Héraclite et la philosophie

D'un ouvrage perdu – déposé sur l'autel d'un temple d'Artémis qui fut incendié – il ne reste que quelques fragments, connus grâce à des commentateurs et à leurs nombreuses citations. D'un style souvent jugé obscur, la pensée d'Héraclite n'a cependant pas cessé de nous interpeller et marque une étape décisive dans l'histoire de la pensée. Ce philosophe Ionien qui vécut au 6 siècle av. J.C. fut présenté comme un misanthrope arrogant et mélancolique, fustigeant une multitude vulgaire. La pensée d'Héraclite est celle de l'unité de l'être en perpétuel devenir – Tout s'écoule et se transforme, le fleuve est l'image du tout et le feu comme son moteur et son principe – d'une harmonie qui englobe des contraires : le lumineux et l'obscur, le chaud et le froid, l'humide et le sec, le visible et l'invisible, l'utile et le nuisible, le haut et le bas, des tensions parfois déchirantes et des luttes incessantes. La pensée d'Héraclite est une pensée tragique, celle d'un monde perçu comme un jeu cosmique. Quant au Logos, la pensée qu'exprime le langage, il coïncide avec l'ordre du monde, avec ses structures, le Cosmos s'opposant au Chaos. Kostas Axelos revient sur cette oeuvre essentielle, au contenu aussi poétique que philosophique, en en commentant les fragments, non pas selon l'ordre qui a été admis, lequel peut être modifiable, mais plutôt selon un ensemble de thématiques : le Logos, le Cosmos, le Divin, l'Homme, la Cité, en insistant sur ce qu'elle a d'irréductible et qui semble en perpétuel mouvement, fragmentaire tout en visant la totalité.