"Quelle valeur a le renoncement de celui qui ignore à quoi il renonce?"
Le monastère de l'aube relate justement le renoncement de Nobuo Tamagawa, futur novice devenu moine bouddhiste sous le nom religieux de Mitsûdo. Renoncer aux plaisirs de la chair, se "libérer du désir et de la colère", faire la paix dans son coeur, voilà les étapes de ce renoncement.
Mais celui qui se tient à l'écart du monde en connait-il la valeur?
De Kyoto au temple bouddhiste de la montagne d'où les femmes sont exclues, puis vers l'Inde où il cherchera"l'éveil", puis vers le Népal pour suivre les traces de Bouddha et trouver la "sagesse dans les soutras", c'est un parcours initiatique, une métamorphose que nous conte ici
Corinne Atlan.
Kamala, la danseuse désirable aux étranges pouvoirs, saura-t-elle guider Mitsûdo dans la quête sacrée de son "Tibet intérieur"?
Le fond historique (deuxième partie du XIX° siècle) de ce roman est très intéressant:le shogun de Kyoto trahit et ne respecte pas le règne de l'empereur ce qui entraine assassinats, anarchie et incendie pour lutter contre les terroristes.
Le contexte religieux aussi: au départ, avant 1850: shintoïsme et bouddhisme cohabitent au Japon, vers 1872, le bouddhisme (importé de Chine et de Corée) est interdit, par la suite les Chrétiens pourront à nouveau pratiquer au Japon, mais les préceptes que Mitsûdo ramènera de ses voyages, en 1890, ne seront pas encore prêts à être acceptés.
Le début de
le monastère de l'aube décrit au lecteur le déchirement ressenti par ces enfants futurs novices arrachés à leur famille parce qu'ils ne sont pas les ainés devant succéder au père. On pense à
Lobsang Rampa puis la quête intérieure évoque le voyage de Sidharta.
J'ai vraiment apprécié ce roman, pour toutes les raisons évoquées ci dessus ainsi que pour son florilège d'émotions, son dépaysement et sa poésie (
Corinne Atlan l'a parsemé de délicats haïku: Rêve de fleurs/ Les cerisiers tendent leurs branches/Vers l'horizon). Je tiens également à préciser l'influence d'
Haruki Murakami sur l'auteur.
Corine Atlan est en effet l'un de ses traducteurs( elle a traduit
Les amants du Spoutnik l'un de mes préférés).
Bref, pour un premier roman,
le monastère de l'aube est une réussite!