Hospitalité en France

D'accueil en accueil, les hospitalités

Crise de l'accueil, crise des Etats européens face à la mobilité internationale, durcissement des frontières externes… En introduction, les autrices et auteurs soulignent l'importance des engagements individuels et collectifs « face à la réticence des Etats à se mobiliser pour assurer un accueil digne et sûr à toutes personnes nouvellement arrivées ou circulant sur le territoire », une exceptionnelle mobilisation de citoyen es, des actions au nom de l'hospitalité.

« C'est de la complexité et de la diversité des pratiques au coeur de ces mobilisations que cet ouvrage veut rendre compte, tout en sachant que la richesse des expériences d'accueil et de micro-hospitalités dans les villes et les villages de France est au-delà de toute capacité de recension ».

Hospitalité publique, inhospitalité, hospitalité comme « principe universel et pratique intime », relation à l'autre, « Parler d'hospitalité, c'est donc pointer un manque, faire une critique des politiques publiques migratoires et d'accueil « inhospitalières », et se demander comment elle serait, à l'inverse, possible ».

Les autrices et auteurs proposent trois définitions de l'hospitalité, un sens étroit et un sens social et relationnel, un retour sur les institutions d'accueil des personnes errantes, une cosmopolitique, « Dans le même temps, le principe d'hospitalité publique disparaît derrière la difficile mise en oeuvre, Etat par Etat, du droit d'asile ou derrière l'échec des tentatives de création d'un véritable droit international des travailleurs et des travailleuses migrantes ».

Elles et ils abordent, entre autres, les notions et les pratiques d'hospitalité, d'accueil, de solidarité, les structures et dispositifs d'accueil, les hôtes et les hôtesses, les personnes accueillies et hébergées, les dimensions « individuelle et collective, intime et politique » de l'engagement, l'histoire des formes d'engagement en faveur de la cause des migrantes et des migrants et les mobilisations en faveur des « populations étrangères », l'alphabétisation et les cours de français, le secteur associatif, le Groupe d'information et de soutien des travailleurs immigrés (GISTI), les luttes revendicatives, l'expression « sans-papier », la fermeture des frontières externes, le confinement des « personnes étrangères indésirables », la réinvention de l'hospitalité…

Je souligne l'intérêt de la mise en parallèle de récits d'hébergé es et d'hébergeuses/hébergeurs (arrivée, soirée, nuit, lendemain, jours suivants), éclairant « la relation d'hospitalité aujourd'hui ».

Un ouvrage du coté de la solidarité et de l'humanité partagée. Les analyses portent sur « Les formules de l'hospitalité »(programme d'accueil chez l'habitant e, hospitalité hors programme), « Les hôtes accueillants » (profils et parcours d'engagement, engagement « post-it » gratifiant, accueil chez soi comme « choc »), « Les hôtes accueillis » (accueil chez l'habitant e, cohabitation au quotidien, épreuve pour les hébergé es, effet tremplin), « L'hospitalité communale » (campement et quartier d'accueil, squats, mobilisations villageoises).

Les auteurs et les autrices ne cachent pas les difficultés, ne masquent pas les éléments contradictoires, n'enfouissent pas les différents positionnements sous la généralité. Iels discutent, entre autres, des programmes d'accueil chez l'habitant e, des associations, des contraintes, de changements de domicile, de disponibilité, d'espace disponible, d'accompagnement, des raisons de l'asile et des « impensés de cette catégorie administrative », de reconnaissance de l'autonomie des personnes, « L'autre est alors un sujet politique, autonome dans son parcours et son projet », des diasporas, des partages d'expériences, d'économie, de travail abusif, de l'indicibilité des raisons de l'émigration…

Elles et ils présentent les hôtes et les hôtesses accueillantes, les profils et les parcours d'engagement, les questions juridiques de l'hébergement, les gratifications et les valorisations de soi, les effets de l'accueil chez soi, « la cohabitation déplace les frontières matérielles de l'ordinaire, le rapport à son domicile et à son espace intime », les tensions au quotidien, les horaires et problèmes liés, les prises de conscience, « Accueillir l'étranger chez soi les transforme, les questionne et les bouleverse »…

Elles et ils détaillent les hôtes accueilli e, « dormir chez des particuliers n'a jamais été une évidence », les expériences des abus en situation de migration, la surreprésentation des femmes dans les accueillant es, les cohabitations au quotidien, impossibilité de se fixer, l'impossibilité d'en parler, l'impossible chez soi, les dissimulations de « ces cohabitations à leurs proches resté es au pays », les fonctionnements perçus comme des contrôles, les positions asymétriques, le soutien affectif inestimable, les liens de « quasi-parenté », les possibles insertions professionnelles…

Le dernier chapitre est consacré aux expériences d'hospitalité communale, à la Charte de l'Association nationale des villes et territoires accueillants, aux campements, aux quartiers d'accueil, aux squats, aux multiples mobilisations villageoises, aux figures hospitalières, à la question du commun…

En conclusion, « Une mobilisation sociale et ses limites », les autrices et les auteurs reviennent sur la mobilisation « à la fois intime, sociale et politique », l'acte ordinaire, les innovations sociales « dans un contexte de fermeture des frontières », la réinvention ou la redécouverte des lois de l'hospitalité, l'asymétrie de la situation d'accueil, les éléments contradictoires traversant l'hébergement solidaire, les effets de politisation des actions…
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