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Anthéa vit une enfance paisible et heureuse dans un village bamiléké, au Cameroun. Des parents aimants, sa cousine, Diane, avec qui elle passe le plus clair de son temps. Seule ombre au tableau : l'école au coeur de laquelle elle ne trouve pas sa place. Elle peine pour apprendre, ne comprend pas tout ce que son professeur dit. Heureusement, le mardi, elle ne s'y rend pas. Fille aînée d'une fratrie de quatre enfants, elle doit aider sa maman à vendre les quelques légumes au marché. Elle se sent utile et sait vendre avec le sourire. C'est ici qu'elle fait la connaissance de la dame blanche. Pendant des mois, elle vient lui acheter des avocats qu'elle trouve si bons. Des sourires, des bonbons offerts... par petites touches, elle s'approche gentiment de la jeune fille. Un soir, alors qu'elle n'a que 12 ans, ses parents tiennent à lui parler. La dame blanche veut l'emmener en France avec elle afin de lui offrir un meilleur avenir. Une proposition que les parents d'Anthéa ont acceptée...

"La proie", voilà un titre explicite qui ne fait aucun doute quant au devenir d'Anthéa... Car la proie, c'est bien elle. Promise à un avenir meilleur dans un pays industrialisé, au sein d'une famille à l'apparence gentille et bienveillante, la jeune fille va découvrir, petit à petit, l'envers du décor. Si elle accepte volontiers, dès le début, de prêter main forte à toute la famille en s'occupant des deux enfants ou aidant à la cuisine, la liste des tâches va peu à peu s'allonger. Comment se sortir de ce gouffre ? Comment s'imposer ? Comment ne pas briser les doux rêves qui peuplent son enfance au Cameroun et l'espoir de ses parents ? À une première partie très lumineuse, où insouciance, rires, histoires et chants s'entremêlent, s'ensuit une autre beaucoup plus sombre où règnent la tension, la violence, l'enfermement. Si le sujet de l'esclavage domestique, auquel s'ajoutent également le racisme et le néocolonialisme, est peu commun dans la littérature jeunesse, Philippe Arnaud le traite ici avec beaucoup de réalisme et d'émotions. Il rend parfaitement palpables les sentiments qui habitent Anthéa. Un roman fort et bouleversant...

D'après les estimations du Global Slavery Index, 129 000 personnes sont victimes d'esclavage moderne en France en 2018. On estime à plus de 150 millions le nombre d'enfants soumis au travail forcé.
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Et dire que ça existe ! Et dire que des familles bourgeoises, éduquées, des familles de diplomates, aussi, exploitent honteusement des étrangers démunis et les font ployer sous le joug de l'esclavage !

Ce roman pour la jeunesse, ayant reçu en Belgique le prix Farniente 2021 décerné par les jeunes dans la catégorie 15+, nous raconte l'histoire d'Anthéa, Camerounaise de 13 ans emmenée « pour son bien et celui de sa famille » en France.
Ah la France ! Pays qui cristallise les rêves de nombreux Africains, mais qui les divise, aussi. N'empêche, le papa d'Anthéa est heureux de lui offrir un avenir …
Mais entre le désir paternel et la réalité qui attendra la jeune fille, il y a une distance énorme.
Petit à petit, Anthéa sera contaminée par l'ambiance délétère de cette famille bien sous tous les rapports, mais qui dans l'intimité se révèle pourrie. Anthéa erre pendant plusieurs années entre l'alcoolisme de la mère et la violence psychologique puis physique du père, elle tente tant bien que mal de se raccrocher à ses racines en dessinant, en sculptant un morceau de glaise caché sous son lit, en décrivant ses rêves, ou plutôt ses cauchemars. Ceux-ci vont prendre toute la place, mais heureusement, tout n'est pas corrompu sous le ciel du Nord…

J'ai beaucoup aimé suivre la ligne de vie d'Anthéa, belle jeune fille courageuse plongée dans le monde de Blancs malsains sans l'avoir voulu. Je suis certaine que cette lecture touchera les élèves, ignorants de cette sombre réalité, d'autant plus que le style est bien élaboré et ne pêche pas par excès de simplicité, comme souvent dans les romans pour les jeunes.

