AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Pecosa


La véritable histoire de la mort de Francisco Franco ou les déboires d'un garçon de café mexicain. Ces 30 pages d'un conte pétri d'humour noir sont le symbole du « Je t'aime moi non plus » entre le Mexique et l'Espagne.
Ignacio Jurado Martinez était un paisible garçon de café, sobre, consciencieux, fier de son métier -le service, et non la servitude- apprenant chaque jour mille choses en écoutant parler les prestigieux clients qui fréquentent son établissement.
La douce quiétude de son existence est bouleversée en 1939 par l'arrivée massive de réfugiés républicains espagnols qui investissent les lieux, font fuir les habitués sauf les intellectuels et les clients très matinaux (à cette heure-ci les exilés dorment). Tous parlent fort, se déchirent, refont le monde, refont la guerre, et répètent inlassablement « Cuando caiga Franco ». Exaspéré, Ignacio devient vite incollable sur la guerre civile et les différentes factions. Etourdi par les clients, las des joutes verbales entre anarchistes, socialistes, communistes, catalans, aragonais, galiciens et j'en passe, insomniaque, souffrant de son ulcère qui semble s'être réveillé à l'arrivée des envahisseurs, le serveur décide de passer à l'offensive. Pour que le café retrouve son calme, et les exilés le premier bateau pour l'Espagne, il n'y a qu'une solution. Abattre Franco. Ce qu'aucun anarchiste espagnol n'a osé tenter, lui le Mexicain natif de Sonora, va le faire…
Quand le texte parait en 1960, les services espagnols y voient un appel à l'attentat alors que ce conte cynique n'est qu'un témoignage sur la vie quotidienne des réfugiés dans un pays qu'ils pensaient être un refuge temporaire. Lucide, caustique, et subversif, La véritable histoire de la mort de Francisco Franco est un ouvrage incontournable dans la bibliographie de Max Aub, une autre manière d'appréhender la vie des quelques 20 000 exilés accueillis par le pays de Lázaro Cárdenas del Río. Car trente pages enlevées et brillantes suffisent à Max Aub pour croquer deux univers, celui des Mexicains plus que méfiants envers les Espagnols depuis la guerre d'Indépendance, et celui des exilés vivant en Amérique avec les yeux rivés sur l'Europe. La fin, drôlatique, de cette inclassable politique-fiction, nous enchante et nous fait regretter que le grand Max Aub soit si peu lu en France.
Commenter  J’apprécie          6420



Ont apprécié cette critique (57)voir plus




{* *}