L'expédition de Sicile vient de s'achever par la catastrophe que l'on sait: navires arraisonnés ou détruits, Grecs emprisonnés dans les terribles Latomies, cette prison à ciel ouvert, stratèges morts....
En effet, le bel Alcibiade, compromis dans un scandale de profanation de statues (déjà...les profanateurs de lieux saints ont des précédents célèbres..), a dû fuir Athènes (et la mort qui l'attendait ) en toute hâte...Mais pas fuir n'importe où: chez l'ennemi, à Sparte..il a obligeamment été cafter ses petits copains, en route pour la Sicile sous la houlette de Nicias,...Inutile de dire si l'accueil de Nicias par les Lacédémoniens a été chaleureux...
C'est dans ce contexte terrible que ce vieux réac' sympa d'
Aristophane, grand pourfendeur de démocratie déliquescente, écrit
les Oiseaux.
Pas un mot ici contre Nicias, son expédition calamiteuse, ni même contre ce petit salopard d'Alcibiade: comme les autres Athéniens,
Aristophane sait que cela sent la fin, que la guerre est perdue : on ne tire pas sur une ambulance...
Alors il fait appel à toute son imagination, à toute sa fantaisie,à toute sa créativité et il écrit
Les Oiseaux. Une utopie. Où il rêve d'un monde meilleur, d'une cité idéale à créer avec un peu d'astuce et de culot.
Du culot et de l'astuce, ils en ont à revendre, Pisthétairos( Bon-Pote) et Evelpidès ( Bel-Espoir), deux Athéniens qui fuient les tracasseries administratives d'Athènes en suivant les criailleries d'un choucas et d'une corneille achetés au marché aux oiseaux et qui sont censés les emmener au royaume des Oiseaux.
Mais quelle déception, ce royaume est un vrai...miroir aux alouettes: rien de sérieux, d'organisé..ça volette par-ci, ça caquète par-là...
Alors ils se muent en consultants et proposent aux oiseaux quelques idées géniales pour instaurer un royaume digne de ce nom, entre ciel et terre, et, pour s'assurer à la fois la maîtrise de l'une et de l'autre, ils érigent un Mur( ça, ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd...) où les hommes et les dieux devront acquitter un péage (décidément, quelle mine d'idées nouvelles...) si les hommes, d'un côté, veulent faire monter vers les dieux les fumées de leurs sacrifices ou si les dieux, de leur côté, veulent descendre en érection forniquer avec les mortelles (
Aristophane est quelqu'un d'assez direct..)
Reste à persuader
les Oiseaux eux-mêmes, qui sont un peuple assez ...volage et tête en l'air, de leur propre importance... Bon-Pote se lance alors dans une parodie -géniale- des théogonies à la manière d'
Hésiode, et imagine ex abrupto une Ornithogénèse sublime, et à mourir de rire!!
Les Oiseaux sont convaincus... Sitôt la ville érigée, commencent à affluer les pique-assiette de tout...poil, les renégats et damnés de la terre qui demandent asile. Comme un certain Rocard,
les oiseaux pensent qu'ils ne peuvent pas accueillir toute la misère du monde...
Les Dieux non plus ne l'entendent pas de cette oreille et dépêchent illico Heraklès -qui est mort de faim- , Poséidon qui ne plaisante pas avec le polythéisme, et un dieu Barbare qui parle un grec à coucher dehors et ne comprend rien à ce qu'on lui raconte...
Je vous laisse découvrir comment tout cela se termine...Si la traduction est bonne, vous rirez à gorge déployée, et si vous êtes un peu férus d'histoire et de culture grecques, vous boirez du petit lait (de poule)!