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Lucien Mercier (Traducteur)Hélios Jaime Ramirez (Préfacier, etc.)
EAN : 9782714427847
Belfond (18/03/1998)
4/5   16 notes
Résumé :

Le jouet enragé, premier roman de Roberto Arlt publié en 1926, marque la naissance de la littérature urbaine argentine et préfigure hallucinée des Sept fous (1929) et des Lance-flammes (1931).

En marge de tous les mouvements littéraires de son époque, Arlt (1900-1942), écrivain-baroque et visionnaire, y peignait une Buenos Aires fantasmagorique livrée au crime et à la prostitutiion, peuplée de déments et agitée de noirs complots.
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Je pense que je préférais Roberto Arlt quand il inventait une intrigue tournant autour d'une société secrète, avec le mystère et tout… La danse du feu m'a laissé de glace. Et pourtant il y est question de l'ardeur de la passion. Mais le problème (selon moi), c'est davantage le style de l'auteur que l'intrigue elle-même. L'histoire commence alors que le narrateur, amoureux fou d'Irène, rencontre la mère de cette dernière et ça ne se passe pas particulièrement bien. C'est que, voyez-vous, il est déjà marié à une autre et Irène est mineure ! Bon, la jeune fille n'est pas une petite Lolita, il s'agit presque d'une femme, 17 ans. Ça n'excuse rien, j'en conviens. Quoiqu'il en soit, il semble que l'amour soit réciproque. Comme point de départ, c'est assez réussi. Là où j'ai moins accroché, c'est que l'intrigue est lente à se développer et que les longueurs s'accumulent. Ajoutez à cela que le personnage principal, cet anti-héros, ne se démarque pas particulièrement.

Ce premier chapitre clos, retour en arrière, question de bien comprendre cette intrigue amoureuse. le narrateur croise ladite Irène, en fait, il ne lui parle pas, il reste là, impuissant et déjà épris, à la regarder passer et disparaître dans le flot des voyageurs de Buenos Aires. S'ensuit plusieurs mois – ou quelques années, je ne me rappelle plus – au cours desquelles il se remet beaucoup en question. Lui, un homme d'âge mur, avec femme et enfants, un boulot qui ne le satisfait plus, blablabla. Et elle dure, la vie ! Puis, par un heureux concours des circonstances, Irène retrouve sa trace. Les deux devront affronter mer et monde – et belle-mère, et ex-épouse et conventions sociales et difficultés économiques et… - pour rester unis. J'ai compris tardivement le sens du titre, La danse du feu, qui fait référence à un morceau de musique qu'elle joue au piano pour lui.

Évidemment, il s'agit d'un roman de Roberto Arlt, alors les choses ne pouvaient pas finir aussi bien. Il fallait complexifier cette histoire qui est surtout un prétexte pour aborder des questions existencielles. Qu'est-ce que l'amour ? Et le bonheur ? Peut-on vraiment y accéder ? À quel prix ? Faut-il vraiment choisir entre la passion dévorante et la tranquilité familiale ? Et qui de mieux pour réfléchir à tout cela qu'un homme finalement bien ordinaire, peut-être banal, voire ridicule. N'est-ce pas ainsi que les autres le voient et le jugent ? La capacité de l'auteur à sonder l'âme humaine m'étonne toujours, surtout qu'il y procède à partir de personnages monsieur-madame-tout-le-monde (qui espèrent toujours que quelque chose d'extraordinaire va arriver) et de thèmes assez anodins. Exit les grands drames avec les héros au destin exceptionnel, que du monde réel ! Finalement, en écrivant cette critique, je me rends compte que j'ai bien aimé ce roman.
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Ce livre La danse du feu a été écrit en 1932 dans un contexte de modernisation de l'Argentine, entamée à la fin du 19ème siècle et qui a vu l'apparition de grandes concentrations urbaines avec l'émergence d'une classe moyenne et d'une catégorie ouvrière. de même pour la culture argentine avec une frénésie journaliste et éditoriale et une accélération de la circulation des valeurs culturelles ouvertes aux influences européennes et nord américaines. C'est ainsi qu'en Argentine la ville va faire le romancier.
Apparait alors une réflexion chez les intellectuels argentins sur le citadin isolé, individualisé, son vide spirituel et la relativisation de ses valeurs, mais avec un optimisme affiché concernant l'avenir comme source d'un nouvel Argentin, synthèse et somme d'un cosmopolitisme historique et culturel propre à l'Amérique Latine. La crise de 1929 et la "décade infâme" des régimes autoritaires vont voir émerger la génération narrative de Roberto Arlt : celle issue des désillusions de la petite bourgeoisie progressiste qui va se recroqueviller sur ses intérêts immédiats et ses angoisses existentielles.
Avec La danse du feu, pour la première fois un écrivain met à nu la structure de la petite bourgeoisie argentine s'attaquant à son noyau le plus sacré : la famille et le couple, avec une causticité inédite.

Dans un style feuilletonnesque parsemé de fragments théâtraux, Roberto Arlt narre la tragi-comédie d'Estanislao Balder, un ingénieur d'une trentaine d'années, marié et père d'un enfant, qui pour échapper à la fadeur de son existence s'éprend d'une jeune étudiante de dix-sept ans qui relève plus du fantasme de Balder que d'un véritable personnage. On devine avec Arlt qui peut avoir le dessus entre la force des conventions sociales, la médiocrité d'un homme velléitaire amoureux et une jeune fille dont la mère est soucieuse d'assurer l'avenir tout en exploitant les désirs du soupirant : le pragmatisme social s'impose au détriment des sentiments.

