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Critique de MarcelineBodier


"Les confessions" commencent comme une longue litanie de glorification de Dieu et autres entreprises de mortifications de l'auteur, qui semble vouloir explorer toutes les nuances de son sentiment de n'être pas à la hauteur. Et puis soudain, au moment où le lecteur moderne va rendre les armes et refermer le livre, un homme, annulant les siècles, nous parle de tout ce qui fait le coeur vivant de nos tourments : la relation à sa mère, l'amitié, l'amour, le sexe, la parentalité, et puis la lutte contre soi-même, l'ambition, l'envie d'en découdre avec des adversaires de son propre monde aussi bien que des "Barbares", comme on disait, envie qui n'est finalement rien d'autre que le besoin de résister contre les forces bouillonnantes et inconnues qui sont en nous. Les litanies religieuses prennent alors une toute autre coloration : elles ne se tournent vers un dieu que pour mieux revenir à l'expéditeur, qui cherche à voir clair en lui-même.

L'auteur fait tout cela d'une manière qu'un éditeur d'aujourd'hui recalerait sans aucune forme de procès : il se livre un peu, retourne à ses litanies de culpabilité, perd son lecteur cent fois, l'endort, l'épuise, avant de le repêcher in extremis en provoquant, au détour d'une vingtaine de pages plus loin, un nouveau choc émotionnel... un plan brouillon, un style assommant, surtout quand, comme moi, on a découvert le livre dans sa traduction du 17ème siècle (au 20ème siècle, la traduction de Frédéric Boyer n'existait pas encore ; voir https://www.babelio.com/livres/Augustin-Les-Aveux/187113). Oui, mais voilà : l'homme qui livre en désordre tous ces sentiments et tous ces souvenirs, qui pourraient être les nôtres, qui auraient pu être vécus au 21ème siècle, cet homme a vécu il y a seize siècles. Seize siècles. SEIZE SIECLES. Il faut le voir plusieurs fois noir sur blanc pour s'en convaincre : une époque qu'on ne connaît que par des ruines, des parchemins, une époque que l'imagination de chacun doit reconstruire à sa guise... et que celui qu'on appelle Saint-Augustin ressuscite comme si c'était la nôtre. le temps fait l'objet d'une méditation célèbre dans le livre, mais à la lecture du texte, on se demande s'il existe encore...

Au moment d'appuyer sur le clic fatal pour poster ce petit texte, j'hésite... si j'ai ressenti une émotion et un plaisir si forts à ma première lecture des "Confessions", c'est parce que personne ne m'avait dit tout cela. J'avais été attirée par le titre, le siècle, mais je ne savais pas à quoi m'attendre, si bien que j'ai lu tout le début avec un sentiment de déception et d'ennui qui a donné son prix à ce que j'ai ressenti brutalement ensuite. Alors si je spoile le livre pour vous, même un tout petit peu, en décrivant mon expérience, votre émotion et votre plaisir pourront-ils être aussi forts que les miens ? Eh bien relisons ensemble les mots qui viennent de me venir, car il n'y a rien d'autre à ajouter : émotion. Et plaisir.
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