A lire donc pour ne pas se voiler la face.
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Coup de coeur!
Snif snif snif…
Ce roman jeunesse met très mal à l'aise. Je ne suis pas sûre qu'il peut être lu par tous les adolescents ou un tranche d'âge un peu avancée.
Certes le roman reste subtile mais on subit toute la souffrance d'Athéa.
Un roman qui décrit une triste réalité. Une réalité qui dérange.
La proie est un roman qui frappe fort. Un roman qui tisse sa toile doucement. J'ai eu beaucoup de mal d'ailleurs au début de ma lecture. L'héroïne nous décrit son pays d'origine avec beaucoup de candeur, un pays idyllique…. et petit à petit cette vérité va nous déranger. Partir en France pour étudier est une aubaine et cela sous la bienveillance d'une gentille petite famille française.
Mais la réalité est tout autre et Anthéa va nous décrire son calvaire. L'étau se referme autour d'elle…
Je ne m'attendais pas à un tel récit. J'en suis sortie meurtrie. L'auteur dénonce une réalité glaçante. Un gros coup de coeur!
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Tout commence comme dans un rêve coloré.
Anthéa une fillette de 12 ans vit dans un petit village du pays bamiléké au Cameroun.
Théa n'est pas brillante à l'école malgré toute sa bonne volonté mais la nature l'a dotée d'une imagination débordante, en plus de sa beauté fascinante.
Depuis peu, Théa est devenue conteuse. Mue par une force mystérieuse, celle que l'on surnomme désormais « la petite mère » a découvert le pouvoir des mots qui se révèle à travers les histoires qu'elle raconte avec passion devant des enfants subjugués, à l'ombre du kolatier.
Sous son impulsion, la magie opère et les personnages prennent vie, se matérialisent sous la forme de figurines qu'elle sculpte dans la terre rouge qu'elle affectionne tant.

Tous les mardis, Théa aide sa mère sur le marché. Une étrangère, une « dame blanche » aisée qu'elle croise régulièrement, s'apprête à rentrer en France avec son mari et ses deux enfants. Christine propose de l'emmener pour lui offrir une meilleure éducation, en échange d'un peu d'aide et de baby-sitting.

Cela aurait pu être un merveilleux conte de fées, une chance inespérée mais le titre est sans équivoque : Théa devient une proie.

Dès son arrivée à Paris, tout change.
Au mal du pays, s'ajoute la morsure de l'exil et le choc des cultures.
Tout va trop vite dans cette nouvelle vie au coeur d'un foyer instable sous la domination de Stéphane, le père de famille.
Le sentiment de ne pas être à sa place et surtout la honte de décevoir sa famille la tétanise et la réduit au silence. le piège se referme inexorablement.

Dans la première partie, Théa évoque avec innocence et naïveté son enfance au Cameroun, peuplée de ses histoires extraordinaires, de l'amour de ses parents, du rire de sa meilleure amie Diane, du regard énigmatique de Samuel, son amoureux discret.

Le temps de la liberté et des rêves est bien révolu avec son arrivée en France qui marque un tournant brutal. le ton change radicalement. C'est l'engrenage et la chute progressive dans l'esclavage domestique. Théa doit affronter les remarques insidieuses sur son devoir de « payer son voyage », la privation de liberté, le racisme. Sa beauté est loin d'être une alliée face à la violence des enfants et des adultes. Que l'Afrique lui parait lointaine et inaccessible !

Classé roman jeunesse, ce roman s'adresse néanmoins aux adolescents avertis et aux adultes. Dur et poignant, il frappe surtout par son réalisme et par le courage de la jeune Théa qui affronte seule son destin.

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Un roman jeunesse qui est un hymne à la liberté et à la lutte contre les préjugés raciaux.

« Etudie, ma fille. Je veux que tu puisses vivre sans avoir besoin d'un mari. Que tu sois libre ». Cette déclaration d'un papa camerounais à sa fille de huit ans parait aller à l'encontre de la culture du pays.