Si Roberto Arlt critique de façon acerbe le mariage et la fidélité domestique, ses conventions hypocrites et l'institution familiale comme promesse de bonheur, il n'hésite pas à dénoncer la médiocrité et le conformisme de l'ensemble de la société urbaine argentine au travers d'un Balder convenu, égoïste mais lucide et critique sur sa vie, cependant incapable d'opérer un quelconque changement existentiel. le récit se déroule dans un vertige de réticences, d'ambiguïtés, de mensonges et de renoncements, dans un jeu pervers entre tensions des désirs individuels et puissance des convenances collectives.
Ce roman La danse du feu fait écho à "Las aguafuertes porteñas", rubrique que tenait Roberto Arlt dans le journal argentin El Mundo, où le thème des relations amoureuses des Portègnes occupait une place essentielle et où l'auteur y a écrit : "les traditions socialement acceptées et le contrat de mariage ne servent qu'à dissimuler les conditions de la propriété et de la production capitaliste que la morale et les bonnes moeurs administrent".
Lien : https://tandisquemoiquatrenu..
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"La danse du feu" approfondit les rapports des sexes à Buenos Aires dans les années 1900 à 1920.

Le narrateur, Balder, est un homme marié de 27 ans qui rêve d'une autre vie et noue une idylle avec une petite bourgeoise de 17 ans, Irène.

Il hésite : divorcer pour elle, ne pas divorcer ? L'entourage de la jeune fille le presse de clarifier sa situation, et lui se lance dans une valse hésitation un peu lassante, à force.

Avec moins de brio, et un style moins limpide, ce roman semble très inspiré par la série "Les jeunes filles" De Montherlant : (conférer mon erratum ajouté en commentaire, Babelio ne me permettent pas de le caser ici) : même époque, mêmes enjeux, même mépris des femmes et de la société bourgeoise, et pourtant, même conformisme un peu rampant tant de Costals, l'écrivain velléitaire, que de Balder, l'ingénieur. On est étonnée de la sempiternelle rumination du personnage tout au long du livre : "saura-t-elle me rendre heureux ?" et non "saurai-je la rendre heureuse ?" ... "Est-ce que je vais perdre quelque chose en divorçant ?" et jamais "Que vont devenir mon fils et ma femme si je divorce ?" (le divorce était encore infamant et les épouses sans moyen de vivre).

Notons que sa femme est une épouse parfaite, mais justement de ce fait très "oie stupide" selon les jugements lapidaires de Balder. Notons aussi qu'il ne tolèrerait pas non plus une épouse plus affranchie. La jeune Irène le fascine parce qu'elle est un sphynx silencieux. Qui est-elle ? Un ange ou une cruche, un lys ou une hypocrite ? L'aime-t-elle ? Il l'ignore et s'en soucie peu : ce qui compte, c'est qu'elle ne parle pas, ne raisonne pas, ne s'épanche pas : le silence permet l'idéalisation.

Ce dont en revanche il est (presque) certain, c'est que le mariage la transformerait en femme quelconque, aussi limitée et ennuyeuse que les autres.

Alors que faire ? Renoncer ? Mais le quotidien est subalterne, on risque de s'y enliser, et de devenir aussi médiocre que les autres (car Balder comme Costals s'estiment supérieurs à tous, du moins virtuellement).

Comme Montherlant, Roberto Arlt fait ressortir, à travers un regard masculin moins malveillant toutefois que celui de l'homme de lettres français, l'asservissement réciproque de l'homme et de la femme par les conventions bourgeoises. Les maris sont aigris par le caractère sordide des multiples liaisons extra-conjugales qu'ils enchaînent, et les épouses déclinent à force d'exercer leurs capacités dans le quotidien, l'enfermement et le minuscule.

Les hommes : des rêveurs velléitaires et encanaillés ; les femmes : des araignées en embuscade guettant leur proie.

On reconnaît de nombreux comportements encore en vigueur aujourd'hui, car si le ciment qui corsète les êtres s'est un peu fissuré, laissant par endroit des interstices par où respirer, il est encore bien présent.

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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
La lecture des romans m'avait inspiré une conception en quelque sorte dionysiaque de la passion.
L'amour excédait les limites du devoir. C'était un char de feu qui arrachait l'homme à la surface de la terre, l'installait sur les cimes de l'hallucination.
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L'homme, en quelque extrémité que ce soit de la passion, offre un champ d'observation remarquable, pour peu que ses confessions permettent de décrire ces excès mêmes.
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Le malheur, c'est que les humains soient si peu raisonnables. La vie ne serait-elle pas plus fraternelle et harmonieuse si chacun s'en allait de son côté le jour où il en aurait envie?
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Mes collègues m'étaient odieux et, quand je ne les haïssais pas, c'était pour les observer avec une méprisante ironie.
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Si attaché que l'on soit à la conception matérialiste de l'existence, on ne peut que s'étonner parfois de la somme de contradictions mises en jeu, dans le mécanisme psychologique de l'être humain, par la grise monotonie de la ville. L'individu atteint en certains cas à un tel degré de raffinement dans l'étrangeté de ses orientations mentales qu'on en arrive à se demander s'il n'existerait pas, indépendamment de la matière, un esprit subtil qui agirait, auprès des organes de perception immédiate, comme un détecteur de faits à venir. (page 61)
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