Notre narratrice, Hava, la quarantaine, vit dans un très bel appartement du centre de Genève, avec son mari, Edouard. Hava est enceinte de trois mois. Cette très belle perspective lui permet de mener une réflexion sur sa vie et sur l'existence en général. Avec Hava, nous retournons vingt ans auparavant, lorsqu'après une rupture sentimentale, la jeune femme est démunie par rapport à son avenir. Elle consulte une voyante avec l'espoir d'obtenir des pistes pour sa vie future. A travers cette rétrospective, elle va se remémorer tout le chemin parcouru.
Le sujet de l'immigration est présent en filigrane durant tout le récit, puisqu'Hava est d'origine turque, arrivée en France lorsqu'elle était enfant.
La notion d'identité culturelle et sociale est abordé avec le conflit qu'oppose Hava et sa famille. La jeune femme n'aura de cesse d'essayer de plaire à sa famille, mais la tâche s'avérera très ardue. Hava a des attentes totalement différentes. Notre culture nous façonne, c'est notre essence même. Or, Hava possède deux cultures diamétralement opposées et doit composer avec, ce qui ne sera pas toujours facile.
La réflexion sur l'amour aurait pu être riche si elle n'avait pas été biaisée par la consultation de cette voyante. Je n'ai pas adhéré à cela, pour moi, la voyance est quelque chose d'abstrait, et les annonces faites peuvent s'avérer catastrophiques, dans la vie, comme ici, dans le roman, car il n'y a plus eu d'effet de surprise, ni pour le lecteur, ni pour Hava. Dommage…
« Mais une femelle que le tic-tac de l'horloge rappelle à l'ordre ne voit rien, ne veut rien voir. Machiavel est son ami, sa faim justifie ses moyens et donc elle tanne – entre autres ; parce qu'elle peut aussi saouler, harceler, traque, et j'en passe. »
J'ai aimé les références musicales et littéraires parsemées tout au long du récit ; Selda appuie ses réflexions sur des auteurs connus tel Jean-Claude Kauffman et son excellent « Premier matin ». Quant à Calogero ou les Portishead ils apportent une note de fun.
La plume est assez légère et fluide malgré certaines répétitions qui m'ont agacées. Côté construction, la première partie nous relate le présent d'Hava, sa réussite sociale, et la seconde, son parcours amoureux jusqu'à sa grossesse. J'ai trouvé la première partie trop longue, Hava est un personnage sympathique, mais à l'ambition démesurée, portant bien trop d'importance à sa réussite sociale. Lorsque j'ai attaqué la seconde partie, je pensais trouver des réponses dans le passé d'Hava, mais finalement, je me rends compte que tout à été survolé, notamment les relations familiales, sous le joug de son père, patriarche autoritaire. Hava s'est révélée être une jeune adulte avide de profiter de la vie, de la liberté, mais usant et abusant du sexe, de la drogue, de l'alcool. Bref, toutes les facettes qui peuvent s'avérer désastreuses en cas d'excès.
Une lecture en demi-teinte pour moi, néanmoins rendue agréable par les belles réflexions sur la conception de la vie et de la liberté.
« Il y aura ensuite une longue période de transition, avec ses hauts et ses bas, surtout ses bas, un chemin sinueux qui me mènera jusqu'au bonheur, le vrai, le simple, celui qui fait le quotidien, qui le remplit de tout petits riens, ce bonheur serein qui n'est pas linéaire, mais saccadé, distillé par petites touches, le bonheur inébranlable, qui ne souffre pas de l'inconsistance de la passion. »
Je remercie les Éditions du Jasmin et la Masse Critique Babélio pour cette lecture.
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