Anthéa a huit ans lorsque l'on fait sa connaissance au Cameroun. Aux yeux des gens, elle est douce, tranquille, sérieuse, le contraire de sa cousine Diane. A mes yeux, je rajouterais docile et un peu effacée. Elle va à l'école, sauf le mardi. C'est jour de marché et elle doit aider sa maman à vendre les fruits et légumes. de ce fait, elle accumule du retard scolaire. C'est l'aînée de la famille, elle s'occupe de ses petits frères, c'est ainsi dans la tradition camerounaise. Anthéa n'aime pas l'école, mais elle chérit sa culture, sa famille, sa liberté, même si tout n'est pas toujours rose autour d'elle. Et puis, elle grandit, elle embellit, son corps change. Fini le temps de l'insouciance. le 23 avril 2010, c'est le jour où tout change pour elle. Elle a 12 ans et son père lui annonce qu'elle va partir en France vivre chez un couple de blancs, des français. Ses parents l'aiment de tout coeur, mais leur situation financière a eu raison de leur amour. Comme beaucoup d'africains, ils pensent qu'en France, c'est l'eldorado. Leur fille pourra y poursuivre ses études, apprendre un métier, et les aider financièrement. Et puis, ils connaissent le couple avec qui Anthéa va repartir. le mari et sa femme sont arrivés il y a deux ans, pour une mission professionnelle. La femme est une cliente régulière du marché, elle achète les fruits et légumes de la maman et prend parfois le temps de discuter un peu. Ils ont deux enfants, un garçon à peine plus jeune qu'Anthéa, et une petite fille. C'est une famille perçue comme modèle, idéale et en plus, aisée de surcroît. Autour d'elle, Anthéa fait des envieux. Car aux yeux de tous, la France est le but ultime, le rêve de tout africain. Mais voilà, le rêve va tourner au cauchemar. Déjà, pour Anthéa, il lui faut s'habituer à une nouvelle culture, un nouvel environnement. L'insolence des ados envers leurs professeurs et leurs parents, elle n'y est pas habituée. Et puis surtout, le changement de comportement des adultes chez qui elle loge. Eux qui paraissaient si calmes et bienveillants au Cameroun changent radicalement d'attitude, face au rythme effréné de la vie parisienne, au stress engendré par leurs problèmes de couple que leur séjour au Cameroun n'a pas réglé, mais surtout face à certains préjugés tenaces. Des siècles après l'abolition de l'esclavage, certains persistent encore dans cette idée de race inférieure, d'humains destinés servilement à l'accomplissement des tâches domestiques… Car c'est ce que va vivre Anthéa, un état de servitude.

"- « Esclavage ? »
- le mot te choque ? Tu as perçu un salaire pour ce que tu as fait chez eux ? Privée de liberté, de papiers, mise à leur service jour et nuit. Tu appellerais ça comment ?
- Il y en a d'autres alors…des cas comme moi ?
- Oui. Sans doute beaucoup, et ça n'intéresse pas grand monde. On est dans le pays des Droits de l'Homme, circulez, y'a rien à voir."

Il est grand temps d'abolir dans les esprits récalcitrants ce lieu commun : Noir = esclave...UN AFRICAIN NE NAIT PAS POUR ETRE ESCLAVE !!! L'apartheid, la traite des noirs, l'esclavage, c'est terminé !

La douce Anthéa, effacée, qui ose à peine se rebeller. En France, ce n'est pas la liberté qu'elle a trouvé, mais la captivité. Seule, noire, étrangère… c'est une proie, une proie facile, « la proie », comme d'autres l'ont été avant elle et le seront après elle. La couverture, que je trouve superbe, met en valeur cette jeune fille africaine qui rêve d'évasion, de son pays natale, de sa montagne, des siens. Elle n'aura d'autres choix que de puiser dans ses ressources pour apprendre à s'affirmer et à ne pas laisser les autres la soumettre comme une moins que rien. Elle va se battre pour retrouver sa liberté, on assiste à l'évolution de sa personnalité qui fera d'elle une femme décidée.
Après avoir terminé le récit, j'ai relu le prologue, où il est question d'une fourmi traquée par un enfant, qu'Anthéa observe à 4 ans et qu'elle espère vivante. Une fourmi qui lui servira de fil conducteur entre le Cameroun et la France. Cette anecdote prend tout son sens une fois le roman achevé. Car cette fourmi, c'est Anthéa…

C'est un roman jeunesse qui peut être exploité avec des ados sur plusieurs points (là, c'est la doc qui parle) : la France vue par les étrangers, ce « pays où l'argent pousse sur les arbres » ; puis ce qu'elle est dans la réalité, comment les élèves, qui y vivent, la perçoivent. Des discussions sur la culture africaine, la tolérance, l'acceptation de l'autre et surtout de l'étranger peuvent aussi être menées.

