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Critique de VincentGloeckler


« Ceci, dont vous achevez la lecture, est un roman ». Sur ces mots s'ouvre le dernier chapitre de Josée Meunier, 19, rue des Juifs, avant que l'auteur ne donne toute une liste d'éléments de réalité dont s'est inspirée l'écriture du récit, pour conclure ainsi : « La nécessité d'en savoir plus m'a poussée à inventer le reste »… Belle leçon de Michèle Audin, laissant ainsi entendre que l'imagination romanesque a le pouvoir de dire le vrai de l'Histoire ! Et, en effet, le livre respecte ce programme, qui raconte comment Josée Meunier a caché, en juillet 1871, dans son appartement avec son mari l'ouvrier bronzier Albert Theisz, recherché pour son rôle au cours de la Commune, avant de favoriser sa fuite à Londres, et de l'y rejoindre, poussée par l'amour. Puis d'évoquer une existence londonienne, très difficile, faute d'un travail régulier pour Albert, mais aussi de nombreuses rencontres avec d'autres exilés ou militants politiques, dont quelques célébrités : Jules Vallès, Leo Frankel, Karl Marx ou « Fred » Engels… ; une existence comme en suspens, dans l'attente de l'amnistie espérée, ponctuée par les échanges de lettres avec Georgette, leur ancienne voisine de la rue des Juifs, qui leur dépeint l'affreux retour à l'ordre, aussi bien qu'elle leur relate les petites histoires de l'immeuble et le jeu du chat et de la souris mené avec quelques benêts de policiers… Outre la célébration, tout au long du roman, de la geste communarde, de cet immense espoir de liberté et de révolution sociale maté dans le sang, le récit magnifie aussi le personnage de Josée, symbole de l'émancipation féminine, en femme capable de quitter son mari pour rejoindre celui qui n'est pas encore son amant et vivre avec lui son destin d'exilé. Et puis, merveille, l'écriture de Michèle Audin emporte comme dans tous ses précédents romans l'adhésion du lecteur, tant elle sait donner vie à une foison de personnages, alternant scènes et dialogues, utilisant avec brio le procédé oulipien de la liste, comme dans sa description de la perquisition du 19, rue des Juifs, au tout début du roman, ou plus loin, lorsqu'elle évoque la simultanéité des actions des différents habitants de l'immeuble, à la manière du Georges Perec de la Vie mode d'emploi. Avec une sensibilité extrême au génie des lieux, au génie des hommes… Si Michèle Audin a publié, par ailleurs, chez Libertalia, des enquêtes historiques passionnantes au sujet de la Semaine sanglante ou de l'ouvrier militant Eugène Varlin, c'est bien dans ce roman qu'elle rend toute son âme à l'aventure de la Commune, qui inspire encore aujourd'hui tant de réflexions politiques… A lire d'urgence, en attendant le Grand soir, les lendemains qui chantent !
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