinrent les premiers essais de poésie, l'emploi à la Bibliothèque nationale, décisif pour sa formation d'écrivain, la tutelle bienveillante de Virgilio Piñera, l'amitié de Lezama Lima, mais aussi l'opposition d' Alejo Carpentier, homme lige du régime. Enfin, il y eu les infructueuses tentatives de fuite, la vie de fugitif, la détention dans les geôles du castrisme, dernier cercle de l'enfer; la libération toute relative, ainsi que les innombrables essais pour obtenir l'asile, enfin la fuite inespérée et providentielle, la liberté décevante de Miami, de New York.

Hormis la description de la vie sous la dictature, des plus intéressante, le sujet, central, omniprésent, inhérent à la personnalité de l'auteur, est celui de l'homosexualité : Arenas confie avec délectation ses innombrables aventures - et mésaventures sexuelles, les lieux insolites, théâtres de ses ébats, l'appétit impérieux et insatiable qu'on assouvi malgré les risques de représailles. le livre offre aussi un vaste panorama du monde des arts et de la vie interlope cubaine durant les vingt premières années de la dictature castriste. Avant la nuit fut une lecture passionnante, poignante et qu'on ne peut oublier. Un témoignage fort et important d'une lutte de toute une vie, celle de la liberté d'être soi-même et de se tenir debout sans compromission face à l'intolérable tyrannie.
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