Comment amener les ados à la lecture de ce livre ? Une playlist aux styles divers et variés (jazz, rock, soul…) accompagne chaque partie du roman. Des sons connus, tel « Think » d'Aretha Franklin, et moins connus, au rythme africain qui réjouira les classes multiculturelles. Quand la musique sert de passerelle à la lecture… Quant à moi, j'ai découvert une petite merveille, « Say yes », d'Iyeoka, une jolie ballade amoureuse qui colle parfaitement à l'esprit de la dernière partie du roman.

A partir de 14-15 ans, et pour les adultes aussi bien sûr!
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Un très beau roman, à lire absolument. À la fois attendu et très inattendu.

Je souhaitais le lire car le sujet de l'esclavage domestique moderne m'intéresse. J'en ai lu quelques autres, et j'étais curieuse de découvrir celui-ci. Il en vaut vraiment la peine. Un des meilleurs que j'ai lu sur le sujet.
On n'oubliera pas Anthéa de si tôt.

J'ai apprécié les trois parties de ce livre.

D'abord, nous découvrons la vie d'Anthéa au Cameroun, dans son village. On la rencontre toute petite, avec sa cousine, on la voit grandir, dans une famille aimante, avec un père très bienveillant.
Cette partie donne beaucoup d'intérêt à ce roman, car on s'attache vraiment à la fillette, et on apprend à connaître sa vie, ses espoirs, un pays qui pour moi est très loin de ce que je connais. Un début tout en douceur dans une Afrique intemporelle et comme apaisée.
On voit le lent mais inexorable cheminement qui va l'amener jusqu'en Europe, totalement contre son gré.
On comprend qu'ici, il ne s'agit pas de "vendre" leur fille, mais bien de lui offrir un maximum de chance, alors qu'elle va leur manquer, aînée et seule fille.
Anthéa a beaucoup de mal à l'école, une école pas vraiment à la hauteur, et voilà qu'on lui propose de partir en France, dont presque tous rêvent là-bas, pour suivre des cours mieux adaptés, pour lui donner une chance dans la vie.
Mais Anthéa, elle ne rêvait pas de la France, ni de l'école. Sa vie est au Cameroun, et puis, elle est artiste, aussi douée pour conter que pour sculpter ou dessiner. Rien qui ne soit adapté à ce qu'on va lui demander.

Arrivée en France, on sait très vite que ça va mal tourner, mais cette famille est vraiment atypique par rapport à d'autres histoires.
On s'attend à trouver une riche famille où tous sont d'accord pour profiter au maximum de la présence d'une servante gratuite, entraînés par la mère.
Alors qu'ici ... non, je ne vais pas vous raconter la suite tout de même, vu que vous allez forcément le lire. Mais j'ai été très surprise.
Avec des personnages secondaires forts, comme cette grand-mère qui s'occupe assez curieusement de ses petits-enfants.

L'histoire va monter dans l'angoisse peu à peu, et parce qu'on voit à travers les yeux d'Anthéa, on espère presque jusqu'au bout que ce sera une belle histoire. Parce qu'elle n'a pas une once de méchanceté en elle, elle veut toujours croire à la gentillesse des autres, et toujours leur laisser le bénéfice du doute.
Si ça ne va pas, elle pense d'abord que c'est sa faute, avant tout. Difficile de se rebeller dans ces conditions.

La troisième partie, fait chaud au coeur, et ça fait vraiment du bien, après ce qu'on vient de lire. de l'amitié, de la chaleur humaine.

Bref, j'ai vraiment tout aimé dans ce livre, sauf son titre. Je trouve qu'il fait plus penser à un thriller, à une histoire qui va s'amuser à nous faire peur. Je n'aurais pas choisi ce livre si je n'avais pas su le sujet d'abord ; et ça aurait été bien dommage.

Par contre, la couverture est superbe.

Je n'ai hélas pas suivi la bande son proposée, ça doit être intéressant de l'écouter en parallèle de la lecture.

