Elle est touchante cette BD ! Aurel dessinateur de presse parisien s'intéresse à ses racines ardéchoises avec tendresse.
Son père à la tête d'une PME de menuiserie va prendre sa retraite. Personne ne veut reprendre l'entreprise. Ses deux enfants ont des parcours divergents, loin du pays. Aurel met son art au service d'une enquête dans l'histoire de la menuiserie Froment.
Il fait alors en image et en texte, des interviews de tous, de son père, de sa grand mère, de son oncle, et de chacun des compagnons, pour comprendre la dureté du métier , son contexte régional , les désirs de chacun. Il examine tous les scénarios de reprise qui ont germé, toutes les difficultés administratives sans mélo.
C'est entrecoupé des repas mitonnés par la grand mère qui partage ses savoureuses recettes, et de petits moments de connaissance du travail du bois, pour les bricoleurs.
Il fait revivre une époque, un métier, un terroir, nous fait reconsidérer le rôle d'un patron responsable.
Le noir et blanc précis du trait parfois laisse la place à des paysages traités en dégradés de gris foncés comme en aquarelle, comme des moments de pause perdus dans les pensées.
Il a le souci de conserver une mémoire et témoigne d'une infinie nostalgie dans cet album hommage parfois drôle , lui qui aime bricoler le bois " on se demande bien pourquoi", mais qui s'y prend mal, comme dans l'épisode de découpe des cales.
Ce n'est pas une petite annonce pour une entreprise à reprendre avec ses outils, mais ça y ressemble quand même et c'est très original. Alors si l'aventure dans l'Ardèche vous tente, après tout, son père avait un diplôme d'ingénieur avant de succéder à Marcel le grand -père, faites vite ! Une menuiserie se meurt .
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On suit ici la fin de vie d'une menuiserie familiale aux alentours de Grenoble. Cela nous est raconté de l'intérieur : par les yeux du fils « qui ne reprendra pas la menuiserie ». Son père part à la retraite et aucune solution n'a été trouvée : pas de SCOP, pas de repreneur. Il va falloir fermer.
On suit tour à tour les différents employés : ceux qui sont aigris, ceux qui rêve de la suite, chacun ayant ses raisons de ne pas reprendre l'ensemble.
On découvre leurs histoires, leur intimité : celui qui passe son temps à s'occuper de ses arbres dans sa ferme, le passionné de course à pied, celui qui vient du Maroc et qui est prêt a bouger à nouveau, celui qui fait ça pour changer de commercial mais sans formation adéquate…
Ils sont tous différents et vraiment crédibles, on sent la réalité des êtres qui les ont « inspirés ». Que ce soit sur les apprentissages, la transmission au sein de l'entreprise, les tensions qui sont nées avec cette fin. La force de cette famille, de sa famille, apparait doucement. La grand-mère qui a soutenue l'ensemble à la mort de son mari en trouvant toutes les solutions possible pour maintenir l'affaire à flot, le père qui a abandonné ses études d'ingénieur pour reprendre le flambeau… et les enfants qui ne s'en sentent pas les épaules, qui sont partis, qui ont fait d'autres choses de leurs vies. Il y a une sorte de tristesse dans cette fermeture, sue la perte d'un héritage humain concret qui créera un vide dans la région. Qui n'en a visiblement pas besoin !
Le dessin en noir et blanc est dynamique et efficace. Bien campé que ce soit sur les détails du métier ou sur les portraits. D'ailleurs à la fin on a une notice qui détaille bien les machines évoquées au fil du récit. le découpage est assez classique mais efficace et permet de suivre l'ensemble facilement. Les textes écrits entre les chapitres complétaient aussi les témoignages en les détaillant, ça fonctionne bien ! On entre en empathie avec ce patron qui essai de faire ce qu'il peut, qui se déclare de gauche et qui essaie de faire au mieux pour ses ouvriers. J'adhère bien à sa vision de son travail, être un catalyseur entre clients et artisans. On voit ainsi son acceptation du pvc et de l'alu, des fenêtres toutes faites, etc.
J'aime vraiment l'aspect familial et l'observation de la ruralité actuelle : ça se dépeuple parce que de fait, c'est plus simple d'aller en ville ou d'intégrer de grosses boites. J'aime cette honnêteté. L'observation est directe et semble juste, soutenue par le trait mordant de l'auteur.
Il nous offre une vision réaliste du petit patron local, de l'entreprise à échelle humaine qui permet un travail de qualité bien que cher.
Ce témoignage est intéressant ! parce qu'il nous parle vraiment de notre société, celle qui n'est pas « tendance » qui est simplement l'évolution historique qui meurt doucement… Un recueil historique qui nous attendrira dans quelques années. Il nous rappelle aussi que l'aventure se tente même avec un diplôme d'ingénieur et des études citadines, on peut partir reprendre la menuiserie familiale au fin fond de l'Ardèche. C'est d'ailleurs la conclusion de l'auteur.
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Roman graphique autobiographique. Aurel ne reprendra pas la menuiserie paternelle transmise de père en fils depuis quatre générations.
Avant sa fermeture définitive, le dessinateur retourne au coeur de son Ardèche natale et fait oeuvre de recueil de mémoire. Auprès de ses parents pour commencer, des salariés de la petite Pme ensuite. Au fil des pages se dessinent de multiples histoires : familiale, sociale, technique et économique. Au travers de beaux portraits, on touche aussi à une vie quotidienne très peu présentée dans les grands médias. La tendresse du regard s'exprime par un trait sobre, un noir et blanc tout en douceur. L'album sait être touchant tout en traitant avec réalisme la question de la désertification de certaines régions françaises.
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Aurel est un auteur de bd. Il n'a pas l'intention de reprendre la menuiserie située au coeur de l'Ardèche qui existe depuis 4 générations dans sa famille. Il n'y a pas de repreneur. C'est tout un pan de notre économie locale qui disparaît, victime sans doute de la mondialisation.
L'auteur retourne dans son village d'enfance. Il fait des rencontres qui sont autant de témoignages autour de cette menuiserie. Il interroge son père ainsi que les ouvriers. Il passe chez sa grand-mère dont la cuisine semble être le quartier général. Bref, c'est un voyage assez intimiste au coeur de la France et loin des clichés des journaux télévisées.
Cette oeuvre est destinée à nous faire réfléchir sur nos choix de vie. Au-delà de ces aspects, la lecture est parfois intéressante mais parfois ennuyeuse car on se perd dans des petits détails de la vie quotidienne. Cela reste un documentaire qu'il faut sans doute lire pour voir comment se passent les choses pour ces petites entreprises qui souffrent.
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Derrière ce portrait de famille en milieu artisanal niché dans une description plus générale, Aurel livre une autobiographie pudique et décalée.
Lire la critique sur le site : ActuaBD
La menuiserie s'était transmise de père en fils depuis 4 générations.
Mon père prendra sa retraite dans quatre ans.
Je suis dessinateur de presse. Ma sœur, physicienne.
Je serai le fils qui ne reprendra pas ...
la menuiserie
J'ai grandi dans le village où mon père avait lui-même grandi.
Je suis allé dans la même école que mon père.
Certains instituteurs m'appelaient par son prénom.
J'approuverais fort la science universelle, si les hommes en étaient capables; mais j'estime plus un menuisier, qui sait son métier, qu'un bavard, qui pense tout savoir, et qui ne possède rien.
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