La Boutique Vif-Argent, tome 2 : La boussole des rêves

M.Lily se tourna vers Meb, qui sortit de son sac à dos une énorme seringue pour cheval, à l'aspect vraiment menaçant.
-Attendez une minute ! criai-je. J'ai peut-être changé d'avis !
-Finley! s'exclama Doug d'un ton plein de reproches.
-J'ai toujours détesté les piqûres. Tu le sais très bien !
-Mais tu es un arbre !
-Et alors ? Je voudrais vous y voir, vous, même si vous étiez un arbre, devant une seringue comme ça !
Une brise légère se leva à l'horizon, ébouriffant mon feuillage.
-D'accord, d'accord, je plaisantaitout simplement, soupirai-je. Vas - y, Meb, prends ta seringue !

Ma mère disait que les morts sont uniquement ceux qui ont perdu la curiosité de venir voir de temps en temps ce que font les autres.

Quand on court pieds nus la nuit, même l'été, l'herbe est aussi froide que des aiguilles de glace.

M.Lily reprit:
-Nous te laisserons seul, parce que l'Eau des Songes n'a d'effets que si on est seul. Quand on est seul, on rêve. Nous partirons, et lorsque nous reviendrons à l'aube, tout sera arrangé.

-Tu est fou!
-C'est ce que m'a dit aussi l'Homme Vert. Il a ri, a ramassé ses cartes, sans me montrer ce qu'il avait, lui. Il a siffloté et a conclut : "Elle avait raison, cette chipie d'Adèle, quand elle m'a dit que je ne m'ennuierais pas dans ce village. C'était une belle partie, Finley McPhee, vraiment une belle partie. Ce n'est pas pour cette fois, alors je m'en vais. Mais ne t'inquiète pas, je crois que nous rejouerons.

Je me frottai les yeux, et commençai à distinguer plus nettement ce qui m'entourait. J'étais dans un salon minuscule aux murs tapissés de livres. Les étagères étaient en bois rouge, de même que le plancher et le plafond, et elles débordaient de volumes multicolores. Les objets les plus disparates étaient disséminés ici et là : un éléphant en cuir avec des boutons à la place des yeux, un petit sac argenté d'où sortaient des bouffées de fumée, un nautile en cristal, un petit soldat de plomb qui marchait d'un pas rythmé d'un bout à l'autre de la librairie, le portrait d'une femme très élégante qui baillait de temps en temps et faisait la grimace.

Cette somnolente campagne écossaise s'était transformée pour moi en une espèce de parc d'attractions à sensations fortes, où je risquais continuellement ma vie, où se réveillaient des Géants Errants, où des Hommes Verts sortaient des bois.