J'ai un peu de mal à parler de ce livre, parce que c'est un texte très fort et très beau, mais dont je ne voudrais pas trop dévoiler.
Merci à Philippe Arnaud, au-delà du thème principal si important, de nous faire partager son amour du Cameroun.
Lien : https://livresjeunessejangel..
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Anthéa, la douce, la gentille, la sérieuse, vit au Cameroun. Elle rentre de l'école avec sa cousine Diane, la turbulente, la joyeuse, la volubile. Elle n'est pas indifférente au très timide Samuel mais surtout elle se concentre sur l'école car elle n'y comprends rien, n'y arrive pas et subit les humiliations d'un maître très peu pédagogue.
Une dame française, la dame blanche, vient souvent au marché où Anthéa aide sa mère et se lie peu à peu avec elles, jusqu'au jour où celle-ci leur propose d'emmener Anthéa en France pour qu'elle y fasse de bonnes études.
Le cauchemar commence, l'insouciance de sa vie d'enfant est bien terminée.
Un roman "ouah", dur, triste, mais aussi réaliste et juste. C'est le 2e livre que je lis sur l'esclavagisme moderne et j'ai été totalement sous le choc car la montée de la peur, l'incompréhension de ce qui se passe, nous le vivons avec Anthéa.
J'ai adoré la partie Camerounaise, c'est beau, j'avais l'impression d'y être, de sentir les épices, la terre rouge. La partie française m'a prise au tripes et évidemment à la fin j'ai pleuré.
Quelle réussite ! Bravo à l'auteur et merci à Babelio et Sarbacane pour l'envoi de ce titre.
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La proie est une histoire d'enfermement, d'emprisonnement, de mise en esclavage (tant physique que psychologique) d'une jeune camerounaise par un couple de français. Histoire glaçante tellement elle pourrait être vraie.
Anthéa, ou plus simplement Théa, mène une vie simple mais heureuse au Cameroun. Elle est une bonne fille, obéissante, qui s'occupe des petits, qui aide sa mère au marché, qui va à l'école, même si on comprend vite que l'école ne lui permet pas de s'épanouir, qu'elle n'y comprend pas grand chose. Théa à d'autres talents. Conteuse pour les enfants de son village, dans la pure tradition des griots, sculptrice, dessinatrice … C'est dans l'art qu'elle s'épanouit. Et puis Théa grandit, et l'on sent qu'elle va devenir une superbe jeune fille. le regard de tous change. Au marché, il y a une blanche, une française, qui vient toujours acheter avocats et mangues à la mère de Théa. Et puis de fil en aiguille, de discussion en discussion, une étrange proposition est faite par cette blanche aux parents de Théa : la ramener en France, avec eux, la scolariser là-bas pour lui donner le meilleur départ possible dans la vie. Les parents acceptent ce marché, et Théa obéit comme la bonne fille qu'elle est. Vous imaginez bien, la France ! Pays des droits de l'Homme, sorte d'Eldorado moderne
A partir de ce moment, c'est la très lente et très insidieuse descente aux enfers de Théa qui nous est donnée à voir. Et ça fait froid dans le dos. On voit le piège se refermer sur Théa sans que cette dernière ne puisse rien faire. La coupure progressive de tous. L'interdiction de sortir. Et puis l'indicible. Esclave ménagère, sexuelle aussi. Les personnages qui composent la famille d'accueil (si on peut dire) de Théa sont tous intéressants. du père, appartenant visiblement à la catégorie des “pervers narcissiques” à la mère dépressive en passant par les enfants qui réagissent chacun comme ils peuvent à la situation, tout sonne juste.
La plume de Philippe Arnaud, que je ne connaissais pas, est particulièrement efficace. Un roman fort et un auteur à suivre.
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Anthéa vit au Cameroun. Si elle a des difficultés à l'école, elle est douée pour le dessin, le chant et pour conter. Au marché, où elle aide sa mère, elle croise une famille de français expatriés. Ils proposent de l'emmener en France pour la scolariser et lui offrir « un meilleur avenir ». Croyant bien faire ses parents consentent. Au début elle doit s'occuper des enfants puis des tâches ménagères, puis viennent les brimades et les reproches incessants. L'auteur nous décrit avec talent l'angoisse et la peur qui montent jusqu'à l'insupportable. Anthéa va puiser sa force dans ses souvenirs mêlés de contes, d'esprits, de senteurs… pour endurer le pire. Un roman fort sur l'esclavage moderne.
La Proie est LE roman à lire pour s’informer et comprendre un sujet aussi fort que l’esclavage moderne. Loin d’être larmoyante au contraire, l’héroïne Anthéa est combative : sa culture camerounaise, sa famille et ses souvenirs sont sa force. Philippe Arnaud a construit son récit comme un thriller, la tension est progressive et nous tient jusqu’à la dernière page.
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Je ne m'attendais pas à ça.
Pas du tout, du tout à ça.

Et le moins que l'on puisse dire, c'est que c'était pas mal du tout.
Voire très bien.

Allez savoir pourquoi, on se met parfois de drôles d'idées en tête avant d'ouvrir un livre.
Pour ma part, j'étais persuadée que La Proie allait se révéler être un roman fantastique, ou au moins un récit avec une part de merveilleux ou d'imaginaire.

Quelle ne fut donc pas ma surprise lorsque j'ai découvert un récit contemporain glaçant de tension, de dangers qui taisent leur nom et d'étouffantes relations de domination.

La Proie est un récit au long cours, de longue haleine, qui s'appréhende petit à petit et évolue au fil des pages. Il démarre doucement, dans un décor dépaysant, avec une histoire qui n'a pas l'air pressée de s'emballer et des personnages pour la plupart encore tout à fait innocents, à savoir les enfants d'un petit village du Cameroun, où Anthéa et ses amis grandissent petit à petit au fil des saisons, des histoires transmises de génération à génération, et des promesses d'un avenir qui s'annonce aussi paisible que prévisible.

Mais l'innocence ne dure qu'un temps.

Pour Anthéa, l'heure est déjà venue de grandir, de partir, et de suivre un couple de Français qui la prend sous son aile pour qu'elle vienne suivre sa scolarité en France, près de Paris. C'est une chance inouïe, l'occasion pour elle d'avoir accès à une meilleure éducation, des opportunités multiples, et une vie à mille lieux de celle qu'elle a toujours connue.

C'est une chance, oui.
Anthéa s'accroche à cette phrase qu'on lui a tant répétée avant son départ.
Même lorsque la réalité qu'elle doit bientôt affronter n'a plus rien d'une chance.

Et ainsi, sans que l'on ne s'en rende compte dans un premier temps, le récit bifurque vers un chemin sordide et sinueux qui constitue très vite une véritable descente aux enfers - qui, comme toute bonne descente aux enfers digne de ce nom, ne devient frappante et évidente qu'une fois qu'il est déjà trop tard.
Petit à petit, alors que les chapitres défilent et que l'implacable vérité devient indéniable, le lecteur, effaré et pétri d'angoisses, devient la proie - roll credits - d'une seule et même question, de plus en plus pressante.
"Ca ne peut pas être ça... si ?"

Et si, bien sûr que si, c'est ça, c'est le mal qui déploie lentement ses chaînes, c'est une tension qui ne cesse de s'épaissir et de s'alourdir, c'est un récit assez virtuose dans sa façon de nourrir l'attente et l'horreur, notamment grâce à son point de vue interne, qui ne permet de suivre que ce que perçoit Anthéa, et laisse donc le lecteur plongé dans le doute jusqu'au bout.

L'écriture même du roman évolue, volontairement très simple pour maintenir la narration à la hauteur de la toute jeune Anthéa, mais de plus en plus évocatrice et glaçante au fur et à mesure que la jeune fille gagne bien malgré elle en résistance et en maturité. La Proie a l'intelligence de disséquer la peur tout aussi bien que la honte, la violence tout autant que la rédemption, avec une subtilité assez hallucinante dans la mesure où elle sera aussi frappante pour de jeunes lecteurs que pour un public plus mature. La Proie est un livre qui retourne et chamboule, une véritable expérience de déni et d'angoisse où l'on en vient à questionner ses instincts les plus primaires, où l'empathie se mêle au rejet, et où l'on découvre, le souffle court et le regard abasourdi, que l'écrivain saura décidément toujours surpasser les pires craintes de son lecteur.
Lien : https://mademoisellebouquine..
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